LE MONDE | 27.02.2014 à 08h05 • Mis à jour le 27.02.2014 à 11h21 | Par Jean-Baptiste Chastand
Jean-François Copé, venu supporter la candidate UMP aux municipales de mars Laurence Garnier, le 26 février à Nantes.
Jean-François Copé, le président de l'UMP, a-t-il fait profiter à ses proches de juteux contrats de communication sur les fonds de son parti ? C'est en tout cas ce qu'affirme Le Point, dans son édition du 27 février, pointant la société de communication Bygmalion, et sa filiale Event & Cie, fondées par Bastien Millot et Guy Alves, deux intimes de M. Copé. Ces derniers ont travaillé avec lui à la mairie de Meaux puis dans son cabinet lorsqu'il était ministre.
Selon l'hebdomadaire, « universités d'été, journées parlementaires, conseils nationaux, campus et séminaires de réflexion: Bygmalion est à la manœuvre sur tous les grands événements du parti » à partir de 2010, date à laquelle Jean-François Copé devient secrétaire général de l'UMP. Auparavant, Bygmalion aurait bénéficié « de juteuses commandes sans appels d'offres et payées rubis sur l'ongle », par le groupe UMP de l'Assemblée nationale, lorsque M. Copé en était le président.
Lors de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012, la filiale de Bygmalion Event &Cie «aurait empoché au moins 8millions d'euros» pour organiser des meetings. « Les prestataires auxquels nous avons présenté les bordereaux d'Events trouvent la note salée, estimant le surcoût à environ 20% », écrit Le Point. Le magazine écrit avoir eu connaissance de « documents » montrant que « lors de certains meetings, les frais de traiteur, de retransmission vidéo et d'éclairage ont atteint le double des tarifs habituellement pratiqués ».
5 MILLIONS D'EUROS PRIS EN CHARGE PAR L'UMP
Les comptes de cette société ne sont pas publics, mais Le Point assure qu'elle a connu «une croissance fulgurante» depuis sa création en 2008. Dans le même temps, « entre 2010 et 2012, les finances de l'UMP sombrent dans le rouge, passant d'un solde positif de 4,5 millions, à un déficit abyssal de 40 millions ». Les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy ont par ailleurs été invalidés par la commission chargée de les vérifier, qui avait notamment estimé que le parti avait pris trop de factures à sa charge.
Le Point affirme ainsi que le parti a pris à sa charge 5 millions d'euros sur les 8 millions facturés en tout par Event. A la suite de cette invalidation, M.Copé avait lancé un « Sarkothon » pour renflouer les comptes du parti. « Tout le monde savait pour Jean-François Copé : c'est la raison pour laquelle je n'ai pas participé au Sarkothon », a twitté jeudi matin le député UMP de Haute-Savoie Lionel Tardy, proche de François Fillon, en réaction aux révélations du Point.
Par ailleurs, selon l'hebdomadaire, un troisième investisseur se cache derrière Bygmalion, Emmanuel Limido, à la tête de Centuria, « un fonds d'investissement de plus de 4 milliards d'euros largement abondé par les Qatariens ». Ce fonds aurait notamment servi d'intermédiaire lors de «la vente de deux joyaux appartenant à l'Etat», quand Jean-François Copé était ministre du budget. Centuria aurait embauché en 2006 Guy Alves, qui était alors « chef de cabinet de Copé au budget, et depuis peu trésorier du microparti de ce dernier », écrit Le Point. Un microparti alors domicilié à la même adresse que l'association qui le finançait et Bygmalion, dans le 15e arrondissement de Paris.
Suite à ces révélations, M. Copé a « chargé Me Hervé Temime de porter plainte pour diffamation contre Le Point et les deux auteurs de l'article, compte tenu des graves accusations portées à son encontre et qui ne reposent sur rien», a affirmé jeudi à l'AFP Jérôme Lavrilleux, directeur de cabinet du président de l'UMP. Interrogé par i-Tele jeudi matin, M.Copé a lancé: « C'est absolument immonde. » « C'est un coup monté totalement, de manière absolument ignoble. Il n'y a qu'une manière d'y répondre, c'est par la voie des tribunaux », a-t-il dit. Il a mis en cause l'ancien directeur du Point Franz-Olivier Giesbert « qui depuis des mois et des mois nous attaque, Nicolas Sarkozy comme moi-même, pour nous détruire ».