Le Monde.fr avec AFP et Reuters | 08.04.2014 à 06h09 • Mis à jour le 08.04.2014 à 07h19
Manuel Valls, à Matignon, le 4 avril.
Manuel Valls s'apprête à vivre son baptême du feu en tant que premier ministre. A 15 heures mardi 8 avril, le nouveau chef du gouvernement doit prononcer un discours très attendu de politique générale devant l'Assemblée nationale. Il posera dans la foulée la question de confiance, prévue par le premier alinéa de l'article 49 de la Constitution.
S'il échoue, son gouvernement sera renversé. Si un tel scénario reste improbable, le PS ayant à lui seul la majorité absolue (291 sièges sur 577), le premier ministre est toutefois attendu au tournant sur plusieurs points.
Donner un visage au « combat » de François Hollande
Ce discours doit donner un élan et mettre sur de bons rails le « gouvernement de combat » voulu par François Hollande après la gifle des municipales. Manuel Valls, qui prépare avec ses conseillers depuis plusieurs jours ce discours, promet une prestation « concrète ».
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Le 3 juillet 2012, Jean-Marc Ayrault avait fait naître de premiers doutes dans son camp en livrant une prestation longue et sans saveur.
Préciser la politique économique
Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a déclaré que le discours de Manuel Valls « porterait sur le pacte de responsabilité et de solidarité, sur sa mise en œuvre », même si « la solidarité, la question de l'éducation, la question de la santé et les enjeux sur le pouvoir d'achat [seraient aussi] au cœur de discours de politique générale ».
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Pour la gauche du Parti socialiste, ce pacte, qui inclut 10 milliards d'euros supplémentaires de baisse du coût du travail accordés aux entreprises sans contreparties obligatoires, constitue un « chèque en blanc » au patronat qui est inacceptable.
Des clarifications sur l'autre pacte dit « de solidarité », destiné à donner un peu de pouvoir d'achat aux Français, potentiellement grâce à une baisse des cotisations sur les bas salaires compensée par une suppression de la prime pour l'emploi (PPE), sont attendues.
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A droite, l'opposition cherche surtout à avoir le détail des 50 milliards d'euros d'économies promises par François Hollande d'ici à 2017, qui doivent porter sur le budget de l'Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités.
Rassurer les députés PS
Après avoir rencontré une délégation d'élus socialistes dimanche à Matignon, Manuel Valls doit participer mardi matin à la conférence des présidents de groupe à l'Assemblée, avant d'assister à la réunion du groupe PS.
Le premier minsitre sait qu'il fera face dans l'Assemblée à une centaines de députés socialistes qui ont publié, au lendemain du second tour des élections municipales une lettre réclamant un nouveau « contrat de majorité » du gouvernement après l'échec électoral cuisant du Parti socialiste.
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Ce « contrat » demande notamment la « fin des politiques d'austérité » en Europe, des mesures en faveur des bas salaires et des petites retraites, un accent sur l'investissement national, et davantage de pouvoir pour le Parlement.
Le texte a reçu la signature de 90 socialistes, qui sont pour l'essentiel des députés de différentes sensibilités : aile gauche, aubrystes, proches du mouvement Gauche populaire (ex-strauss-kahniens), mais aussi un ou deux proches d'Arnaud Montebourg, ou encore le rapporteur du budget à l'Assemblée nationale, Christian Eckert.
Lundi, le président du groupe socialiste, Bruno Le Roux, a voulu dans une autre lettre rappeler aux députés PS que « la solidarité est la condition de [leur] réussite », afin d'éviter un trop grand nombre d'abstentions lors du vote de confiance.
Eviter les votes sanctions
Le nouveau gouvernement de Manuel Valls dispose d'une majorité réduite mais encore relativement solide. L'exécutif doute que la gauche prenne le risque d'un vote hostile mardi, qui ne laisserait au chef de l'Etat guère d'autre choix que de dissoudre l'Assemblée nationale.
Pour que Manuel Valls n'ait pas la majorité au moment du vote de confiance, il faudrait une rébellion d'au minimum 50 députés PS. Le vote se déroule à la majorité des suffrages exprimés, ce qui ne prend donc pas en compte les non-votants ni les abstentions.
Au PS, certains signataires du « contrat de majorité » font planer le doute sur leur choix. « Il y a en a certains qui s'abstiendront », croit savoir la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann, selon laquelle « personne ne va dire ce qu'il va voter jusqu'au dernier moment ».
Henri Emmanuelli, député des Landes, a menacé de s'abstenir, demandant que le Parlement se prononce à un moment sur le pacte de responsabilité : « Confiance, oui ; chèque en blanc, non. En l'absence de cet engagement précis, ce sera l'abstention. » Même son de cloche chez Pouria Amirshahi, député des Français de l'étranger : « Si voter la confiance, c'est voter le pacte de responsabilité, alors je ne donnerai pas de chèque en blanc par mon vote. »
Vote pour ou abstention, les 17 députés écologistes doivent prendre leur décision mardi matin. Ils ont apprécié d'être reçus ces derniers jours par le premier ministre, mais disent vouloir veiller au respect du pacte majoritaire conclu en 2012 avec le PS. Grâce à son discours de politique générale, Manuel Valls pourrait leur donner des gages, avec des garanties sur la transition énergétique.
Les 17 radicaux de gauche entretiennent eux aussi le suspense, mais devraient au bout du compte accorder la confiance à un gouvernement dont fait partie l'une d'entre eux, Sylvia Pinel (ministre du logement). Les dix députés du Front de gauche hésitent quant à eux entre vote contre et abstention.
A droite, sans surprise, l'UMP (199 députés) et l'UDI (29 députés en l'absence de Jean-Louis Borloo) voteront contre. Des exceptions sont toujours possibles : l'UMP Frédéric Lefebvre a ainsi dit n'avoir pas encore décidé de son vote.