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Washington hésite à s'engager au Sahel
Mis à jour le 18/01/2013 à 23:12 | publié le 18/01/2013 à 18:44
Le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, lors d'une visite, vendredi, au King's College à Londres.
Les Américains ont accepté de fournir des moyens logistiques. Mais, échaudés par leurs engagements en Irak et en Afghanistan, ils restent prudents.
Correspondante à Washington C'est un électrochoc que l'Amérique vient de subir en Afrique du Nord, avec la prise d'otages menée par des terroristes islamistes en Algérie. Dans la foulée de l'assassinat de l'ambassadeur américain Chris Stevens en Libye en septembre, de la poussée vers le Sud malien d'une rébellion islamiste décidée à renverser le gouvernement de Bamako, puis de l'intervention surprise de la France, la prise d'otages d'Algérie, qui concernerait de 8 à 10 Américains, change de facto la perception jusqu'ici limitée que Washington avait de la menace représentée par al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi).
Plongés dans le brouillard, les États-Unis ont promis de réagir avec fermeté. «Il n'y aura pas de sanctuaire pour les terroristes, ceux qui attaquent notre pays n'auront aucun endroit où se cacher… ni en Algérie, ni en Afrique du Nord, nulle part», a déclaré le secrétaire à la Défense, Leon Panetta. Le fait que les ravisseurs aient proposé de relâcher des otages en échange de la libération de deux détenus aux États-Unis pourrait agir comme un chiffon rouge.
La question est de savoir jusqu'à quel point la prise de conscience d'un danger terroriste susceptible de transformer le Sahel en «nouvel Afghanistan» pourrait changer la nature de l'engagement américain. S'ils s'intéressent à la région depuis des années et ont beaucoup investi dans la coopération antiterroriste au Mali ou en Algérie (avec un succès mitigé), les Américains restent divisés sur la menace qu'Aqmi fait peser sur leur sécurité.
Pris de court Le responsable des affaires africaines au département d'État, Johnny Carson, a longtemps relativisé la menace. Depuis l'attaque de Benghazi, certaines voix au Pentagone préconisaient cependant des frappes ciblées sur les bases arrière d'Aqmi. «Si des Américains sont tués en Algérie, cela pourrait être un tournant», explique au Figaro l'ancien sous-secrétaire adjoint aux affaires d'Afrique occidentale du département d'État, William Fitzgerald, qui a quitté son poste en juin. Au moins deux otages américains étaient toujours vendredi soir aux mains des islamistes, et la secrétaire d'État Hillary Clinton a exhorté Alger à faire preuve d'une «précaution extrême pour préserver la vie des innocents».
«Les Américains ont été pris de court par la poussée vers le sud des islamistes du nord au Mali autant que par l'intervention française», poursuitWilliam Fitzgerald, notant «le contexte peu favorable de l'approche de l'investiture» du président lundi et des remaniements en cours au département d'État et à la Défense. Mais «l'objectif à Washington est de rattraper le temps perdu», assure-t-il.
Leon Panetta a réfuté l'idée d'une «guerre française», exprimant son soutien à l'intervention et parlant de la nécessité d'un effort «international». Les Américains ont accepté de fournir des moyens aériens pour le transport de troupes, en sus de la coopération en matière de renseignement. Mais, échaudés par leurs engagements en Irak et en Afghanistan, ils restent prudents. «Il n'est pas sûr que les Américains soient mûrs pour une action directe», note Fitzgerald. Il souligne que «tout le monde à Washington soutient l'intervention française», mais dit craindre «qu'avec le temps, les accusations de néocolonialisme reviennent». Pour lui, la solution doit être africaine, mais «les forces de la Cédéao appelées à se déployer ne sont pas prêtes à relayer les Français».