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L'assemblée élue prend le pouvoir en Libye
Publié le 9 août 2012 à 01:02 (Mis à jour: 08:10)
Moustapha Abdeljalil, qui présidait le Conseil national de transition, lors de la passation de pouvoir au Congrès issu des élections de juillet, le 8 août 2012 à Tripoli.
Élue le 7 juillet dernier, cette assemblée va diriger le pays après quarante ans de dictature Kadhafi. Sa première mission sera de forger une nouvelle Constitution, avant d'organiser de nouvelles législatives.Le Conseil national de transition (CNT) en Libye a remis mercredi soir les pouvoirs à l’assemblée issue des élections du 7 juillet, lors d’une cérémonie historique marquant la première transition pacifique après plus de quarante ans de dictature de Mouammar Kadhafi.
La cérémonie a été ouverte par des sourates du coran puis l’hymne national entonné par une chorale d’enfants, en présence de représentants des missions diplomatiques en Libye, ainsi que des membres du CNT et du gouvernement et des chefs de partis.
«
Je remets nos prérogatives constitutionnelles au Congrès général national qui est désormais le représentant légitime du peuple libyen», a déclaré le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, en remettant symboliquement le pouvoir au doyen des 200 membres du Congrès général national (CGN) élus il y a un mois lors du premier scrutin libre en Libye.
Peu avant, les 200 membres ont prêté serment devant le président de la Cour suprême libyenne. «
Maintenant le CNT n’existe plus. Il est dissout», a déclaré à l’AFP Othman Ben Sassi, membre du Conseil.
En raison du mois de jeûne de ramadan, la cérémonie a commencé tard dans la nuit dans une luxueuse salle de conférence d’un hôtel de la capitale libyenne. Une autre salle aménagée au deuxième étage de cet établissement sera désormais le siège du CGN.
Lors du feu d’artifice marquant le premier anniversaire de la prise de Tripoli, le 8 août 2012.
Une présentatrice non voilée mise à l'écartUn incident a toutefois eu lieu lorsque Moustapha Abdelajalil a ordonné le remplacement d’une jeune femme non voilée qui présentait le programme de la cérémonie de passation de pouvoir. La présentatrice, les cheveux découverts, a été contrainte de laisser sa place à des membres du CNT qui se sont succédés par la suite sur la tribune.
«
Nous croyons dans les libertés individuelles et nous les consolidons mais nous sommes musulmans et nous sommes attachés à nos principes. Tout le monde doit comprendre ce point», a déclaré Abdeljalil sans autre précision, avant de prononcer son discours. L’incident est passé inaperçu par la plupart de l’assistance, dont la plupart n’ont pas compris la remarque de Moustapha Abdeljalil.
Le chef du CNT, connu pour ses orientations islamiques notamment en ce qui concerne les femmes, avait déjà suscité la controverse, lors de la proclamation de «
la libération» du pays du régime de Mouammar Kadhafi en octobre dernier, en affirmant que la charia serait source de législation dans la nouvelle Libye, en citant notamment le droit à la polygamie «
sans conditions».
A l’issue de la cérémonie qui n’a duré finalement qu’une quarantaine de minutes, les membres du Congrès ont été appelés à rester dans la salle pour leur première réunion officielle au cours de laquelle ils devraient élire un président et deux vice-présidents de l’a de l’assemblée.
Orientation incertaine au Congrès«
Il faut qu’on choisisse un président ce soir ou demain pour éviter un vide constitutionnel», a précisé à l’AFP un des membres du CGN.
Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été mises en place à cette occasion, notamment après une escalade de la violence dans plusieurs régions du pays ces derniers jours.
Le ministère de l’Intérieur a ainsi bouclé le périmètre de l’hôtel et toutes les routes proches ou menant à la salle de conférences ont été fermées à la circulation.
Militaires libyens devant le bâtiment où se tenait la cérémonie de passation de pouvoir, le 8 août 2012 à Tripoli.
Le CNT actuellement au pouvoir était l’organe politique de la rébellion qui a fait tomber le régime de Mouammar Kadhafi, avant de prendre officiellement la tête du pays avec la chute du Guide libyen, tué en octobre dernier après plus de quarante ans au pouvoir.
Dans son discours, Moustapha Abdeljalil a salué «
une première passation de pouvoir dans l’histoire de la Libye» qui représente un «
moment historique» pour les Libyens.
Il a reconnu des «
erreurs» durant une période de transition «
exceptionnelle» et un «
retard dans le traitement de certains dossiers», notamment ceux de la sécurité, du désarmement. Selon lui, le CNT a échoué aussi à trouver une solution au dossier des déplacés du conflit libyen à l’intérieur et à l’extérieur du pays, qu’il a qualifié de «
véritable drame».
«
Nous n’avons pas pu garantir la sécurité comme nous le souhaitions et comme le désirait le peuple libyen», a-t-il ajouté.
Il a annoncé par ailleurs qu’il prenait sa retraite et qu’il quittait ses fonctions au CNT et dans le Conseil supérieur de magistrature dont il était membre sous le régime de Mouammar Kadhafi.
Le CGN sera chargé de choisir un nouveau gouvernement pour prendre le relais du CNT, qui devrait être dissout lors de la première session du Congrès. Il devra conduire le pays à de nouvelles élections sur la base d’une nouvelle Constitution.
L’Alliance des forces nationales (AFN), une coalition de plus de 40 petits partis libéraux menée par des architectes de la révolte de 2011 contre le colonel Kadhafi, détient 39 sièges sur les 80 réservés à des partis politiques.
Le Parti de la justice et de la construction (PJC), issu des Frères musulmans, est la deuxième formation politique du Congrès avec 17 sièges.
Les 120 sièges restants ont été attribués à des candidats indépendants aux allégeances et convictions encore floues mais qui sont très courtisés par les partis.
«
Durant les premières réunions, nous allons voir plus clair concernant les orientations de chacun des membres. Maintenant c’est le flou total», a indiqué à l’AFP Salem Ali Al-Hammali, un membre du Congrès et de l’AFN.
Le CNT a conduit une période de transition mouvementée marquée par des violences, après son échec à intégrer ou désarmer les ex-rebelles ayant combattu le régime de Kadhafi, et s'étant organisés par la suite en milices lourdement armées qui font la loi dans le pays.