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Affaire Leonarda : Hollande va trancher sous la pression
Mis à jour le 18/10/2013 à 20:39 - Publié le 18/10/2013 à 20:02
François Hollande au Palais d'Iéna, vendredi.
Le rapport d'enquête sur l'expulsion de la Kosovare sera dévoilé samedi. Pour le chef de l'État, la décision est délicate.
L'heure de la décision a sonné. Manuel Valls lira les conclusions de l'enquête sur l'expulsion de Leonarda dès son arrivée à Paris. Le gouvernement a promis qu'il communiquerait dans la foulée - sans doute samedi, pour ne pas laisser s'envenimer encore la situation - sur les suites qu'il souhaite donner à l'affaire. Sommé de s'exprimer, François Hollande restera en retrait. «Quelles que soient les pressions, il ne rentrera pas dans cette logique, prévient un conseiller élyséen. Il faut garder la tête froide.» Vraisemblablement, Valls lui-même devrait faire les annonces, même si son entourage ne confirme pas. Quoi qu'il en soit, le gouvernement devra trancher au moins deux questions: la famille kosovare sera-t-elle autorisée à rentrer en France et quelles conclusions tirer d'une interpellation dans le cadre d'une activité scolaire?
Un casse-tête. Car, quels que soient les résultats de l'enquête, ne se présentent au gouvernement que de mauvaises solutions. «Si elle revient, c'est la défaite de l'État de droit. Si elle ne revient pas, la gauche sera à feu et à sang», résume un député socialiste. «On est bloqués, soupire un dirigeant PS. Si on la fait revenir, la droite va nous accuser de laxisme, et le FN en rajoutera. Si on ne la fait pas revenir, c'est une partie de la gauche qui va dire: “C'est la honte! Ne comptez pas sur nos voix pour les prochaines élections”».
S'il y a eu «faute», elle sera réparée
Depuis quelques jours, Ayrault a semblé préparer les esprits à un possible retour en France de Leonarda. En assurant mercredi à l'Assemblée que s'il y avait eu «faute», elle serait réparée, le premier ministre a en tout cas entrouvert une porte. Dans la foulée, plusieurs membres du gouvernement et de la majorité ont embrayé sur le même thème. Certains, à l'instar de la candidate PS à Paris, Anne Hidalgo, demandant même «solennellement le retour» de la collégienne «au nom des valeurs de la République».
Mais à l'Élysée, l'on se montre plus prudent. «Il n'est pas acquis du tout que Leonarda revienne, prévient un conseiller. La loi doit être respectée. Nous ne sommes pas dans le cas de figure d'une famille réfugiée politique. Le Kosovo est un pays libre.» Même prudence dans l'entourage de Valls, où l'on appelle à ne pas se placer «sous la dictature de l'émotion», qui «ne peut pas être la seule boussole d'une politique», note un conseiller.
- Citation :
- «Il ne faut pas mépriser cette mobilisation et en même temps ne pas céder à la pression sur un sujet sensible.»
Au sommet de l'État, où l'on pèse le pour et le contre, les conséquences d'un retour en France de la famille sans-papiers sont mesurées. En pleine poussée du FN, à quelques mois des municipales, cela reviendrait à rouvrir le débat sur la politique d'immigration ; ce que l'Élysée ne veut pas. Faire revenir Leonarda serait en outre une forme de désaveu du ministre de l'Intérieur. Or, non seulement Valls représente la dernière bouffée de popularité pour Hollande mais il lui évite le traditionnel procès en laxisme que la droite intente à la gauche sur le thème de la sécurité. «Faire revenir la famille, c'est donner une image de faiblesse, c'est suicidaire», note un haut fonctionnaire.
Reste que Hollande, élu sur la promesse de «redonner confiance dans l'avenir (…) d'abord pour notre jeunesse», est sommé de donner des gages à ladite jeunesse qui, aiguillonnée par des associations de gauche, est descendue dans la rue, pourfendant sa politique. «Il ne faut pas mépriser cette mobilisation et en même temps ne pas céder à la pression sur un sujet sensible», fait-on valoir au gouvernement, où l'on mise sur les vacances scolaires pour faire retomber la pression.
Une action en deux temps?
Dans la majorité, certains croient que le gouvernement agira en deux temps. Par un volet fermeté, qui consisterait à rappeler tous les manquements au droit des étrangers du père de Leonarda, pour justifier l'expulsion de la famille. Lequel serait suivi d'un volet humanité, via des annonces visant à sanctuariser le «temps scolaire», au cours duquel un collégien sans papiers ne pourrait être expulsé.
«Sur le fond, ils tiendront bon», pronostique un député PS, qui note que l'indignation du premier jour est en train de laisser la place à l'agacement devant les révélations sur le parcours trouble du père de Leonarda. À moins que François Hollande trouve une voie médiane. «Connaissant l'homme, il y a une chance», sourit un conseiller ministériel.