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Grèce : 4,2 milliards d'euros versés jeudi, un autre milliard en attente
La Grèce recevra jeudi un versement de 4,2 milliards d'euros de ses créanciers publics, en dépit de l'incertitude politique qui pèse sur le pays. Le versement des prochaines tranches d'aide est en question, les engagements de rigueur d'Athènes ayant été massivement rejetés dimanche lors des législatives.
Publié le 09.05.2012, 15h57 | Mise à jour : 22h30
Toujours en quête d'un gouvernement, la Grèce s'affirme disposée à remettre en cause ses engagements à appliquer une politique de rigueur, massivement rejetés par l'électorat dimanche, un revirement qui affole les marchés et repose la question de son maintien dans l'euro.
Athènes recevra jeudi 4,2 milliards d'euros sur les 5,2 que ses créanciers devaient lui verser à cette date. «La Grèce n'a pas besoin du milliard restant avant juin et (cette somme) sera versée en fonction des besoins de financement» du pays, indique un communiqué du Fonds de secours de la zone euro. Le FESF précise que les 4,2 milliards versés jeudi «iront sur un compte spécialement réservé au paiement du service de la dette». Quant au versement du milliard restant, les responsables de la zone euro, réunis mercredi soir, laisseront l'Eurogroupe en décider lundi. Une réunion des ministres des Finances européens est en effet prévue de longue date à Bruxelles.
La Commission européenne avait dans un premier temps confirmé que les 5,2 milliards d'euros seraient versés jeudi, en dépit de l'incertitude politique qui pèse sur le pays et qui inquiète tous les responsables européens. Mais les incertitudes liées notamment à la composition d'un gouvernement ont poussé certains pays - surnommés "les triple A" en référence à la notation la plus élevée attribuée à leur dette - à demander des assurances.
Pas de gouvernement, pas d'aide financière
Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a averti mercredi qu'aucun argent ne serait versé sans formation d'un gouvernement. « Nous devons dire à présent au peuple grec que la situation est sérieuse, qu'aucun pays de l'Union européenne ne pourra débloquer ne serait-ce qu'une parcelle de ces 130 milliards d'euros que nous avons mis à la disposition des Grecs s'il n'y a pas de gouvernement en état de fonctionner, qui respecte les règles établies et gère l'argent qui est versé », a-t-il déclaré lors d'un colloque à Bruxelles.
Un avertissement repris par d'autres dirigeants européens. «Si la Grèce veut rester, il n'y a pas de meilleure voie que celle que nous avons adoptée, on ne peut pas avoir l'un (le sauvetage financier) sans l'autre (les économies et les réformes)», a ainsi affirmé le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, lors d'un colloque à Bruxelles. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a lui aussi estimé qu'Athènes ne recevrait plus d'argent sans respect des engagements vis-à-vis de ses créanciers.
Tsipras veut rencontrer HollandeEn Grèce, les élections législatives de dimanche ont complètement rebattu les cartes, consacrant des forces politiques hostiles aux engagements de la Grèce envers l'UE et le FMI. Alexis Tsipras, dirigeant d'une coalition de gauche radicale (Syriza), propulsée deuxième force politique du pays à l'issue des législatives de dimanche, a envoyé aux créanciers publics -- FMI, Commission européenne, BCE - une lettre expliquant que le verdict populaire rend caducs les engagements du pays envers ses créanciers.
Pourfendeur de l'austérité dans son pays, Tsipras a d'ailleurs demandé à rencontrer François Hollande jeudi ou vendredi prochain, lors d'une visite à Paris. Dans la soirée, il annoncé qu'il renoncait à former un gouvernement de coalition. «Nous ne pouvons pas réaliser notre rêve d'un gouvernement de gauche (...), on n'a pas la majorité. Demain (jeudi) je vais rendre le mandat confié par le président de la République et nous allons continuer de participer aux procédures prévues par la constitution», a-t-il déclaré devant son groupe parlementaire, après avoir rencontré tous les chefs de parti grecs.
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Pourquoi la Grèce n'a toujours pas de gouvernement ?Comme le stipule la Constitution grecque, le chef de l'Etat Carolos Papoulias confie tour à tour depuis dimanche aux leaders des partis arrivés en tête la tâche de former un gouvernement, ce qui s'est avéré jusque là vain. Lundi soir, Antonis Samaras (Nouvelle Démocratie, parti conservateur pro-austérité arrivé en tête malgré un faible score), a en effet jeté l'éponge. Ce mercredi, c'est Alexis Tsipras (Syrisa, parti de gauche radicale anti-austérité arrivé second ) qui a abandonné après avoir échoué à réunir derrière lui d'autres petits partis de gauche. « Nous ne pouvons pas réaliser notre rêve d'un gouvernement de gauche (...), on n'a pas la majorité. » a-t-il regretté mercredi soir. Le tour revient donc désormais à Evangélos Vénizélos (Pasok, parti socialiste pro-austérité, arrivé troisième), qui doit recevoir jeudi le mandat du chef de l'Etat pour tenter lui aussi cette tâche, qui parait impossible vu les divergences entre les partis.
Au cœur de ces désaccords qui empêchent la formation d'une coalition, la renégociation des engagements de la Grèce envers ses créanciers, qui lui imposent des mesures d'austérités. Pasok et ND, garants jusque là de la rigueur, ont pris acte de leur déroute et annoncé qu'ils étaient d'accord pour renégocier les engagements, mais ils insistent sur l'impératif de maintien du pays dans la zone euro. La Gauche radicale de Syrisa va beaucoup plus loin et son leader estime que les accords passés avec l'UE sont désormais caducs. Si le leader du Pasok ne parvient pas à former un gouvernement, la Constitution prévoit une ultime réunion solennelle de tous les partis chez le chef de l'Etat pour trouver un accord à l'arraché. Sans quoi la Grèce se dirigera vers de nouvelles élections.
Les marchés accusent le coupLes marchés continuaient logiquement d'accuser le coup mercredi, après avoir cédé la veille à l'affolement. La bourse de Paris perdait 0,57% en mi-journée, celle de Madrid cédait plus de 3%. A Athènes, elle repart à la hausse à 0,13%. La Banque centrale européenne (BCE) affiche pour l'instant la plus grande fermeté face à cette nouvelle donne: « il doit être clair pour la Grèce qu'il n'y a pas d'alternative au programme d'assainissement convenu si elle veut rester membre de la zone euro », a déclaré Jörg Asmussen, membre du directoire au quotidien Handelsblatt.
Berlin réclame le respect des engagementsA Paris, le ministre sortant des Affaires étrangères, Alain Juppé, a jugé mercredi la situation en Grèce « extrêmement préoccupante », ajoutant que les mises en cause des traités qui ont été si difficilement négociés (...) risquent de provoquer des turbulences difficilement contrôlables. Berlin a de son côté exclu toute renégociation des accords conclus. «Si la Grèce veut rester, il n'y a pas de meilleure voie que celle que nous avons adoptée, on ne peut pas avoir l'un (le sauvetage financier) sans l'autre» (les économies et les réformes), a affirmé le ministre allemand des Finances , Wolfgang Schäuble, mercredi. Angela Merkel a de son côté haussé le le ton lors d'une conférence de presse : « Chacun doit s'en tenir à ce que nous avons décidé. Vingt-cinq pays ont signé le pacte budgétaire », a-t-elle déclaré. Un message adressé à la Grèce bien évidemment mais aussi à la France, qui vient d'élire un candidat anti-austérité à l'Elysée.