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Emplois industriels : les succès mitigés du gouvernement
Mis à jour le 24/02/2012 à 17:01 | publié le 24/02/2012 à 15:25 Nicolas sarkozy en visite au site Petroplus de Petit-Couronne, ce vendredi.
De Gandrange à Petroplus, l'État met un point d'honneur à se porter au secours des emplois industriels menacés. Les résultats sont nuancés.De l'intervention de Nicolas Sarkozy pour sauver Alstom à l'été 2004, à ses récentes déclarations en faveur des salariés du site ArcelorMittal de Florange, le chef de l'Etat s'est fait fort de se poser en contradicteur de la célèbre déclaration de Lionel Jospin: «L'Etat ne peut pas tout». Du moins quand il s'agit de l'emploi industriel. «Il faut à tout prix garrotter la perte du sang industriel de la France», répétait-il encore au mois de janvier. Depuis 2007, le gouvernement est intervenu fréquemment, dans plusieurs conflits sociaux, le plus souvent médiatisés, afin de sauvegarder les emplois. A quelques semaines de l'élection présidentielle, les salariés n'hésitent pas non plus à se servir de la campagne pour faire entendre leurs revendications. Aperçu de quelques promesses gouvernementales… et de leur devenir.
Les succès: • Photowatt. La reprise du pionnier français du photovoltaïque par EDF ne fait plus guère de doute. Lundi prochain, le tribunal de commerce de la Vienne devrait attribuer les actifs de Photowatt à l'entreprise publique appelée à la rescousse par le chef de l'Etat à la fin du mois de janvier. Auparavant, STMicroelectronics, spécialiste des microprocesseurs, avait été approché. Sans succès. La prochaine reprise de la PME iséroise par EDF Energies nouvelles est une bonne nouvelle pour les salariés: la filiale de l'électricien s'est engagée à en reprendre 345 sur 430 et à reclasser dans un rayon de 60 kilomètres les 85 salariés restants. «Tout le monde aura un emploi, je ne vois pas ce que l'on pouvait demander de mieux», a réagi mardi un délégué syndical FO, tout en concédant que «le projet industriel reste à construire». Selon le député UMP de Bourgoin-Jallieu, Alain Moyne-Bressan, il faut d'ores et déjà «mettre 50 millions d'euros sur la table pour assurer les mois qui viennent».
• Lejaby. Mi- janvier 2012, le tribunal de commerce de Lyon choisissait Alain Prost, ancien dirigeant de Chantelle et La Perla, comme repreneur du fabricant de lingerie placé en redressement judiciaire. Seul hic: l'entrepreneur, qui ne garde que 195 salariés sur 450, souhaite délocaliser l'ensemble de la production en Tunisie. C'est signer l'arrêt de mort de l'usine Lejaby d'Yssingeaux, et le licenciement de ses 93 salariés. Une annonce du plus mauvais effet au moment où le candidat Nicolas Sarkozy - non encore déclaré - vante le «made in France». «Je ne laisserai pas tomber les gens de Lejaby», prévenait-il le 29 janvier dernier. C'est finalement le groupe de luxe LVMH, sollicité par l'Elysée, qui viendra au secours de l'usine auvergnate. L'offre de reprise, émanant d'un sous-traitant de Louis Vuitton, la société Sofama, est déposée le 1er février. Tout le personnel devrait être réembauché en CDI, et reconverti dans la maroquinerie de luxe.
Les échecs:• Gandrange. Le 4 février 2008, le chef de l'Etat redonne espoir aux 595 salariés de l'usine lorraine d'ArcelorMittal, alors menacée de fermeture partielle à brève échéance. «L'Etat préfère investir pour moderniser le site plutôt que de payer pour accompagner des gens, soit en préretraite, soit au chômage», expliquait-il alors. Et de poursuivre: «Je reviendrai moi-même annoncer la solution qu'on aura trouvé». Si, malgré ces promesses, les 595 emplois seront bel et bien supprimés au 31 mars 2009, la ville de Gandrange a cependant bénéficié de la part de l'Etat d'un investissement de 5 millions d'euros pour un centre d'apprentissage, ainsi que d'un contrat de 300 millions d'euros entre RFF et le sidérurgiste Corus. Objectif: produire les rails de RFF au sein de son usine d'Hayange, proche du site sinistré.
