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Les facteurs de risques comme le tabac, le mauvais cholestérol, l'obésité, le diabète, l'hypertension ou encore la sédentarité demeurent les principaux ennemis du cœur.
L'infarctus peut être d'origine génétique chez l'homme
Publié le 11/03/2012
Une étude publiée dans The Lancet évoque une variation génétique qui serait responsable de cette fragilité des artères. Les autres facteurs de risque ne sont pas pour autant à négliger.
«Quasiment tous les jours, nous avons un malade qui fait un infarctus du myocarde alors qu'il ne fume pas, n'est ni hypertendu ni diabétique… Bref, il n'a aucun facteur de risque connu. Dans ce cas, la seule explication est l'hérédité», raconte le professeur Michel Galinier, cardiologue au CHU de Toulouse. Neuf fois sur dix, le malade interrogé racontera que, dans sa famille, les hommes sont fragiles du cœur. Cette prédisposition héréditaire à la maladie coronaire est bien connue des cardiologues, mais le gène responsable n'avait pas été découvert.
C'est aujourd'hui chose faite. Ou presque. Une équipe internationale de chercheurs pourrait avoir découvert la variation génétique responsable de cette fragilité des artères transmise de père en fils. Elle serait liée à un haplotype présent sur le chromosome Y, selon une étude publiée dans The Lancet le 9 février dernier. L'haplotype est un groupe d'allèles de différents gènes situés sur un même chromosome et habituellement transmis ensemble. Partant du constat que les hommes sont plus souvent touchés que les femmes par la maladie coronarienne, les chercheurs ont exploré le rôle du chromosome Y dans cette pathologie. En étudiant le chromosome Y de 3233 hommes anglais, ils ont identifié deux haplotypes dont l'un augmenterait de moitié le risque de maladie cardiaque, indépendamment des facteurs de risques connus comme le cholestérol, le tabac, le diabète ou l'hypertension.
Les femmes ont un infarctus dix ans plus tard que les hommesCette découverte pourrait donc expliquer pourquoi certains hommes fument, se moquent de leur cholestérol et vivront sans problème cardiaque alors que d'autres, plus tempérants, sans facteurs de risques connus, se voient frapper par l'infarctus. Elle pourrait même selon certains cardiologues expliquer pourquoi les femmes sont moins fragiles du cœur que les hommes. Ou du moins, pourquoi elles ont un infarctus dix ans plus tard que les hommes. «Longtemps nous avons cru qu'elles étaient protégées par les œstrogènes, mais certaines études ont montré que ce n'était pas le cas, constate le professeur Gabriel Steg, cardiologue à l'hôpital Bichat (Paris). Globalement elles font moins d'infarctus que les hommes»
Est-ce que cela signifie que les femmes sont à l'abri de facteurs héréditaires dans la maladie cardiaque? Le professeur Nicolas Danchin, cardiologue à l'hôpital européen Georges-Pompidou (Paris) reste prudent: «Il ne faut pas penser que la prédisposition génétique ne concerne que les hommes. Si dans votre famille vous avez un parent ayant fait un accident cardiaque avant 55 ans pour un homme et 65 ans pour une femme, vous êtes à risque.»
Amplificateurs des facteurs de risquesEt pour les hommes, l'absence de gènes de prédisposition à la maladie coronaire ne signifie pas pour autant que le cœur ne craint rien. Les facteurs de risques connus comme le tabac, le mauvais cholestérol, l'obésité, le diabète, l'hypertension ou encore la sédentarité demeurent les principaux ennemis du cœur. Le taux de lipides dans le sang et le tabagisme provoquent, à eux seuls, deux tiers des infarctus du myocarde dans le monde. Pour les cardiologues il n'est pas l'heure de baisser de la garde face à ces dangers.
«Ces haplotypes agiraient en fait comme des amplificateurs des facteurs de risque», suggère le professeur Galinier. C'est pourquoi, il s'agirait plutôt d'alerter et de surveiller les hommes porteurs de ces gènes. «Nous ne devrions pas être laxistes avec les hommes protégés mais au contraire être plus exigeants avec ceux prédisposés aux maladies coronaires, explique le professeur Jean-Claude Deharo cardiologue à l'hôpital de la Timone (Marseille). Avant même la survenue de tout accident cardiaque, nous pourrions envisager de faire baisser le taux de cholestérol chez ces hommes à des niveaux habituellement exigés après un infarctus.»
Pour aboutir à cette différenciation de prise en charge en fonction de son profil génétique, il faudrait pouvoir développer des tests génétiques. Nous en sommes encore loin. Les auteurs de l'étude doivent encore déterminer avec précision le ou les gènes responsables. Ils ont en revanche déjà une sérieuse hypothèse sur le mode d'action de ces gènes. Ils agiraient en modifiant le système immunitaire de l'homme et en activant l'inflammation, connue pour agir sur la paroi de l'artère en la dégradant et favoriser l'athérosclérose. «Cette étude ouvre des perspectives qui, si elles se confirment, pourraient déboucher sur de nouvelles pistes thérapeutiques, dont nous avons bien besoin», se réjouit le Pr Steg.