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En Tunisie, ceux qui ne jeûnent pas le font savoir
12 juillet 2013 à 13:11 Capture d'écran de la page Facebook des fattaras.
Récit : Des internautes se mobilisent pour faire respecter leur droit de ne pas observer le ramadan, recensant cafés et restaurants ouverts.
On les appelle les «fattaras», ces gens qui n’observent pas le jeûne du ramadan. En Tunisie, ils sont plusieurs milliers à s’emparer du web pour localiser les endroits où manger, boire un verre ou fumer une cigarette dans la journée. Leurs principales armes : Twitter, Facebook et Google, trois vecteurs de communication qu’ils utilisent à merveille. C’est ainsi que le hashtag #Fater (qui ne jeûne pas) connaît un véritable engouement depuis quelques jours. Les twittos y échangent les adresses – de Tunis principalement – qui gardent leurs portes ouvertes à la clientèle, mais aussi des photos et des commentaires divers et variés.
Dans le même ordre d’idées, Myriam Karoui, 36 ans, avait créé une carte interactive et modifiable par tous. Les internautes pouvaient y pointer les bons plans et des dizaines de points s’ajoutaient chaque jour à cette Google Map originale.
«Moi-même, je jeûne, admet-elle,
mais je voulais rendre service. Il n’y a rien de plus dérangeant pour moi que l’odeur de fumée ou de café. L’idée était de recenser les endroits où pourraient se retrouver les fattaras sans que ça ne dérange qui que ce soit». La localisation de restaurants et cafés en Algérie semblait aussi indiquer que la mobilisation allait s’emparer du voisin maghrébin. Mais l’initiative a montré ses limites, la carte a été piratée, comme en témoignent les nombreux points désignant des restaurants ouverts... au beau milieu de la mer Méditerranée. «
La carte a été fermée au public. Seuls les gens que je connais personnellement peuvent y contribuer désormais. Mais elle reste visible par tous», ajoute cette consultante en relation client.
«On n’a pas appris le jeûne avec les islamistes»L’accès au public, qui fait la force de ces initiatives, pourrait bien les desservir à mesure que les réseaux sociaux s’emparent de l’affaire. Plusieurs utilisateurs ont notamment dénoncé via le hastag «Fater» ce qu’ils considèrent comme de la provocation envers les jeûneurs. Depuis le mercredi 29 mai et l’intervention d’Adel Almi, le président de l’Association centriste pour la sensibilisation et la réforme, qui réclamait dans les colonnes du journal
Assabah l’autorisation de filmer les «
contrevenants» au jeûne du Ramadan, une vague de défiance s’est emparée du web.
Sur Facebook, la page intitulée «Photos prises durant ramadan» recense les photos de «fattaras» en train de manger en journée. «
Ce n’est pas de la provocation, tempère Myriam Karoui,
on n’a pas appris le jeûne avec les islamistes. Ils sont libres de manger ou de boire de l’alcool, comme c’est mon choix d’appliquer ma religion ou non.» Il y a quelques jours, Noureddine Khademi, le ministre tunisien des Affaires religieuses, annonçait à la radio qu’il ne fallait pas ouvrir les cafés et restaurants durant le mois de ramadan. Pourtant, aucune législation ne permet au pouvoir en place d’imposer de telles mesures. «
Il y a beaucoup plus de restaurants ouverts cette année que l’année dernière... Comme quoi ils peuvent toujours causer», conclut Myriam Karoui.