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 Printemps arabe : la lutte entre les élites politiques

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Jamel
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Jamel


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MessageSujet: Printemps arabe : la lutte entre les élites politiques   Printemps arabe : la lutte entre les élites politiques Icon_minitimeMer 24 Juil - 5:46

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Printemps arabe : la lutte entre les élites politiques

Le 18.07.2013 à 15h52 • Mis à jour le 19.07.2013 à 10h40 | Par Abdelmalek Alaoui (Président de l'Association marocaine d'intelligence économique)

Printemps arabe : la lutte entre les élites politiques 3161501_3_7960_comme-une-replique-au-tremblement-de-terre-des_22393e376b56f715dd6fc3ea5c67e017
Les forces économiques du Maghreb doivent rapidement faire l'apprentissage de la démocratie (un manifestant brandit le drapeau égyptien, le 31 janvier 2011 au Caire.

Comme une réplique au tremblement de terre des soulèvements arabes, les pays du Maghreb vivent actuellement une période de grandes turbulences.


Après que les processus électoraux aient bénéficié aux partis islamistes, les pays d'Afrique du Nord voient en effet monter les tensions entre les élites traditionnelles et les nouvelles élites. Dans ces sociétés arabes en pleine transformation, les élites pieuses, qui ont toujours existé, acquièrent de plus en plus de visibilité.

Parallèlement, de nouvelles élites, issues de l'Islam politique, cherchent quant à elles, à consolider leur pouvoir et pas seulement en infiltrant les institutions de l'Etat. Affrontements et crises politiques masquent en effet à peine la dynamique à l'œuvre qui oppose les forces nouvelles et traditionnelles. Cette compétition effrénée pour le contrôle de la sphère économique fait craindre la probabilité d'un " choc des élites " qui aura un impact certain sur les mutations en cours de la région.

Les forces économiques du Maghreb - et leurs élites - ont des histoires différentes, intimement liées à la manière dont la décolonisation s'est déroulée et au rapport que les différents pays ont gardé avec les anciennes puissances occupantes. Certes, ces forces ne sont pas monolithiques, mais sont plutôt constitués de groupes aux visions et intérêts convergents.

FORMÉS AUX ETATS-UNIS OU EN ANGLETERRE

Le paysage économique de l'Egypte, bouleversé par la révolution nassérienne, voit depuis les années 1970 la montée de l'armée comme force économique au point de contrôler prés du quart de l'économie du pays.

Formés majoritairement aux Etats-Unis ou en Angleterre, les officiers supérieurs égyptiens se reconvertissent très naturellement dans les affaires, selon une loi non-écrite édictée par Hosni Moubarak.

L'armée égyptienne était donc la première touchée par la crise économique qui frappe de plein fouet le pays depuis deux ans. Elle était aussi la première pénalisée par l'incapacité de Mohammed Morsi à remettre en route la machine économique.

En Tunisie, où la décolonisation a été relativement douce, ce sont les élites francophones, généralement formées dans l'hexagone, qui continuent de dominer dans l'économie et la technostructure administrative nationale, avec une légère percée des élites anglophones.

En Algérie, c'est une élite économique " hybride ", issue de la fertilisation croisée de la Nomenklatura du FLN et de l'armée qui occupe la majorité du terrain économique. Elle défend notamment son pré-carré lié à l'exploitation des hydrocarbures et à la délivrance de toutes sortes d'autorisations dans un pays aux procédures administratives parfois déroutantes.

POLYTECHNIQUE, CENTRALE, MINES

Concernant le Maroc, les élites économiques traditionnelles se sont construites autour d'un noyau dur d'entreprises familiales dominées par les grands bourgeois de Fès. Les originaires du Souss, quant à eux, contrôlent historiquement le commerce de détail. Puis, à la faveur de la vague de marocanisation des années 1970, de grands groupes se sont constitués puis diversifiés.

Plus de la moitié de leurs dirigeants – aussi bien dans le secteur public que privé - sont des lauréats de l'enseignement supérieur français, avec une nette prédominance pour les écoles d'ingénieur parisiennes : Polytechnique, Centrale, Mines ou encore Supelec.

