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En Italie, seule une grande coalition peut éviter le chaos
Mis à jour le 26/02/2013 à 22:09 | publié le 26/02/2013 à 19:09
Pier Luigi Bersani lors d'une conférence de presse à Rome, mardi.
INFOGRAPHIE - Le chef de la gauche, Pier Luigi Bersani, hérite d'un Parlement ingouvernable. Son salut dépend de son adversaire Berlusconi ou du trublion Beppe Grillo.Au lendemain du «tsunami» Beppe Grillo qui a ravagé le paysage politique italien, Pier Luigi Bersani pratique l'euphémisme: «Le pays se trouve dans une situation très délicate.» C'est peu dire au regard du chaos qui s'est instauré. Le leader démocrate sait qu'il lui appartiendra de tenter, dans les jours et les semaines à venir, de former un nouveau gouvernement. Et il en mesure à l'avance toutes les difficultés.
Pour éviter un retour quasi immédiat aux urnes, que tous s'accordent à juger catastrophique, deux voies s'ouvrent au chef du Parti démocrate: soit conclure un accord de gouvernement avec le leader du Mouvement 5 étoiles (M5S), qui s'est affirmé comme le premier parti du pays, devançant toutes les autres formations, avec 25,5 % des voix ; soit s'entendre avec à la fois le Peuple de la liberté (PDL) de Silvio Berlusconi et la coalition centriste de Mario Monti, qui a réalisé à peine plus de 10 %, en vue de conclure une «alliance nationale» fondée sur quelques priorités urgentes pour garantir la stabilité du pays. De nouvelles élections pourraient alors avoir lieu d'ici à un an, une fois modifiée la loi électorale. Deux options très différentes l'une de l'autre, et qui suscitent bien des perplexités.
«Le moment est dramatique. Nous en sommes conscients, a dit Bersani lors d'une conférence de presse mardi. Permettre que l'Italie sorte de l'euro serait un désastre. Nous resterons fidèles à l'Europe.» Puis, lucide: «Nous sommes arrivés en tête, nous n'avons pas pour autant gagné si nous ne parvenons à garantir la gouvernabilité du pays. Nous soumettrons au chef de l'État un programme de réforme des institutions, du financement de la politique, de la moralité publique, de l'emploi, des thèmes sociaux. Nous ne négocierons pas séparément avec telle ou telle force. C'est au Parlement, sur la base de nos propositions, que cela se fera.»
Le président de la République confie la charge de constituer un gouvernement au leader dont la formation est arrivée en tête au Parlement. Il devrait donc convoquer Bersani au Quirinal à son retour de la visite officielle qu'il a entreprise mardi en Allemagne. Le Parti démocrate (PD) dispose d'une avance infime dans les deux Chambres. À la Chambre basse, 124 000 voix le séparent du PDL de Berlusconi. Le PD a perdu en route 4 millions d'électeurs par rapport aux législatives de 2008, plus d'un sur deux au profit de la formation de Beppe Grillo. Cela ne l'empêche pas d'empocher la «prime de majorité», qui permet à sa coalition de rafler 340 sièges. Celle de Berlusconi en obtient 121. Au Sénat, le centre gauche devance la droite d'une poignée de sièges mais n'est pas en mesure de garantir une majorité de gouvernement stable, même avec l'appui des 18 sénateurs élus sur la liste du premier ministre sortant, Mario Monti.
«Nous sommes vivants»À première vue, une alliance avec Beppe Grillo paraîtrait le plus logique. D'autant que Nichi Vendola, l'allié de Bersani à l'extrême gauche, fort de ses 39 députés, exclut toute grande coalition avec la droite. Le leader démocrate sait toutefois qu'un accord avec Beppe Grillo revient à passer sous les fourches caudines du trublion de la politique italienne. Certes, des points d'accord peuvent être trouvés: sur la réforme des institutions, la réduction du nombre de parlementaires, la suppression des provinces… Mais l'ex-comique, qui s'est affirmé comme un formidable tribun, paraît peu enclin au compromis. «On vous a flanqué une sacrée taloche», dit-il aux partis traditionnels. «Nous allons les mettre le dos au mur. Dans six mois, nous retournons aux urnes. Le vote de ce week-end n'était qu'une répétition générale», lance-t-il encore.
Silvio Berlusconi se montre prudent. Il évite de se prononcer sur les alliances futures. Il sait qu'un pays ingouvernable ne convient à personne. Pas même à lui. Il se contente de jubiler sur son score: «Vous avez vu? Nous sommes vivants.» Et s'en prend à Mario Monti qui lui a tourné le dos, refusant de réunir le vote des modérés sous sa houlette. Sans l'entrée en scène du Professore,le Cavaliere aurait pu remporter sa sixième victoire électorale.
Les victimes du scrutin se comptent par dizaines. Des personnages en vue sortent du Parlement, tel le président de la Chambre des députés, Gianfranco Fini, élu depuis vingt ans. Le leader d'extrême droite Francesco Storace, candidat à la présidence de la région Latium. La radicale Emma Bonino, vice-présidente du Sénat. L'ex-magistrat anticorruption Antonio di Pietro et Antonio Ingroia, un substitut de Palerme qui avait constitué une liste d'extrême gauche. Tant d'autres encore.
Une vague de jeunes très motivés, provenant pour la plupart du M5S, qui comptera 165 élus, arrive en force. Impatients de s'attaquer à la réforme de l'État.