INQUIÉTANTE SITUATION DE LA TOXICOMANIE EN ALGÉRIE :
Plus de 1 million de jeunes se droguent
Jeudi 05 Janvier 2012
Par Idir TAZEROUTLes jeunes sont les premières victimes de ce fléau
L'Algérie qui était jadis un pays de transit, est devenue aujourd'hui un pays consommateur de drogue par excellence.La consommation des drogues est un grave fléau qui touche 30% de la jeunesse algérienne. Selon des chiffres fournis par la Forem, 4% sont des femmes et 15% sont dans les milieux scolaires, à savoir les universités et les lycées. La situation est tout simplement dramatique.
«Dans la situation actuelle, j'avoue qu'il faut être drogué pour ne pas tirer la sonnette d'alarme vu les chiffres qui caractérisent ce phénomène», a indiqué avant-hier à Alger, un observateur lors du lancement officiel de la campagne contre la toxicomanie initiée par la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem).
A cette occasion, la Forem a tenu une conférence de presse à l'hôtel El Djazaïr pour annoncer le lancement de la campagne nationale de lutte contre la toxicomanie pour l'année 2012. Outre la FAF, plusieurs ambassadeurs de bonne volonté ont appuyé cet événement: Hafid Derradji, Salima Souakri, Lotfi Double Canon, Fawzi Oussedik ont été présents à ce grand rendez-vous. Le «la» ainsi donné, destination Adrar. «D'abord on va se rendre dans la wilaya d'Adrar où on a des rencontres avec des lycéens, le lendemain on a une rencontre avec les communes. Ensuite pour les trois prochains jours, on passera à la seconde étape: Bechar, El Bayadh, Naâma», a indiqué le Dr Khiati Mustapha, président de la Forem. Une importante enveloppe est dégagée pour mener cette campagne, selon le président Khiati.
«On a un budget qui tourne autour de 1,5 milliard qui permettra de doter ces communes de stades, de bibliothèques, de centre socio-éducatifs, de cyber-spaces ainsi que la dotation de ces centres en équipements. On va tout mettre en place pour que des jeunes puissent se rencontrer», a soutenu le Dr Khiati Mustapha, président de la Forem.
Pour Salima Souakri, ancienne championne d'Afrique de judo, ses mots sont d'une extrême limpidité. «Nous allons à la rencontre de jeunes qui ont tant besoin de parler et d'être écouté», a-t-elle soutenu.
Lors d'une conférence de presse animée mardi à Alger à la veille du lancement de cette campagne, M.Khiati a précisé que la consommation de drogue, tous types confondus, qui touchait jadis une catégorie déterminée, est devenue de nos jours un phénomène qui touche toutes les catégories de la société. Les jeunes sont les premières victimes de ce fléau pour moult raisons dont le chômage. Pour lutter contre la toxicomanie en milieu scolaire, M.Khiati a appelé le ministère de l'Education nationale à ouvrir les établissements éducatifs aux spécialistes afin qu'ils sensibilisent les élèves sur le danger de la drogue et ses répercussions sur leur santé et leur avenir, et ce, avec la collaboration des stars du football et de la chanson.
Des activités périodiques sportives et culturelles seront organisées en marge de cette campagne qui a pour slogan «Pour une Algérie sans drogues».
La campagne à laquelle prendront part des noms connus, à l'instar de Hafid Derradji et l'ambassadrice de l'Unicef à Alger, Salima Souakri, sera sanctionnée par la publication d'un ouvrage contenant les points de vue de différentes personnalités algériennes et arabes. Environ 200.000 consommateurs de cannabis ont été recensés en octobre dernier, par l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie au niveau national (Onlcdt). La réalité est terriblement autre! Quand on constate qu'«une moyenne d'un million et plus d'Algériens sont consommateurs de drogues, chroniques et occasionnels compris, l'urgence à réagir s'insinue dans tous les esprits responsables».
D'ailleurs, à ce sujet le Dr Khiati ajoute; «Nous allons utiliser des messagers de type nouveau. Des personnes qui sont porteuses de message. L'impact de la toxicomanie est énorme. Les chiffres qui existent sont en deçà malheureusement de la réalité. Ce qu'on saisissait en une année on le saisit actuellement en un jour. C'est dire la gravité de la situation.» Enfin, il faut rappeler que la Forem et la Fédération algérienne de football ont établi une convention pour des actions contre la drogue. Le premier acte était juste avant le match qui a opposé l'Algérie à la Tunisie, les joueurs des deux équipes ont déployé une grande banderole où l'on pouvait lire «Le football contre la drogue». Jusque-là, même si cette campagne de sensibilisation est plus qu'urgente, ce n'est pas pour autant qu'il faut s'attendre à des résultats positifs. La psychologue Trissa Zohra, à travers son intervention lors du débat expliquera que «c'est facile de demander aux imams de prêcher le côté «haram» de la consommation de la drogue, de mener des campagnes de sensibilisation, etc., mais c'est sans aucune conséquence», a-t-elle regretté. Ce qu'il faut faire par contre, de l'avis de cette psychologue, c'est de «soutenir cette jeunesse financièrement. Il faut que le jeune évolue dans un environnement économique, social et politique sain pour l'épargner de ce fléau, sinon ce genre d'initiatives sera sans aucune incidence», a-t-elle tranché. Pour mieux sniffer une réalité, «l'Algérie qui était jadis un pays de transit de la drogue, est devenu aujourd'hui un pays consommateur par excellence», dit, navré, le Dr Khiati.