Les forces économiques traditionnelles du Maghreb ont leurs habitudes à Paris, Londres ou Washington. Les nouveaux entrants leurs préfèrent les capitales du Moyen-Orient, Jeddah, Abu Dhabi, ou plus récemment Doha. Leurs centres de gravité internationaux sont donc radicalement différents.

Idéologiquement, la fracture entre les deux groupes est profonde, car les élites économiques anciennes ont porté depuis la décolonisation un idéal de séparation du politique et du religieux, se rapprochant en cela du modèle laïc français.

Les nouvelles élites islamistes du Maghreb, quant à elles, affirment préférer le modèle de sécularisation du politique inspiré des Etats-Unis. Elle prennent toutefois soin dans leur discours de ne pas évoquer sa manifestation la plus exacerbée, la période néo-conservatrice de George Bush Jr.

INCAPACITÉ DES ISLAMISTES DU MAGHREB

Or, depuis l'arrivée au pouvoir des partis islamistes à la faveur des révolutions arabes, les élites économiques anciennes instruisent un procès méthodique en incompétence à l'endroit des nouveaux venus ; ces derniers mettent en avant la légitimité des urnes qui les a portés au pouvoir.

En somme, les élites nouvelles sont accusées d'incompétence et les anciennes d'illégitimité.

Dans les faits, l'incapacité des islamistes du Maghreb à proposer un modèle économique alternatif, construit sur une meilleure répartition des richesses et un retour à une croissance dynamique, semble donner raison à leurs détracteurs. Ces derniers les accusent au mieux d'inexpérience dans les affaires de l'Etat, au pire de nourrir un agenda caché afin d'en recueillir à terme des bénéfices politiques. Bref, de jouer la politique du pire.

De surcroît, les difficultés de mise en œuvre des réformes nécessaires pour l'amélioration de la gouvernance, qui avaient pourtant constitué la colonne vertébrale des promesses de campagnes d'Ennahda en Tunisie ou des Frères musulmans en Egypte confortent les thèses de ceux qui affirment que les islamistes maghrébins ne sont pas faits du même bois que l'AKP.

En effet, le parti islamiste turc a su en son temps allier réformes structurelles et opportunisme économique pour favoriser l'émergence de la Turquie.

Cette confrontation – qui relève d'une véritable guerre économique - est accentuée par la résistance des élites anciennes aux tentatives de conquête de territoires par les pouvoirs islamistes.

" PROVOCATION "

N'ayant pas voulu - ou su - composer avec l'opposition malgré la demande expresse du Général Al-Sissi , le premier président islamiste d'Afrique du Nord, Mohamed Morsi, a vu son mandat écourté brutalement par l'institution militaire, qui avait le plus à perdre en termes économiques d'une déstabilisation durable du pays.

En Tunisie, la relance de l'économie est devenue tellement prioritaire que même la bière nationale, la " Celtia " a été mise à contribution . Elle est en effet officiellement exportée vers la France depuis la mi-juin, provoquant la colère des nouvelles élites conservatrices et islamistes, qui voient dans cette démarche une " provocation ".

L'apparition au Maroc, à côté de l'organisation patronale CGEM d'une nouvelle association de " patrons " d'obédience islamiste : Amal entreprises, constitue un autre avatar de cette ambition portée par les élites islamistes.

Ces différents exemples, avec des degrés de gravité certes différents, illustrent bien la tectonique à l'œuvre dans ce Maghreb en transition où les dissensions et clivages le disputent à la polarisation.

A tous les niveaux, donc, les ingrédients d'un " choc des élites " sont réunis en Afrique du nord et il devient urgent d'organiser le dialogue, basé sur le respect mutuel et l'arrêt des procès en sorcellerie. Il est en effet essentiel que les anciennes élites acceptent de partager plus -notamment sur le plan économique- et que les nouvelles élites résistent à la tentation hégémonique.

En clair, les forces économiques du Maghreb doivent rapidement faire l'apprentissage de la démocratie. A défaut, elles courent le risque de déstabiliser durablement la rive sud de la Méditerranée.

Abdelmalek Alaoui (Président de l'Association marocaine d'intelligence économique)
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