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Hollande ne veut rien changer
Mis à jour le 12/11/2013 à 22:40 - Publié le 12/11/2013 à 20:51
François Hollande, mardi, sur le perron de l'Élysée.
Alors que la crise politique et sociale s'aggrave, une partie de la majorité presse le chef de l'État de prendre une initiative, mais, pour le moment, il choisit de garder le même cap.
C'était à la fin du printemps. Un proche de François Hollande lui fait passer une note à l'Élysée. Un «papier» sur l'état d'esprit de la majorité. «Les députés savent que le semestre à venir sera difficile, écrit-il. Retraites, chômage, budget… Ils savent que ce sera dur, qu'il faudra tenir.» Quelques jours plus tard, le texte revient, annoté, à l'expéditeur. Dans la marge, à côté des mots «dur», «difficile», le président a écrit: «C'est juste.» Un poids lourd de la majorité commente: «Hollande savait que la première partie de son quinquennat serait épouvantable. Mais il n'avait pas imaginé une seule seconde que cela serait à ce point-là.»
Dégradation de la note de la France par Standard & Poor's, ras-le-bol fiscal qui fait tache d'huile, réforme des rythmes scolaires vilipendée, impopularité record pour l'exécutif, assortie de huées lors des cérémonies du 11 Novembre, grogne chez les socialistes qui ne savent plus à quels saints se vouer à quelques mois des municipales… Chaque jour qui passe semble aggraver un peu plus la crise sociale et politique dans laquelle s'enfonce le pays. La contre-attaque de l'exécutif, qui voulait relativiser les sifflets du 11 Novembre en les imputant à «quelques nervis de l'extrême droite», a fait long feu. À gauche, personne n'est dupe. Mardi, le député PS Malek Boutih a envenimé encore ce climat de sauve-qui-peut en réclamant, dans Le Parisien, un remaniement et le départ de Jean-Marc Ayrault.
Il n'est pas le seul à souhaiter un «électrochoc» qui aiderait à tourner la page de cette mauvaise séquence qui traîne en longueur depuis la calamiteuse affaire Leonarda. Mais, sommé de réagir, Hollande temporise. Et consulte tous azimuts. Son déjeuner avec Martine Aubry, mardi, a relancé les spéculations sur une hypothétique entrée de «poids lourds» dans le gouvernement. Le président consulte aussi régulièrement son dernier carré de fidèles, ministres (Michel Sapin, Stéphane Le Foll, Jean-Yves Le Drian) ou parlementaires (Frédérique Espagnac, François Rebsamen, etc.), «ceux qui seront toujours là en période de gros temps et qui ne se cachent pas derrière leur petit doigt pour lui dire la vérité», glisse un proche. En quête de paratonnerre, Hollande qui a toujours interdit à ses troupes de s'organiser, pourrait lâcher du lest.
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«Il raisonne comme on franchit des haies. La première haie, c'est d'arriver à Noël. Après, il lui restera un mois et demi à tenir avant les municipales. Ce sera dur mais c'est possible»
Un député PS ___________________________________________________________________________________________________________
«Le président garde la tête froide, prévient toutefois un hollandais. Pour le moment, il consulte, il écoute. Mais il prépare les choses seul. Il faut vraiment mal le connaître pour penser qu'il ne sait pas ce qu'il va faire, ni comment. Il est d'une lucidité à toute épreuve. La question, c'est quand? Il ne veut pas se tromper.» Car Hollande se trouve devant une impossible équation. Beaucoup, au sein de la majorité, estiment qu'il doit prendre une initiative sans tarder, pour se redonner de l'air. Mais les municipales de mars et les européennes de mai, qui s'annoncent délicates pour la gauche, l'obligeront à contre-attaquer de nouveau. «Hollande est coincé par le calendrier électoral», résume un député PS. «S'il le peut, il ne touchera pas au gouvernement avant les municipales, veut croire un pilier du groupe PS. Hollande raisonne comme on franchit des haies. La première haie, c'est d'arriver à Noël. Ensuite, il lui restera un mois et demi à tenir avant les municipales. Ce sera dur mais c'est possible.»
S'il a longtemps cru que sa personne, son style et sa gouvernance n'étaient pas en cause, contrairement à Nicolas Sarkozy, le président sait que ce n'est plus le cas. Son lien avec les Français s'est abîmé. «Il doit rétablir un canal de communication avec eux», note un familier de l'Élysée. Sa conférence de presse, début décembre, servira à cela. Mais beaucoup estiment que cela ne suffira pas. «Il doit adopter une ligne politique et l'assumer, décrypte Jérôme Sainte-Marie, directeur de PollingVox. Car les Français ne lui reprochent pas seulement un manque d'autorité, mais aussi un manque de sincérité.»
Le chef de l'État est également soucieux de rétablir le lien avec sa majorité. Des proches lui ont conseillé de rencontrer les parlementaires PS après le vote du budget. «Hollande avait à peu près tout prévu sauf la non-tenue de son propre camp, l'irresponsabilité de certains éléments de la majorité», confesse un proche. Les éminences grises qu'il consulte lui conseillent aussi de remanier son dispositif élyséen. «Pourquoi Hollande a-t-il placé autant d'anciens de sa promo de l'ENA? Parce qu'il en était le chef et que tous sont fascinés par lui depuis trente ans, analyse un ami du président. Mais ça ne suffit pas! À l'Élysée, il faut des politiques. Et il faut des vrais conseillers, qui lui disent ce qui ne va pas.» Un collaborateur du président assure: «On n'ajoute pas de la crise à la crise. Tout changer, cela donnerait l'impression de paniquer. Si la question du remaniement doit se poser, ce ne sera pas avant les européennes. Avant, on ne bouge pas.»