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Nouvelle nuit de violences et de terreur dans les rues de Bangui
Publié le 27.12.2013 à 10h51 • Mis à jour le 27.12.2013 à 11h04 |
Des habitants de Bangui quittent la capitale centrafricaine, vendredi 27 décembre.
Les premiers tirs d'armes automatiques ont retenti près de PK0 (« Point kilométrique Zéro »), le rond-point central de Bangui. Dans la nuit de jeudi 26 à vendredi 27 décembre, pendant le couvre-feu, il était impossible de déterminer la nature de l'attaque, et la capitale centrafricaine a désormais l'habitude de ces rafales de kalachnikov qui résonnent dans certains quartiers. Puis les tirs se sont intensifiés, le ciel a été illuminé de balles traçantes, et les combattants ont utilisé des lance-roquettes.
Bangui, ensanglantée par les tueries depuis le 5 décembre, craint surtout les attaques contre la population, menées soit par des partisans de l'ex-Séléka au pouvoir contre des chrétiens, soit par des miliciens rebelles « anti-balaka » contre des musulmans. Les quartiers Nord connaissent par ailleurs régulièrement des affrontements entre ces mouvements armés. Un « combat » comme celui de jeudi soir au coeur de la capitale est en revanche plus rare.
DES PICK-UP ARMÉS DE MITRAILLEUSES LOURDES
Il semblerait, selon des témoignages de soldats de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca) et d'habitants du quartier rencontrés dans les rues à l'aube, que l'avenue Barthélémy-Boganda, artère commerçante du centre de Bangui partant de PK0, ait été parcourue par des pick-up armés de mitrailleuses lourdes et tirant sur des objectifs non identifiés. Des tirs nourris sont également provenus de la colline menant au camp de Roux, QG du président Michel Djotodia et de l'état-major de l'ex-Séléka. Un porte-parole présidentiel, Guy Kodegue, a évoqué une offensive de miliciens « anti-balaka », qui auraient été repoussés.
D'autres tirs, enfin, ont été entendus autour de l'ambassade du Tchad et du camp du contingent tchadien de la Misca, près de l'Hôtel Ledger, où logent de nombreux dignitaires du pouvoir centrafricain. La version de la présidence est toutefois démentie par des témoignages concordants. Nul n'aurait en fait attaqué le camp de Roux, pas plus que les bâtiments tchadiens.
« L'incident déclencheur est un accrochage, près de PK0, entre des hommes de la Séléka et des soldats congolais de la Misca, confie une source occidentale. Les défenseurs du camp de Roux, pensant peut-être être attaqués, ont alors tiré vers le bas de la colline, en direction de la ville. Puis tous les ex-Séléka et les Tchadiens de la ville s'y sont mis, tirant surtout en l'air, pour montrer qu'ils attendaient un éventuel assaillant de pied ferme. Mais absolument rien n'indique que des “anti-balaka” soient parvenus jusqu'au centre-ville. »
Cinq soldats du contingent tchadien ont été tués mercredi 25 décembre à Bangui.
« CONCENTRATION DES EFFORTS »
L'armée française est intervenue environ une heure après la fin des tirs. Un convoi de blindés survolé par des hélicoptères a traversé le centre-ville et est passé par PK0, sans être impliqué dans des incidents armés. Les officiers de l'opération « Sangaris » avaient convoqué la presse jeudi pour annoncer qu'au lendemain d'une violente journée d'affrontements, 600 hommes venaient d'être envoyés dans les quartiers Nord, pour au moins deux jours.
L'objectif, plutôt que de patrouiller partout dans Bangui sans que cela fasse baisser le niveau de violence, est « une concentration des efforts, avec davantage de troupes » dans les secteurs les plus conflictuels, selon le lieutenant-colonel Sébastien Pelissier, le sous-chef des opérations de « Sangaris ».
Les soldats français ont établi des points de contrôle ou sont déployés du rond-point des Martyrs jusqu'à l'aéroport de Bangui-M'Poko, qui est leur base militaire. Ils patrouillent dans les quartiers environnants, de chaque côté de la route.
Profitant du déploiement militaire français et du calme relatif régnant dans ce secteur très conflictuel de Bangui, la journée avait essentiellement été consacrée à récupérer les corps des victimes des violents affrontements de la veille dans les quartiers nord. La Croix-Rouge internationale a annoncé avoir recueilli 40 cadavres et 30 blessés. Une trentaine d'autres corps, apparemment mutilés, ont par ailleurs été découverts sur la colline des Panthères, un secteur militaire protégé situé près du camp de Roux.
Le procureur de Bangui, Ghislain Grésenguet, a ouvert une enquête. Interrogé par Radio France Internationale, il a déclaré qu'il s'agissait exclusivement d'hommes, dont certains étaient ligotés et portaient des traces de torture, et qui seraient décédés depuis trois à cinq jours. Leurs corps auraient été transportés là après leur mort, et jetés de part et d'autre de la route.[/b]