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Goodyear : l'impasse après cinq ans de blocage de la CGT
Mis à jour le 01/02/2013 à 08:01 | publié le 01/02/2013 à 07:49
L'usine Goodyear d'Amiens-Nord.
La CGT freine des quatre fers à chaque négociation à Amiens-Nord. Résultat, aucun accord n'est trouvé, tandis que l'usine voisine d'Amiens-Sud a embauché après avoir accepté des réorganisations.Alors que le sort de l'usine Good­year d'Amiens semble scellé, syndicats et direction se renvoient la faute. Les premiers évoquent un chantage à l'emploi, la deuxième fustige des blocages. Tout commence à l'automne 2007. La direction de Goodyear-Dunlop décide de mettre en place une nouvelle organisation du travail, passant de cinq à quatre équipes. Ce changement conditionne un investissement de 52 millions d'euros dans les usines d'Amiens-Nord (Goodyear) et d'Amiens-Sud (Dunlop), en fait distantes de 200 mètres. La CGT s'y oppose. En septembre, elle bloque la tenue d'un premier référendum organisé par la direction, avant de s'associer à l'organisation d'un second scrutin un mois plus tard. Les salariés répondent par un «non» massif. La direction menace de supprimer 402 emplois.
Premier coup de théâtre début 2008, les 1300 salariés d'Amiens- Sud acceptent, eux, la réorganisation. Côté Nord, la CFTC et la CFE-CGC, minoritaires, organisent une nouvelle consultation des employés, qui cette fois se prononcent en faveur de la réorganisation. Un accord est signé. «Si la CGT dénonce l'accord, 402 lettres de licenciement partiront début décembre», avait déclaré Olivier Rousseau, le PDG de Goodyear-Dunlop France, au
Figaro . La CGT, syndicat majoritaire, passe outre et dénonce l'accord. De procédures en appels, le syndicat retarde les licenciements.
Début 2009, la direction retire le plan social portant sur 402 emplois, pour en présenter un nouveau, menaçant cette fois les 820 postes de la division «pneus tourisme» d'Amiens-Nord. Au PS, on parle alors de «règlement de comptes pour faire payer aux salariés leur opposition». La direction du groupe évoque le contexte économique. La crise de 2008 est passée par là, avec notamment une première chute de la production automobile en Europe. La ligne de fabrication de pneus agricoles n'est pas affectée. L'usine d'Amiens-Sud est, elle, transformée en société autonome en avril 2009. La production s'y porte bien, centrée sur le haut de gamme, elle bénéficie de 27 millions d'euros d'investissement. C'est le «Grand Fossé», des voix s'élèvent à Amiens-Sud pour dénoncer l'attitude de la CGT «du Nord».
Le «non» jusqu'au boutDe son côté, la direction de Good­year évoque la fermeture du site et la cession de l'activité pneus agricoles. La situation est d'autant plus tendue en Picardie que l'usine de Continental à Compiègne va elle aussi fermer ses portes.
En septembre 2009, un repreneur potentiel se fait connaître: l'américain Titan se dit intéressé par l'activité pneus agricoles de Goodyear au niveau mondial. À Amiens, il sauverait 550 emplois. La production de pneus tourisme est condamnée. La direction de Goodyear évoque «un coût de production à Amiens-Nord 25% plus élevé que dans ses usines allemandes». Les négociations débutent néanmoins avec Titan, dans un ­climat qui semble apaisé. Fin 2010, la cession de l'usine à Titan est ­officiellement annoncée, pour 130 millions de dollars: 550 emplois sur 1350 sont sauvés. Les 820 licenciements prévus sont transformés en départs volontaires.
L'accalmie aura été de courte durée. Les relations se tendent à nouveau, la CGT freine des quatre fers à chaque négociation. Aucun accord n'est trouvé. Titan, qui avait soumis le rachat à la mise en place des suppressions de postes, menace de jeter l'éponge dès décembre 2011. Son président américain accuse directement les syndicats français. Le coup est d'autant plus rude pour le «Nord» qu'un mois plus tôt le «Sud» a embauché 100 personnes. Finalement, les tractations avec Titan se poursuivent jusqu'à septembre 2012. La direction de Goodyear annonce alors qu'elle renonce au plan de départs volontaires, faute d'un accord. Une fois encore, l'attitude de la CGT est mise en cause. Ce blocage «menace la reprise du site par Titan». Quelques mois plus tard, ce 31 janvier 2013, le couperet ­tombe. L'usine sera fermée, ­totalement.