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Accusé de corruption, Rajoy dénonce "mensonges" et "manipulations"
Le 31.07.2013 à 14h11 • Mis à jour le 01.08.2013 à 10h13
Un nouveau scandale secoue la droite espagnole au pouvoir l'affaire Barcenas. Le Parti populaire (PP), au pouvoir depuis décembre 2011, est empêtré dans une affaire de corruption, dans laquelle Mariano Rajoy, chef du gouvernement, pourrait être impliqué. Jeudi 1er août, il s'est exprimé devant les députés pour se défendre des accusations qui le visent, dénonçant "les mensonges et les manipulations et insinuations malignes qu'ont encouragés entre autres certains dirigeants politiques". L'affaire ne "m'empêchera de gouverner", a-t-il lancé.Cette "affaire Barcenas" commence en janvier 2013, lorsque les quotidiens espagnols
El Mundo et
El Pais révèlent que d'importantes sommes d'argent illégal aurait été versées aux cadres du PP par Luis Barcenas.
QUI EST LUIS BARCENAS ?L'ancien trésorier du Parti populaire espagnol, Luis Barcenas, en février.
A 55 ans, Luis Barcenas a une longue carrière politique derrière lui. Ancien sénateur, il a également géré pendant vingt ans les finances du Parti populaire, avant d'en être nommé trésorier en 2008. Un poste et un avenir politique prometteurs qu'il s'est résigné à abandonner en 2009, après que la plus haute juridiction espagnole, le Tribunal suprême, a ouvert une enquête contre lui pour fraude fiscale. En cause, quelque 48 millions d'euros que Barcenas aurait cachés au fisc espagnol au moyen de comptes en Suisse.
Mais à cette fraude fiscale, s'ajoutent de nouvelles révélations. L'ancien trésorier du PP aurait également, selon le quotidien
El Mundo, distribué chaque mois entre 5 000 et 15 000 euros dans des enveloppes à des cadres du parti conservateur. Des divulgations qui se précisent lorsque le journal
El Pais publie les registres présumés de la comptabilité occulte du PP, qui établiraient l'existence de ces gratifications illégales.
Jusqu'à son arrestation, le 27 juin 2010, l'ancien trésorier contestait l'existence de ces primes illégales et niait être l'auteur de ces registres. Mais depuis qu'il dort en prison, Luis Barcenas est passé aux aveux.
QU'A RÉVÉLÉ L'ANCIEN TRÉSORIER DU PP ?
Le 15 juillet 2013, il a finalement reconnu être l'auteur de ces registres de comptabilité parallèle, dont il a remis des versions manuscrite et numérique aux juges. Au total, neuf porte-documents contenant des informations sur le financement occulte du parti de ces vingt dernières années.
Luis Barcenas a assuré que les remises d'enveloppes étaient "systématiques".
"Pendant ces vingt dernières années au moins, le Parti populaire a été financé de manière illégale", a-t-il déclaré à
El Mundo. Un système de corruption de grande ampleur au sein du parti, dont il aurait hérité en prenant ses fonctions de gestionnaire des finances du parti, dans les années 1990.
Selon ses déclarations, les fonds seraient provenus des dons d'entrepreneurs, et auraient été utilisés pour financer les coûts du parti et les gratifications illégales accordées aux cadres du PP.
MARIANO RAJOY "AU COURANT" DES FINANCEMENTS ILLÉGAUX
Le président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, lors d'une conférence de presse, le 22 juillet.
D'après les révélations de Luis Barcenas, Mariano Rajoy, aurait été au courant de ces financements illégaux, dont ce dernier aurait largement bénéficié.
"Tous les présidents et secrétaires généraux" du parti auraient touché ces gratifications illégales, a déclaré l'ancien trésorier.
Dans les registres comptables publiés par
El Pais, l'actuel chef du gouvernement est en effet mentionné. Il aurait touché des sommes atteignant 25 200 euros par an, pendant onze ans. Si Mariano Rajoy nie en bloc ces accusations, d'autres documents accablent le chef du gouvernement et président du Parti populaire.
"Mariano Rajoy a gardé un contact direct et permanent (au moins de mai 2011 à mars 2013) avec l'ancien trésorier et il lui a demandé qu'il nie la comptabilité parallèle et l'existence des primes", affirmait
El Mundo, dans son édition du 14 juillet.
A l'appui, des échanges de SMS entre le chef du gouvernement et Luis Barcenas, que ce dernier a pris soin de diffuser après avoir été lâché par son ancienne formation politique. Le porte-parole du PP au Congrès avait en effet déclaré à son sujet qu'il était
"un délinquant ayant fait du mensonge son style de vie". Selon
El Mundo, Luis Barcenas, en colère, affirmait le 14 mars à Mariano Rajoy se sentir
"libéré de tout engagement envers [lui] et envers le parti".
Le Parti populaire s'était désolidarisé de M. Barcenas lorsque ce dernier avait été impliqué dans le scandale Gürtel, qui empoisonne la droite depuis 2009, et dont le lien serait établi avec l'affaire Barcenas. Jeudi 1
er août, devant les parlementaires, le premier ministre Rajoy a déclaré s'être
"trompé" en faisant confiance à Barcenas, qui ne le
"méritait pas". Selon lui, Barcenas
"se défend du mieux qu'il peut" en accusant injustement le PP.
AFFAIRE "GÜRTEL" : L'ACHAT DE CONTRATS PUBLICS
Le scandale Gürtel, une affaire de corruption généralisée au sein du Parti populaire, implique 70 personnes, dont 18 membres du PP. Le scandale éclate en 2009, lorsque des révélations montrent l'existence du réseau dit "Gürtel". Le principe : moyennant voitures de luxe et argent liquide transmis au parti, des entrepreneurs, menés par l'homme d'affaires Francisco Correa, obtiennent des contrats publics.
Là encore, Luis Barcenas est un personnage clé du scandale. L'ancien trésorier du parti a été inculpé pour avoir touché d'importantes sommes via ce réseau. Des versements qui pourraient expliquer les quelque 48 millions d'euros déposés sur des comptes bancaires en Suisse par l'ancien trésorier.
Les deux affaires de corruption ont été confiées au juge de l'Audience nationale de Madrid, Pablo Ruz. Mardi 30 juillet, le magistrat vient de convoquer la secrétaire générale du Parti populaire, Maria Dolores de Cospedal, également citée dans les registres de comptabilité. La numéro deux du PP devrait s'exprimer prochainement sur la présumée comptabilité occulte du parti.
De son côté, Mariano Rajoy devrait évoquer l'affaire Barcenas ce premier août devant le Congrès. Un discours très attendu par l'opposition, qui réclame que le chef du gouvernement conservateur s'explique, depuis que son nom est associé au scandale.