" Nicolas Sarkozy à Gandrange : • Continental. En mars 2009, le groupe allemand décide de fermer plusieurs de ses sites de production de pneus pour réduire ses coûts. Il est notamment prévu que l'usine de Clairoix dans l'Oise, qui emploie 1120 salariés, ferme à l'horizon 2010. Décision inacceptable pour les salariés, qui recourent aux méthodes les plus radicales: séquestration de patron, saccage de la préfecture de Compiègne… Ils deviendront l'emblème du durcissement des conflits sociaux. Répondant à «l'appel solennel» lancé par l'intersyndicale, Nicolas Sarkozy s'engage dès le mois d'avril à «sauver le site». Un possible repreneur est reçu à l'Elysée, le président ainsi que le gouvernement étant décidés à jouer le rôle de «facilitateur» entre le candidat à la reprise, MAG, et le Continental. Peine perdue. Les négociations achoppent en octobre sur le prix de l'opération et les transferts de technologie que MAG espérait obtenir. L'usine a fermé ses portes au début de l'année 2010.
• Total. Autre dossier brûlant: la fermeture de la raffinerie des Flandres, dont l'activité était à l'arrêt depuis septembre 2009, Total invoquant une baisse structurelle de la demande de carburant. Cette décision provoque une grève générale des employés des raffineries françaises, fin février 2010, qui fait planer la menace d'une pénurie de carburant, et mobilise la classe politique à quelques semaines des élections régionales. Le gouvernement intervient aussitôt, alors même qu'il ne détient aucune participation dans le groupe pétrolier. Convocation de Christophe de Margerie, directeur général de Total, à l'Elysée, ultimatum lancé par le ministre de l'Industrie Christian Estrosi («Que Total apporte un projet précis et daté d'implantation de nouvelles activités, ou que Total redémarre très rapidement sa raffinerie de Dunkerque»)… Si les salariés obtiennent le maintien des capacités de raffinerie pour les cinq ans à venir, le site des Flandres a bel et bien fermé le 8 mars dernier. Ses emplois ont été garantis par Total (une mesure annoncée dès avant le conflit), mais pas nécessairement sur le même site.
Les cas encore en suspens: • A
Florange, Nicolas Sarkozy n'a pas été jusqu'à réitérer la promesse formulée aux salariés de Gandrange. Mais il s'est engagé à «tout faire» pour que l'usine lorraine d'ArcelorMittal, dont les deux hauts-fourneaux sont à l'arrêt depuis deux mois, rouvre ses portes. «Bien sûr, il y a la crise et il y a moins de demande d'acier, […] mais je ne veux pas que Florange meure», a insisté Nicolas Sarkozy la semaine dernière. L'Etat aurait notamment investi un million d'euros au dernier trimestre 2011, pour financer le chômage partiel des salariés du site. Si la direction assure vouloir «maintenir ses activités en Lorraine», les salariés, sceptiques, craignent toujours une fermeture définitive. Dans un marché «extrêmement difficile», ArcelorMittal se plaint que le site de Florange soit moins performant que ceux de Fos ou de Dunkerque. Le groupe pourrait investir dans un projet de 600 millions d'euros pour doper sa compétitivité. «Nous attendons une décision de l'Europe sur sa participation financière», pour mi-2012.
• Petroplus. Le sort de la raffinerie de Petit-Couronne, au chevet de laquelle s'est rendu ce vendredi Nicolas Sarkozy, est loin d'être scellé. Placé en redressement judiciaire après le dépôt de bilan de sa maison-mère suisse Petroplus, le site est à l'arrêt depuis début janvier. Faute d'un accord avec les créanciers du groupe, l'usine normande, qui emploie 550 salariés, attend son salut d'un éventuel repreneur. L'État s'est très vite emparé du dossier. Mi-janvier, le ministre de l'Industrie, Eric Besson, a reçu l'ensemble des industriels du secteur. Un mois plus tard, les syndicats du site déploraient cependant le manque d'«avancées» significatives. Trois entreprises ont à ce jour manifesté leur intérêt pour tout ou partie du groupe Petroplus: le suisse Klesch, le fonds d'investissement Goldsmith et la société américaine Global Emerging Markets (GEM Group). Ils ont jusqu'au 15 mars pour déposer leurs offres. En attendant, la signature d'un contrat de six mois avec Shell, annoncé ce vendredi par Nicolas Sarkozy, permettra un redémarrage temporaire du site.