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Affaire Leonarda : critiqué à gauche, Valls lance une enquête administrative
Publié le 16.10.2013, 08h03 | Mise à jour : 11h42Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a lancé une enquête administrative sur les conditions de l'expulsion de Léonarda, une collégienne kosovare de 15 ans lors d'une sortie scolaire dans le Doubs.
L'expulsion de Leonarda, collégienne kosovare âgée de 15 ans, lors d'une sortie scolaire dans le Doubs, n'en finit pas de faire des vagues dans la majorité. Alors que de nombreuses voix s'élèvent à gauche pour dénoncer les conditions de cette expulsion, Matignon fait savoir que Manuel Valls a lancé une «enquête administrative».
Jean-Marc Ayrault «s'est entretenu dès ce matin avec le ministre de l'Intérieur sur les conditions d'éloignement de la famille de ressortissants kosovars reconduite à la frontière le 9 octobre dernier par le préfet du Doubs», ont précisé mercredi les services du Premier ministre.
Interpellé mardi soir par le Parti socialiste qui s'est dit «choqué», Manuel Valls a réaffirmé mercredi sa fermeté dans cette affaire. «Je comprends toutes les émotions» suscitées par cette action, mais «cette reconduite à la frontière s'est déroulée dans le respect du droit, dans le respect des personnes», a déclaré le locataire de la place Beauvau en marge d'un déplacement à Lorient. «Que chacun garde son sang-froid», a-t-il lancé, recommandant d'attendre le rapport de l'inspection générale de l'administration qui doit se pencher sur le sujet.
L'affaire suscite l'émoi dans la majorité
Presque concomitamment, un tweet de Claude Bartolone est venu ajouter à la cacophonie. «Il y a la loi. Mais il y a aussi des valeurs avec lesquelles la Gauche ne saurait transiger. Sous peine de perdre son âme», écrit le président de l'Assemblée nationale.
- Citation :
- Claude Bartolone @claudebartolone
Il y a la loi. Mais il y a aussi des valeurs avec lesquelles la Gauche ne saurait transiger. Sous peine de perdre son âme. #Léonarda
10:29 AM - 16 Oct 2013
«Je demande qu'on sanctuarise l'école», a déclaré pour sa part le ministre de l'Education Vincent Peillon à la sortie du conseil des ministres.
Deux responsables du PS ont également tweeté pour exprimer leur fort mécontentement, l'un d'entre eux se montrant particulièrement incisif à l'encontre du ministre de l'Intérieur, prônant même sa démission du gouvernement. «Manuel Valls qui justifie l'expulsion de #Leonarda ! Quand est-ce qu'on prend une mesure d'éloignement du gouvernement à l'encontre de Valls?», a lancé Frédéric Hocquard, secrétaire national du PS à la Culture, en réagissant à la reconduite à la frontière de la jeune fille de 15 ans. «Perso, je ne me vois pas rester à la direction du PS si rien n'est fait pour #Léonarda j'en tirerai les conséquences», a appuyé dans un autre tweet Stéphane Delpeyrat, le secrétaire national du PS à la Recherche, évoquant «la goutte d'eau» qui fait déborder le «vase».
Le Roux et Placé ciblent le préfet du Doubs
Plus tôt ce mercredi, le patron des députés PS Bruno Le Roux et celui des sénateurs EELV Jean-Vincent Placé s'en sont pris non pas à Manuel Valls, mais au préfet du Doubs, l'accusant de ne pas avoir pris la bonne décision. Sur le plateau d' i>TELE, Bruno Le Roux a estimé que l'adolescente n'aurait pas dû être reconduite à la frontière, du fait de son profil. «Cette famille semblait en voie d’intégration, sédentarisée, scolarisée, et on me dit même à quelques semaines seulement d’un possible dépôt de régularisation», a-t-il détaillé, se demandant «s’il y avait là dans le cas précis une nécessité».
Et le chef de file du PS à l'Assemblée de mettre en cause, non pas le ministre de l'Intérieur, mais le préfet du Doubs Stéphane Fratacci. «Il y a dans cette procédure une faculté de discernement offerte au préfet», a-t-il souligné, avant d'en appeler à Manuel Valls : «Je demande au ministre de l’Intérieur de rappeler aux préfets qu’ils ont une faculté de discernement et qu’elle aurait, là, dû être utilisée», a-t-il déclaré. «Il ne faut pas aller chercher les enfants à l'école», a insisté le proche du chef de l'Etat. Là «c'était le temps scolaire. On peut attendre, on peut différer».
«Je demande que le préfet soit sanctionné», a renchéri Jean-Vincent Placé sur RMC.
- Citation :
- Jean-Vincent Placé ✔ @JVPlace
Étais sur @RMCinfo avec @JJBourdin_RMC. Ai demandé solennellement des sanctions pour le préfet pour cette expulsion inhumaine
8:08 AM - 16 Oct 2013
La préfecture assure que «les choses se sont déroulées sans incident»
Mardi, le porte-parole du Parti socialiste David Assouline avait demandé que soient établies «les circonstances et les responsabilités qui ont amené la préfecture à prendre une telle décision». «Faire descendre d'un bus par les forces de l'ordre une élève devant l'ensemble de ses camarades de classe est insupportable et inacceptable», avait-il estimé.
Il ne s'agissait pas «de l'arrestation d'une jeune fille dans sa classe», avait répondu le secrétaire général de la préfecture du Doubs, Joël Mathurin. Selon lui, «les choses se sont déroulées sans coercition et sans incident». «C'est un éloignement triste, mais tous les recours légaux avaient été utilisés», avait encore assuré Joël Mathurin.
Les parents et les cinq frères et soeurs de Leonarda aussi expulsés
Elève de 3e au collège de Pontarlier (Doubs), Leonarda vivait à Levier avec sa famille ? qui faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire après avoir été déboutée de ses demandes d'asile. Le 9 octobre, la police aux frontières du Doubs et la gendarmerie se sont rendues au domicile de la mère et des six enfants pour assurer leur retour au Kosovo, où le père de famille avait été expulsé la veille. Elles ont alors constaté que Leonarda, qui participait à une sortie avec sa classe, était absente.
«Un membre du comité de soutien de la famille a, en présence de la mère, appelé cette jeune fille sur son téléphone portable. Il a été convenu entre la famille, le représentant de son comité de soutien, l'enseignante en charge de la sortie scolaire et les forces de l'ordre de laisser la jeune fille sortir du bus afin de lui permettre de rejoindre sa famille dans le cadre de l'exécution de la mesure d'éloignement», a précisé mardi soir dans un communiqué le ministre de l'Intérieur, après que le PS eut jugé «choquantes» les conditions de cette expulsion.
VIDEO. Collégienne kosovare expulsée : «On n'est pas venu "cueillir" cet enfant», affirme l'Intérieur Selon le Réseau éducation sans frontières RESF, qui cite le témoignage de l'enseignante, la jeune fille est descendue du bus sur le parking d'un autre établissement, le collège Lucie-Aubrac de Doubs, où les forces de l'ordre l'ont prise en charge hors de vue de ses camarades. Dans cet article mis en ligne par RESF sur Mediapart, les professeurs du collège où était scolarisée Leonarda se disent «profondément choqués par les méthodes utilisées pour renvoyer des enfants issus de la minorité rom vers des pays qu'ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue».