Le Monde.fr | 01.04.2014 à 08h55 | Par Catherine Rollot
Cécile Duflot, le 26 mars à Paris.
Elle rêvait de marquer d'une troisième loi son action au gouvernement. La nomination de Manuel Valls à Matignon, lundi 31 mars, ne lui en laissera pas le temps. Cinq jours après la publication au Journal officiel de la loi relative à l'accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR), son « grand œuvre », Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement a confirmé quelques minutes après l'allocution du président de la république, dans un communiqué commun avec son collègue écologiste du ministère du développement, Pascal Canfin, qu'elle ne ferait pas partie de la nouvelle équipe gouvernementale.
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« Les idées portées par le nouveau premier ministre depuis plusieurs années, notamment lors de la primaire du Parti socialiste ou comme ministre de l'intérieur ne constituent pas la réponse adéquate aux problèmes des Françaises et des Français », estiment les deux ministres sur le départ. « Avec franchise et lucidité, nous en tirons donc toutes les conséquences et n'entendons pas participer à ce nouveau gouvernement, que nous assurons de notre vigilance la plus haute mais aussi de notre solidarité, chaque fois que le cap choisi sera le bon. »
Cette décision clôt un passage de près de deux ans à la tête d'un ministère où Mme Duflot a multiplié décrets, ordonnances et projets de loi afin de réformer et de relancer le secteur du logement et de la construction.
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Dès son arrivée au ministère, Cécile Duflot a mis en place un dispositif d'urgence d'encadrement des loyers applicable au 1er août 2012 pour les zones tendues, reconduit un an plus tard. Plus symbolique qu'efficiente, cette première mesure se voulait être un avant-goût de ce qui devait être une des piliers de sa future loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové.
Aprement défendu par la ministre écologiste, ce texte fleuve de cent soixante-dix-sept articles, adopté le 26 mars 2014, avait pour ambition « d'apporter des réponses rapides, concrètes et durables aux difficultés que connaissent les Français pour se loger, en particulier la forte augmentation des prix et la pénurie de logements », notamment grâce à ces deux mesures phares, l'encadrement des loyers et la garantie universelle des loyers.
Ces dispositions n'entreront en vigueur qu'en 2016. L'ex-secrétaire nationale des Verts quitte donc le gouvernement avant de pouvoir en mesurer les effets et avant même que l'architecture complexe de ces deux dispositifs ait été définie par décret.
LOIN DES CINQ CENT MILLE LOGEMENTS PAR AN
Difficile aussi de faire un bilan de la loi dite « Duflot I », du 18 janvier 2013, sur la mobilisation du foncier public et le renforcement du seuil minimal de logements sociaux de 20 % à 25 %. Les administrations ont tardé pour donner la liste de leurs terrains mobilisables, et les cessions se comptent encore sur les doigts d'une main, quant aux communes, elles ont jusqu'en 2025 pour atteindre le seul de 25 % d'habitations à loyer modéré (HLM).
Au-delà de ces réformes de fond, l'action de Mme Duflot a été ternie par les mauvais chiffres de la construction. Loin de la promesse de François Hollande de construire 500 000 logements par an, dont 150 000 sociaux, le nombre de mises en chantier en 2013 n'a pas dépassé les 335 000 unités, en baisse de 5 % par rapport à 2012. L'adoption de six ordonnances pour accélérer les projets et simplifier les normes de construction n'a pour l'instant pas permis de sortir le secteur de son marasme.
Dans la tradition de ces prédécesseurs, Mme Duflot a aussi donné son nom à un dispositif d'incitation fiscale en faveur de l'investissement locatif. Environ 30 000 « dispositifs Duflot », contre un objectif initial de 40 000, ont ainsi été signés, depuis son lancement, le 1er janvier 2013. Enfin, la ministre écologiste avait toujours insisté sur l'importance du second volet de son maroquin ministériel, celui de l'égalité des territoires, parlant même d'une possible loi sur ce thème. Il y a encore quelques semaines, elle clamait vouloir faire de « 2014 l'année de l'égalité des territoires », une ambition aujourd'hui enterrée par sa décision.