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L'Égypte vote sous tension sur sa Constitution
Mis à jour le 21/12/2012 à 22:04 | publié le 21/12/2012 à 19:21
Des heurts entre pro et anti-Morsi ont éclaté vendredi à Alexandrie, à la veille du vote.
Les dix-sept derniers gouvernorats appelés à se prononcer par référendum devraient entériner ce samedi un texte contesté.Les Égyptiens de dix-sept gouvernorats sont appelés à se prononcer à leur tour, ce samedi, sur une Constitution hautement controversée qui divise le pays depuis plusieurs semaines. Si la victoire du «oui» semble déjà pratiquement acquise, elle est loin d'être garante de la «stabilité» tant promise par les Frères musulmans, grands défenseurs de ce texte rejeté en bloc par l'opposition libérale.
Le samedi 15 décembre, au terme de vives tensions entre pro et anti-Morsi, les dix premiers gouvernorats appelés à voter ont, en grande partie, approuvé le projet de loi fondamentale. Selon un décompte publié par le quotidien gouvernemental
al-Ahram, le «oui» soutenu par le camp islamiste a totalisé 56,5 % des voix des 26 millions d'électeurs de la première phase du scrutin. Seules exceptions: Le Caire, la capitale, et la province de Gharbia - qui héberge al-Mahalla, la ville des ouvriers insoumis -, marquées par un «non» majoritaire.
Mais les heurts survenus ce vendredi à Alexandrie donnent un avant-goût de la déchirure entre deux clans bien distincts, qui risque de se renforcer une fois les résultats finaux publiés. D'après les témoignages recueillis dans cette ville méditerranéenne, de violentes échauffourées ont opposé quelques milliers de sympathisants islamistes du président Morsi, à la sortie de la prière hebdomadaire et jusqu'à la nuit tombée, aux partisans de l'opposition, rassemblés par centaines dans la rue.
Crise de confiance entre les deux clansLa semaine dernière, après une journée de vote relativement calme, des dizaines d'islamistes avaient également attaqué le siège du parti libéral al-Wafd, en guise de représailles à l'attaque, les semaines précédentes, d'une vingtaine de locaux de la branche politique des Frères musulmans, avant d'être dispersés par la police. «Les résultats finaux ne devraient qu'aggraver encore plus la crise de confiance qui prévaut entre les deux clans. Cela n'augure rien de bon pour l'avenir proche du pays, qui risque de passer par des phases répétées de turbulence», observe un diplomate occidental.
Finalisé à la hâte au début du mois de décembre, en l'absence de ses rédacteurs libéraux et coptes - et quelques jours après l'annonce d'un décret présidentiel élargissant les pouvoirs du président Morsi -, le projet de Constitution a aussitôt soulevé l'ire de l'opposition. Dès le départ, cette dernière a dénoncé sa coloration islamique, les infractions aux droits des Égyptiennes ainsi que les nombreuses concessions faites à l'armée - dont la possibilité de juger des civils devant des tribunaux militaires.
À peine les premiers résultats diffusés dimanche dernier, les anti-Morsi ont dressé une longue liste d'irrégularités: absence de magistrats dans certains bureaux de vote, déficit d'observateurs impartiaux, pressions exercées sur les femmes et les membres de la minorité copte dans certains gouvernorats. Autant d'accusations réfutées par les Frères musulmans qui dénoncent, eux, un «complot» visant dès le départ à «faire échouer la révolution».
Décisions impopulairesBien que divisée et désorganisée, l'opposition s'est néanmoins montrée capable de mobiliser la rue et de pousser le président à reculer sur certaines décisions impopulaires - celles-ci ne manquent pas - au point d'embarrasser publiquement Mohammed Morsi. Ainsi le soudain retrait du décret controversé, au lendemain d'affrontements mortels, le 5 décembre, entre manifestants rivaux aux abords du palais présidentiel. Ou encore l'annulation, le 10 décembre, de l'augmentation des taxes sur quelque 70 produits, annoncée la veille - une mesure néanmoins indispensable à l'obtention d'une aide du FMI pour sortir le pays de la crise économique. «Si la Constitution passe, la rue n'a pas dit son dernier mot», prévient un habitué de la place Tahrir.