Le Monde.fr | 02.04.2014 à 11h34 • Mis à jour le 02.04.2014 à 12h47
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Au lendemain de la passation de pouvoir à Matignon entre Jean-Marc Ayrault et le nouveau premier ministre, Manuel Valls, la composition du gouvernement a été annoncée par le secrétaire général de l'Elysée, Pierre-René Lemas, mercredi matin. Seuls les ministres de plein exercice ont été donnés, il faudra attendre la semaine prochaine pour connaître les secrétaires d'Etat.
Pour mettre au point cette nouvelle équipe gouvernementale « de combat », voulue par François Hollande, le président de la République et Manuel Valls ont négocié jusqu'à ce matin. Ils ont dû faire des choix – notamment après le refus des Verts d'en faire partie – et gérer les équilibres entre les différences tendances du PS, qui les ont conduits à se séparer de certains ministres actuels – dont Pierre Moscovici et Vincent Peillon –, à changer le portefeuille d'autres et à en nommer des nouveaux.
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LES NOUVEAUX MINISTRES
Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie
Ces dernières semaines, l'entrée prochaine au gouvernement de Mme Royal était devenue une évidence. Le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, vieil ami de François Hollande, et donc de Ségolène Royal, a récemment déjeuné avec elle pour discuter de la question. Avec Manuel Valls, qui l'avait soutenue au congrès de Reims, en 2008, mais avec qui les relations s'étaient distendues depuis des années, le contact a été renoué fin 2013 après l'affaire Leonarda à l'occasion de laquelle la présidente de la région Poitou-Charentes avait défendu la position du ministre de l'intérieur.
A 60 ans, voici donc Ségolène Royal ministre pour la quatrième fois. Vingt-deux ans jour pour jour après sa première entrée dans un gouvernement. C'était le 2 avril 1992. Ce jour-là, Ségolène Royal était nommée ministre de l'environnement dans le gouvernement de Pierre Bérégovoy.
Lire le portrait La revanche de Ségolène Royal
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François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social
Cette fois-ci, il n'a pas passé son tour. La nomination du patron des sénateurs socialistes, François Rebsamen, mercredi 2 avril, au poste de ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, a un petit goût de rattrapage. En mai2012, la Place Beauvau lui avait échappé, et il avait refusé tout autre poste: pas question d'abandonner la mairie de Dijon, qu'il a conquis de haute lutte en 2001 après deux tentatives malheureuses, pour autre chose que l'intérieur. Ce fidèle de François Hollande, âgé de 62 ans, a saisi sa deuxième chance d'accéder à un portefeuille ministériel. Ce sera sa première fois. Son rôle sera central pour faire passer la pilule du pacte de responsabilité auprès des syndicats et mener la bataille de la lutte contre le chômage.
LES PROMOTIONS ET CHANGEMENTS DE MINISTÈRES
Arnaud Montebourg à Bercy
Le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg.
Le ministre du redressement productif se retrouve à la tête du ministère de l'économie à la place de Pierre Moscovici. Cadre de la gauche du PS par opposition à Manuel Valls qui incarne la droite du parti, il s'est fait le chantre de la démondialisation lors de la campagne des primaires en 2011.
A la tête de la gigantesque administration de Bercy, il aura à gérer de lourds dossiers lancés par le gouvernement précédent. Il aura ainsi la difficile tâche de réaliser les 50 milliards d'économies dans le cadre du pacte de responsabilité. Il devra également mettre en œuvre la baisse des impôts et des cotisations salariales promises par François Hollande au lendemain de la défaite des municipales.
Lire le portrait Arnaud Montebourg s'impose à Bercy
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Bernard Cazeneuve, « la tombe » ministre de l'intérieur
C'est la principale surprise de ce gouvernement : la nomination de Bernard Cazeneuve au ministère de l'intérieur. Les postulants à la fonction ne manquaient pas mais, faute d'accord entre François Hollande et Manuel Valls, c'est à nouveau à ce joker qu'il a été fait appel, comme il avait déjà en catastrophe été catapulté au budget après la démission contrainte de Jérôme Cahuzac. Preuve de la confiance que lui accorde le président de la République et qu'il est devenu l'homme des situations impossibles.
