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Constat sans appel sur la toxicité du bisphénol A
Publié le 09/04/2013
Le bisphénol A est utilisé dans les revêtements intérieurs des boîtes de conserve.
L'Agence nationale de sécurité sanitaire a mis en évidence des risques potentiels pour la santé, des femmes enceintes et de leur fœtus notamment. Elle confirme la nécessité d'en réduire l'exposition.
Trois ans de travail et un constat très ferme: le bisphénol A représente un risque potentiel pour la santé des enfants à naître et c'est l'alimentation qui «contribue à plus de 80 % à l'exposition de la population». L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a publié mardi les conclusions d'un très long travail d'expertise qui porte à la fois sur le bisphénol A (BPA) et sur ses alternatives, dont certaines sont déjà utilisées par des industriels, notamment les autres bisphénols.
La nouveauté c'est que pour la première fois, l'agence a pu établir «un niveau toxicologique au-delà duquel le risque est associé», soit le niveau d'exposition au BPA à partir duquel on considère qu'il existe un risque pour l'être humain, explique Dominique Gombert, directeur de l'évaluation des risques à l'agence.Chez le fœtus, le BPA pourrait ainsi modifier la structure de la glande mammaire. Fragilisé par cette imprégnation in utero, l'adolescent serait plus vulnérable aux expositions aux produits cancérigènes.
La fiabilité de ce travail d'expertise a été qualifiée de modérée sur une échelle de confiance comportant trois niveaux (limité, modéré ou élevé). En effet, «si les effets du bisphénol A sont avérés sur l'animal, il est soupçonné pour l'homme», rappelle Marc Mortureux, le directeur de l'Anses. Il est très difficile d'obtenir une preuve scientifique sur l'homme, notamment sur l'effet à long terme des faibles doses.
Le bisphénol A est une substance chimique de synthèse utilisée depuis plus de cinquante ans, qui a deux applications principales: la fabrication de matières plastiques de type polycarbonate qui est un plastique dur, et certaines résines époxydes qui sont notamment utilisées dans les revêtements des boîtes de conserves.
L'alimentation en première ligneL'autre éclairage important de l'Anses porte sur la très grande responsabilité de l'alimentation quant à l'exposition des personnes en général, et de la femme enceinte en particulier. Et dans ce cadre «les produits conditionnés dans les boîtes de conserve représentent environ 50 % de l'exposition alimentaire totale», précise l'Anses, dont 35 à 45 % pour les légumes et 10 à 15 % pour les plats cuisinés. L'exposition au bisphénol A peut également provenir d'aliments d'origine animale (autour de 17 % pour les viandes, abats, charcuterie…) - une contamination qui a lieu après abattage, insiste l'Anses. Enfin, «il y a une contamination ubiquitaire», autrement dit des sources très diverses dont l'air, qui représentent malgré tout 25 à 30 % de l'exposition totale.
Au-delà des boîtes de conserve, l'Anses met également en avant les risques liés à «l'eau conditionnée dans des bonbonnes en polycarbonate». Ces contenants en plastique durs sont utilisés un peu partout dans les entreprises, les salles d'attente et certains lieux publics. La consommation de cette eau «peut contribuer à une augmentation conséquente de l'exposition interne au BPA et pourrait ainsi, ajoutée aux autres expositions, entraîner un risque “additionnel” pour l'enfant à naître de la femme exposée», estime l'agence.
Enfin l'Anses a passé en revue les risques liés aux tickets de caisse ou de cartes de crédit dont un très grand nombre contiennent du bisphénol A - ou du bisphénol S, ce qui n'est pas mieux - qui peuvent pénétrer dans le corps par voie cutanée. «La manipulation de ces tickets thermiques conduit à des situations à risque pour quatre types d'effets considérés: glande mammaire, cerveau et comportement, appareil reproducteur féminin, métabolisme et obésité». Là encore, les femmes enceintes qui manipuleraient ces tickets (les caissières notamment) sont les plus concernées. Pour autant, les experts donnent un indice de confiance «limité» à ce point précis de leur travail. Ils estiment en effet nécessaire de disposer d'autres études sur le sujet.