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Le blues des médecins s'étend et descend dans la rue
Mis à jour le 12/11/2012 à 08:35 | publié le 11/11/2012 à 18:09
Les jeunes internes redoutent aussi la future loi sur les réseaux de soins qui pourrait obliger les mutualistes à aller chez un médecin sélectionné par les complémentaires santé pour être mieux remboursés.
Plusieurs syndicats et coordinations appellent les internes et les chirurgiens libéraux à manifester pour se plaindre du gouvernement.Ce ne devait être au départ qu'une petite grève d'internes. Mais c'est à l'arrivée un large mouvement de contestation qui exprime le mal-être de toute une partie de la profession. Une grogne qui va des généralistes de campagne jusqu'aux chirurgiens esthétiques de la Côte d'Azur, en embrassant tous les corps de spécialistes: chirurgiens, cardiologues et coordinations hétéroclites constituées pour l'occasion.
La mobilisation a pris de l'ampleur après que le Bloc, syndicat des chirurgiens, a décidé de lancer son préavis de grève illimitée à compter du 12 novembre, le jour choisi par les internes pour défiler à Paris. Ils ont été rapidement rejoints par la Fédération des médecins de France (FMF), syndicat polycatégoriel minoritaire, et surtout par un nouveau venu, l'Union française pour une médecine libre (UFML), une coordination hétéroclite issue du succès rencontré par la page Facebook «Les médecins ne sont pas des pigeons». Et qui fait le buzz depuis sur Internet. Enfin, des syndicats de praticiens hospitaliers, les radiologues et les ophtalmologues se sont agrégés la semaine dernière pour faire du 12 novembre une mobilisation historique dans le corps médical et un test pour Marisol Touraine, la ministre de la Santé.
Diktat des mutuellesQuelle sera la portée du mouvement? Difficile à dire. Le Bloc, qui mobilise peu, n'est pas seul à monter au front. Dans le privé, 70% des cliniques sont touchées, notamment en Ile-de-France, Paca et Rhône-Alpes où plusieurs établissements ont prévu de fermer leurs portes. Les internes fourniront le gros des bataillons de manifestants dans la capitale et perturberont un peu partout le bon fonctionnement des hôpitaux. Ils étaient 10.000 à défiler en 2007 à Paris pour défendre, déjà, leur liberté d'installation.
Les mots d'ordre des grévistes sont divers et variés. Mais un sentiment réunit tous les protagonistes: l'impression d'être «livré à la vindicte populaire», comme l'exprime Jérôme Marty, le président de l'UFML, qui accuse le gouvernement de s'être «attaché à casser le lien sacré avec les patients». Son principal reproche adressé à l'exécutif? D'avoir focalisé le débat sur l'avenir de la profession sur les dépassements d'honoraires. C'était, il est vrai, une promesse du candidat Hollande: limiter ces surtarifications pratiquées par 25% des médecins libéraux et qui alourdissent la facture du patient.
L'accord conclu sur le sujet dans la douleur le 23 octobre - par l'Assurance-maladie avec les complémentaires santé et les syndicats de médecins - aura au final divisé la profession et renforcé le sentiment de la stigmatisation qui avait entouré la négociation entamée début septembre. Si les trois syndicats majoritaires (CSMF, SML et MG France) ayant paraphé le texte n'appellent pas à la grève, le Bloc et la FMF, qui comptent beaucoup moins d'adhérents, militent pour remettre le sujet sur la table. Et demandent à leurs adhérents de cesser le travail pour faire plier l'exécutif. «Des réflexes corporatistes», tacle la CSMF.
Mais la grogne va bien au-delà de la question des dépassements d'honoraires. Les internes réclament que leurs temps de repos, après les 60 heures qu'ils effectuent par semaine, soient respectés. Ils veulent aussi être assurés de conserver leur liberté d'installation à la fin de leurs études et ne pas subir un quelconque diktat des mutuelles. À l'instar du Bloc et de l'UFML, ils redoutent que la future loi sur les réseaux de soins oblige les patients couverts à aller chez un médecin sélectionné par leur complémentaire santé pour être mieux remboursés, annihilant les libertés de choix du malade et d'exercice des médecins.