Benoît Hamon, ministre de l'éducation nationale, enseignement supérieur et et de la recherche
Benoît Hamon a quitté le quartier de Bercy pour la rue de Grenelle et le ministère de l'éducation nationale. L'ancien leader étudiant contre la loi Devaquet en 1986 devient le patron des profs. Sa nomination était en préparation depuis quelques mois. En novembre, son action auprès des syndicats étudiants et lycéens lors de l'affaire Leonarda avait été remarquée par l'Elysée.
Depuis, il a vu Bernadette Groison, la secrétaire générale de la FSU, première fédération syndicale de l'éducation, en début d'année. Et la semaine dernière, des proches du nouveau ministre ont laissé quelques messages à des ténors du monde éducatif, avec cette question simple : « Pourquoi à vos yeux Vincent Peillon a-t-il échoué ? »
Pourquoi Benoît Hamon ? Le nouveau premier ministre Manuel Valls, taxé par ses pairs d'être trop à droite, avait besoin d'une caution de gauche dans son équipe. Or, M. Hamon est classé à l'aile gauche du PS et militait depuis plusieurs mois pour monter en grade. Ces derniers mois, les deux hommes ont passé un « gentlemen agreement » après s'être longtemps combattus dans l'appareil socialiste.
Lire le portrait Un « short » ministériel taille XL pour Benoît Hamon, ministre de l'éducation
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Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires
Sylvia Pinel, née le 28 septembre 1977, a été nommée ministre du Logement et de l'Egalité des territoires. Elle succède à l'écologiste Cécile Duflot. Membre du Parti radical de gauche, elle était depuis le 16 mai 2012, déléguée puis ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.
LES PORTE-FEUILLES ÉLARGIS
French Minister for Women's Rights and Government Spokeperson, Najat Vallaud-Belkacem, attends the session of questions to the government at the National Assembly, on February 5, 2014 in Paris. AFP PHOTO / PATRICK KOVARIK
Les missions de plusieurs de ses membres sont élargies, comme Najat Vallaud-Belkacem ou Stéphane Le Foll, qui devient porte-parole.
Stéphane Le Foll, agriculture, porte-parole du gouvernement
Fidèle parmi les fidèles du président, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, devient par ailleurs porte-parole du nouveau gouvernement. Stéphane Le Foll, ancien directeur du cabinet de François Hollande quand celui-ci dirigeait le PS, avait été pressenti ces derniers mois pour prendre la tête du parti. Ce Breton à la voix forte va donc devoir être le traducteur de la parole gouvernementale. Un poste sensible et exposé médiatiquement qui témoigne de la confiance que lui accorde le chef de l'Etat, qui a toujours apprécié son parler-vrai et sa franchise.
Najat Vallaud-Belkacem, droits des femmes, ville, jeunesse et sports
La benjamine du gouvernement Ayrault perd sa fonction de porte-parole mais élargit son périmètre, en ajoutant les portefeuilles de la ville, de la jeunesse et des sports à celui des droits des femmes, qu'elle détenait déjà. Issue d'un milieu modeste, Najat Vallaud-Belkacem est née le 4 octobre 1977 au Maroc, avant de grandir dans un quartier populaire d'Amiens. Diplômée de Sciences Po mais restée aux portes de l'ENA, la jeune femme a mené son ascension au sein du Parti socialiste sous l'aile de deux mentors, le maire de Lyon, Gérard Collomb, et Ségolène Royal, dont elle fut la porte-parole pendant la campagne présidentielle de 2007.
LES MINISTRES CONFORTÉS À LEURS POSTES
Laurent Fabius.
Le nouveau gouvernement, annoncé mercredi 2 avril, conforte à leurs ministères Laurent Fabius, Jean-Yves Le Drian, Christiane Taubira ou encore Marisol Touraine
Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international
Pilier du gouvernement, Laurent Fabius est reconduit à la tête du ministère des affaires étrangères. Un temps envisagé pour Matignon, l'ancien premier ministre de Mitterrand a toujours fait savoir qu'il voulait rester au Quai d'Orsay, le seul poste, qu'il estime, à 68 ans, à la hauteur de son parcours et où il pense pouvoir laisser sa marque dans l'histoire. Avec une guerre inachevée au Mali, une autre mal engagée en Centrafrique et des frontières européennes bousculées par Vladimir Poutine, Manuel Valls a choisi de jouer la sécurité et la continuité au Quai d'Orsay.
Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense
Jean-Yves Le Drian, défense Il ne se voyait pas ailleurs et, à 66 ans, ce très proche de François Hollande est bien conforté au poste de ministre de la défense. Depuis deux ans, ce Breton au caractère plutôt taiseux a été placé en première ligne par le président pour « vendre » une politique d'interventions militaires extérieures très volontariste. A la tête du troisième budget de l'Etat (31,4 milliards d'euros), il devra continuer à se battre sans relâche contre Bercy, en dépit des arbitrages présidentiels et de la stratégie scellées dans le nouveau Livre blanc de la défense en 2013.
Christiane Taubira, garde des sceaux
Christiane Taubira reste Place Vendôme. C'était son souhait. Le débat sur sa grande bataille du quinquennat, la réforme pénale contre la récidive et l'individualisation des peines, devait s'ouvrir le 14 avril devant l'Assemblée nationale. Un texte en partie réécrit par la commission des lois, avec l'accord de Manuel Valls lorsqu'il était ministre de l'intérieur, et qui a désormais toutes les chances d'être adopté. La ministre de la justice, auréolée à gauche par le débat, en janvier 2013, sur le mariage pour tous, n'avait pas encore pu faire voter nombre de textes adoptés en conseil des ministres.
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication
Aurélie Filippetti conserve son ministère de la culture et de la communication, malgré un premier « mandat » compliqué par la mise au sec du budget de la culture. « On traverse une crise d'une gravité inouïe », justifie alors, en bon soldat, cette ex-écologiste, qui lâcha les Verts pour le PS en 2006, se mis au service de Ségolène Royal pour la présidentielle de 2007 avant de se convertir, dès la primaire socialiste de 2011, au hollandisme. Sa plus grande victoire est sans doute celle menée pour la défense de l'exception culturelle. Elle n'a en revanche pas réussi à pacifier le dossier des intermittents du spectacle et les artistes et techniciens, toujours mobilisés, lui en veulent beaucoup.
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales
Marisol Touraine, 55 ans, conserve le portefeuille des affaires sociales, ce qu'elle souhaitait. Si elle n'a pas démérité en menant à bien la réforme des retraites, elle devra désormais accélérer le rythme sur la santé, un peu oubliée depuis deux ans.
Deux lois sont au programme : la première sur la santé publique, la seconde sur la fin de vie. Un sujet qui tient à cœur à la fille du sociologue Alain Touraine. Mais elle va aussi et surtout devoir trouver le moyen de réduire les dépenses, la santé étant considérée comme un des principaux gisements d'économies pour arriver aux 50 milliards promis par François Hollande.
George Pau-Langevin, ministre des outre-mers
George Pau-Langevin, ministre déléguée à la réussite éducative dans les gouvernements de Jean-Marc Ayrault, devient ministre des outre-mer, où elle succède à Victorin Lurel. Née à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, cette avocate de 65 ans, ancienne présidente du Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples, a été élue députée de Paris en 2007. Elle devient alors la première députée de couleur de métropole. Mme Pau-Langevin a dirigé de 1997 à 2001, l'Agence nationale de promotion et d'insertin des travaillers d'outre-mer.
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics
Vingt ans après avoir été le ministre de ministre de l'économie et des finances de Pierre Beregovoy, Miche Sapin retrouve Bercy en tant que ministre des finances et des comptes publics. Il retourne ainsi à ses compétences initiales, après avoir passé 22 mois au ministère du travail et de l'emploi.
Malgré l'échec de l'inversion de la courbe du chômage, M. Sapin bénéficie de sa proximité avec François Hollande, qu'il a rencontré lors de son service militaire, pour bénéficier d'une promotion. A 61 ans, son influence au sein de l'exécutif est en effet resté intact, malgré le fait que le nombre de chômeurs ait bondi de près de 425 000 personnes depuis mai 2012. A Bercy, il devra apprendre à travailler avec Arnaud Montebourg.
Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'Etat et de la fonction publique
Marylise Lebranchu conserve son ministère de la décentralisation, de la réforme de l'Etat et de la fonction publique, malgré le camouflet qu'elle avait essuyé en 2013 lorsque sa réforme de la décentralisation avait été entièrement reprise en main par Matignon et scindée en trois textes. Le deuxième, qui donnera de nouveaux pouvoirs aux régions, doit d'ailleurs être présenté à une date qui n'est pas encore connue. Elle devra par ailleurs gérer le mécontentement des fonctionnaires qui monte à cause du maintien du gel du point d'indice et des suppressions de postes dans les ministères non prioritaires.