Les ténors du PS tirent la sonnette d'alarme

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Les ténors du PS tirent la sonnette d'alarme

Mis à jour le 02/11/2012 à 11:29 | publié le 01/11/2012 à 19:56


François Hollande, Gérard Collomb (à droite) et François Rebsamen (au centre), en octobre au Sénat, à Paris.

Les mises en garde, plus ou moins feutrées, de poids lourds socialistes inquiets se multiplient.

Début juillet, à l'Élysée. Un hollandais historique, poids lourd de la majorité, va voir François Hollande. Il veut le mettre en garde et ne mâche pas ses mots. «L'état de la France est catastrophique, commence-t-il. C'est l'héritage de la droite. Il faut le dire, l'expliquer aux Français, faire de la pédagogie. Si on ne fait pas ce boulot, dès la rentrée, on dira que tout est notre faute. Tu verras, on sera responsables des plans sociaux, du chômage… on sera responsables de tout!» Le président hoche la tête: «Ça, il faut le dire à Jean-Marc…»

Le messager reprend son bâton de pèlerin et va frapper à la porte de Matignon. Il lance le même avertissement au premier ministre. Réponse de celui-ci: «Tu sais, il faut être un peu optimiste! Si on noircit trop le tableau, ça va casser le moral des Français…» Conclusion de ce poids lourd de la majorité, quatre mois après ces vaines mises en garde: «Nous n'avons pas fait ce travail de pédagogie en juillet. On a fait comme si le rapport de la Cour des comptes (remis au gouvernement en juin, NDLR) avait soldé l'état de la France. Aujourd'hui, c'est trop tard. Les gens ne veulent plus qu'on leur parle de l'héritage Sarkozy. Ils veulent passer à autre chose. Et on se retrouve dans l'œil du cyclone.»

Avertissements

Une situation alarmante que vient encore confirmer le dernier baromètre TNS Sofres-Sopra Group pour Le Figaro Magazine. En un mois, les cotes de confiance de Hollande et Ayrault reculent respectivement de 5 % et 7 %. Seulement 36 % des personnes interrogées font confiance au chef de l'État. À l'exception de Jacques Chirac en 1995, aucun président n'avait été aussi impopulaire si vite. Quant à Jean-Marc Ayrault, il ne recueille que 34 % d'adhésion. Un point de mieux qu'Alain Juppé en 1995.

Ce poids lourd visionnaire n'a pas été écouté à temps par le couple exécutif. Il a donc décidé de rendre publics ses avertissements, rejoint par d'autres ténors du PS, inquiets du décrochage de Hollande et d'Ayrault dans les sondages. C'est la présidente de la région Poitou-Charentes, Ségolène Royal, qui a sonné la charge dans Le Monde, peu avant le congrès de Toulouse. «C'est le moment de donner le cap, après les bonnes décisions d'urgence, (…) les Français ont besoin de comprendre le sens des efforts qui leur sont demandés», a-t-elle averti. Le président du groupe PS au Sénat, François Rebsamen, lui a emboîté le pas, conseillant à François Hollande dans Les Échos de se rendre «régulièrement en province, comme le faisait François Mitterrand». «Pas besoin de grands discours ou de grandes thématiques, mais de rencontres simples et fréquentes. Sa capacité d'écoute, son empathie naturelle sont des atouts (…). Il doit les montrer aux Français», a-t-il argué.

Lors du congrès, Rebsamen a enfoncé le clou: «Nous avons fauté collectivement en ne rappelant pas systématiquement dans quel état cette droite arrogante a laissé la France!» a-t-il lancé en appelant le PS et l'exécutif à plus de «pédagogie». Quant à Gérard Collomb, il n'a de cesse d'appeler le gouvernement à accélérer. Le maire de Lyon a une nouvelle fois témoigné de son impatience à Toulouse: «Ce qui compte pour nos concitoyens, ce ne sont pas les mots, ce sont les actes.» «Il faut dire ce qu'on pense», confie le maire de Lyon.

Loin des micros, les critiques sont plus directes encore. «Beaucoup commencent à se poser des questions, note un grand élu local PS. On a une difficulté collective à fixer un cap. On est en zig-zag.» Un proche de Hollande le reconnaît: «Aujourd'hui, quand on fait les marchés, on s'en prend plein la figure. Les gens nous disent qu'ils sont déçus. Si la base réagit comme cela, c'est inquiétant. Les grands élus ont peur. Ils commencent à se replier sur leurs fiefs locaux.» Les ministres, eux, n'ont plus qu'un mot à la bouche: «pé-da-go-gie». «Dans une période comme celle-là, il faut pouvoir s'expliquer de manière régulière avec les Français», admet le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll.

François Hollande aura sans doute entendu ces mises en garde. Le chef de l'État compte densifier ses visites de terrain, selon l'un de ses proches. Il se rendra à Chelles (Seine-et-Marne) le 8 novembre pour assister aux premières signatures des emplois d'avenir. Le 15, il donnera une conférence de presse afin de remettre en perspective son action. Mais il n'a pas l'intention d'accélérer le tempo pour autant. «J'assume cette méthode (de négociation et de dialogue social), confie-t-il auMonde daté de jeudi. Il faut prendre le temps de décider. Car, une fois que c'est décidé, c'est fait. Regardez Sarkozy, il a mis trois ans à détricoter le bouclier fiscal!» Un proche du président acquiesce: «Attendez un an ou deux ans que l'on ait les premiers résultats!» À regarder les sondages, les Français ne semblent pas prêts à patienter aussi longtemps.