WEB - GOOGLE - ACTUALITÉ Société
Spectaculaires interpellations après la tuerie d'Échirolles
Mis à jour le 02/10/2012 à 12:56 | publié le 01/10/2012 à 20:24
Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls au sortir d'une réunion à l'hotel de police de Grenoble mardi
En déplacement à Grenoble, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a qualifié le drame d'Echirolles de «massacre» et a annoncé l'ajout du quartier de Villeneuve au dispositif de Zone de sécurité prioritaire.Après le meurtre à l'arme blanche de deux jeunes près de Grenoble dans l'Isère, la police a interpellé une dizaine de personnes mardi matin dans le cadre de leur enquête, au lendemain de la promesse de François Hollande de «retrouver les auteurs de ces crimes odieux».
Sur place, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a rencontré lundi soir le maire d'Echirolles, mais aussi les enquêteurs de la Sécurité publique. Il a passé le reste de la soirée avec l'état-major local de la police puis a tourné une partie de la nuit avec la BAC dans les quartiers chauds de Grenoble. Mardi, le ministre a annoncé l'intégration de Villeneuve, banlieue sensible à cheval entre Grenoble et Echirolles , au dispositif de Zone de sécurité prioritaire (ZSP), après ce qu'il a appelé un «massacre». «Elles concerneront évidemment ces quartiers, pour mieux coordonner le travail des forces de l'ordre, pour mobiliser l'ensemble des acteurs», a-t-il déclaré. Il a annoncé par ailleurs l'ajout de «moyens supplémentaires, notamment en matière de voie publique».
Mais l'entourage du ministre, qui devrait rentrer dans l'après-midi sur Paris, est beaucoup plus évasif sur le calendrier. La Villeneuve sera-t-elle incluse dans la deuxième vague de ZSP prévue pour 2013? «Pas de précision à ce stade», confie prudemment un membre influent de son cabinet.
Le terme «massacre» utilisé par Manuel Valls a été critiqué par les avocats des gardés à vue qui dénoncent une surenchère «sarkoziste». Ronald Gallo, l'avocat de deux gardés à vue a déclaré qu'il «faut d'abord connaître qui a fait quoi et comment, a-t-il déclaré. Qualifier ces faits de massacre augmente la douleur des familles». Pour Me Gallo, l'arrestation de ses deux clients, un majeur et un mineur, est basée sur des suspicions qui résultent de rumeurs». Selon lui, le coup de filet réalisé dans la matinée a été fait pour «effrayer les gens en espérant une réponse salutaire pour le dossier».
Ces interpellations ont essentiellement eu lieu à La Villeneuve, selon une source proche de l'enquête interrogée par l'AFP. Une majorité d'entre eux sont de jeunes adultes âgés de 18 à 21 ans, a précisé une source policière. Deux autres interpellations avaient eu lieu lundi après-midi, dans l'agglomération grenobloise, à Varces, et à Hyères, dans le Var. Une mère de famille a été interpelée mardi matin, après que ses deux fils militaires aient été arrêtés la veille. Tous deux originaires du quartier grenoblois de La Villeneuve, ils sont soupçonnés d'avoir participé au lynchage, et ont été placés en garde à vue et conduits à Grenoble.
Cependant les enquêteurs progressent méthodiquement. «Les faits se sont déroulés dans un quartier sensible où tout peut vite dégénérer», explique un policier qui garde en mémoire les trois nuits d'émeutes de 2010 au cours desquelles la cité de Villeneuve, à cheval sur Échirolles et Grenoble, avait basculé dans la violence. «Ces jeunes sont désœuvrés et prêts à commettre bien des méfaits», poursuit-il. Jusqu'à tuer en montant une expédition punitive? Vendredi dernier, Kevin et Sofiane sont ainsi tombés sous les coups de leurs agresseurs, une quinzaine de jeunes munis de couteaux, de manches de pioche, de marteaux et battes de base-ball. «Vers 21 heures, ils étaient avec des copains dans un square et avaient prévu de se rendre au restaurant. C'est alors qu'ils ont été sauvagement attaqués», raconte un proche de l'enquête.
Depuis cette rixe mortelle, les policiers remontent le fil de l'histoire pour confondre les auteurs du lynchage. «Nous connaissons les victimes, les raisons pour lesquelles elles ont été agressées: autant d'éléments précieux permettant de définir un périmètre d'investigations», raconte un spécialiste de ces dossiers.
Aspergé de gaz lacrymogèneAinsi Kevin avait, une heure plus tôt vers 20 heures, sommé deux jeunes de présenter leurs excuses à son frère cadet, Wilfried, frappé et aspergé de gaz lacrymogène par l'un d'eux. Un ordre qui avait déplu et qui avait été perçu comme un affront. Une heure après, donc, les coups s'étaient abattus volontairement sur Kevin. «Sofiane a été pris pour cible parce qu'il était le copain de Kevin et qu‘il était là au mauvais moment», lâche un proche du dossier.
Cette mise à mort, réalisée en bande, oblige aussi les enquêteurs à procéder avec méthode, afin d'identifier clairement les auteurs et déterminer les rôles de chacun. En parallèle des auditions de témoins, un important travail de police technique et scientifique est alors en cours. La recherche de trace ADN est effectuée sur les vêtements et les corps de Kevin et Sofiane. «S'agissant d'agressions commises à l'arme blanche, il est fréquent que les auteurs se blessent et laissent du sang sur leurs victimes», indique Isabelle Trouslard, conseillère technique pour le syndicat Synergie-officiers et ancienne de la brigade criminelle de Paris.
Par ailleurs tout un travail autour de la téléphonie est aussi en cours. «S'il y a des caméras, les policiers vont également analyser leurs images, à la recherche des membres de cette bande armée», poursuit la spécialiste. Quant aux armes utilisées lors de l'expédition, elles seront une priorité au cours de perquisitions menées en même temps que les interpellations.