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En Égypte, les islamistes crient déjà victoire
Mis à jour le 17/12/2012 à 07:30 | publié le 16/12/2012 à 20:04
Des scrutateurs comptent les bulletins, samedi dans un bureau de vote du Caire, après le référendum sur la nouvelle Constitution.
Le projet de Constitution aurait été approuvé dans la première moitié du pays, consultée samedi.Dix gouvernorats, dont Le Caire et Alexandrie, ont voté ce week-end sur la future Constitution égyptienne, soit environ la moitié des 26 millions d'électeurs appelés aux urnes. La seconde partie du vote se déroulera le samedi 22 décembre dans les ­dix-sept gouvernorats restants. Les résultats officiels ne seront proclamés qu'après cette date. Ce qui n'a pas empêché les Frères musulmans de crier victoire. «Les Égyptiens ont parlé», a déclaré le Parti de la liberté et de la justice, la branche politique de l'organisation islamiste. «Ils se sont librement exprimés dans cette première tranche du référendum et ont montré leur maturité. C'est un processus entièrement démocratique.»
D'après les estimations du parti, 56,5 % des électeurs auraient approuvé le projet de loi fondamentale. Malgré de longues files d'attente devant les bureaux de vote, le taux de participation n'aurait pas dépassé le tiers des électeurs inscrits. Ce chiffre est légèrement inférieur à la participation au référendum constitutionnel qui s'était tenu l'an dernier.
Les campagnes ont voté en majorité pour la Constitution, alors que le non l'emportait au Caire. Cette division entre le vote urbain et rural est néanmoins tempérée par le vote d'Alexandrie, où le oui a obtenu la majorité. La grande ville côtière est considérée comme un bastion électoral des islamistes, et les salafistes, alliés des Frères musulmans, y ont une influence importante. La deuxième tranche du vote se déroulera dans des gouvernorats ruraux et, selon les observateurs, elle devrait confirmer le résultat de ce week-end.
Test de popularitéLe scrutin s'est déroulé dans le calme, contrastant avec les trois dernières semaines, où des manifestations parfois violentes ont opposé partisans et adversaires d'un projet constitutionnel contesté. Les violences ont fait une dizaine de morts, plusieurs bureaux des Frères musulmans ont été saccagés et le palais présidentiel a dû être défendu par l'armée contre les manifestants. Le référendum constitutionnel s'est ainsi transformé en un test de popularité pour le président Mohammed Morsi, au pouvoir depuis six mois.
Les Frères musulmans avaient dominé le processus de rédaction de la Constitution après la démission d'une partie des délégués chrétiens libéraux de l'Assemblée constituante. Les islamistes ont fait campagne en faveur du «oui», mettant en garde contre le retour de l'ancien régime et une nouvelle période d'instabilité si le «non» l'emportait. Ils ont aussi dénoncé leurs adversaires comme étant un rassemblement dominé par les chrétiens et les «felloul», terme péjoratif désignant les bénéficiaires du régime d'Hosni Moubarak.
L'opposition, rassemblée dans un Front de salut national, a dénoncé le projet constitutionnel pour ses nombreuses ambiguïtés, qui permettraient à un pouvoir religieux de s'imposer, et pour son absence de garanties des libertés. Après avoir envisagé de boycotter le scrutin, elle s'est tardivement décidée à faire campagne contre la Constitution.
IrrégularitésLe Front de salut national a réagi aux premières estimations en dénonçant de nombreuses irrégularités, et fait savoir qu'il ne reconnaissait pas les résultats provisoires annoncés par les Frères musulmans. Plusieurs ONG égyptiennes ont rapporté des incidents au cours desquels des observateurs n'auraient pas été autorisés à entrer dans les bureaux de vote et des cas où aucune supervision judiciaire n'était présente. Certaines ONG ont même demandé l'annulation du référendum et un nouveau vote.
Le taux de participation relativement faible et le succès relatif du «oui», loin du raz-de-marée prévu par les islamistes, peuvent cependant rendre espoir à l'opposition. De nouvelles élections législatives sont prévues au début de l'année prochaine et pourraient déboucher sur une érosion de la représentation parlementaire des Frères musulmans.