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Libération attendue pour l'ex-commissairee Neyret
Mis à jour le 18/05/2012 à 11:10 | publié le 17/05/2012 à 19:46
Le commissaire Michel Neyret (ici en mai 2011 à Lyon) aurait notamment piraté des fichiers de police au profit de ses connaissances douteuses.
La cour d'appel examine mardi la validité des écoutes, élément clé de l'accusation. La fin du crépuscule carcéral du commissaire Michel Neyret semble programmée. Dès mardi prochain, en effet, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris rendra sa décision sur les requêtes en nullité déposées dans cette affaire qui a ébranlé la police. Elles visent en particulier la validité procédurale dans laquelle ont été effectuées les écoutes téléphoniques qui accablent l'ancien numéro deux de la PJ de Lyon. Pour lui, le rendez-vous judiciaire est capital.
Selon nos informations, il a été entendu à deux reprises, pendant plus de six heures à chaque fois, le 2 mai et mercredi dernier par les juges instructeurs Gachon et Robert sur le fond du dossier. Pendant ces interrogatoires-marathons, «notre client s'est expliqué de façon précise et circonstanciée, détaillant chaque fait au scalpel», précise Me Gabriel Versini, l'un des deux avocats de la défense. Sans attendre, une troisième demande de remise en liberté a été déposée et sera examinée dans la foulée.
Cet acte pourrait marquer une étape essentielle pour le présumé «flic ripou», mis en examen le 3 octobre dernier pour «corruption» et incarcéré dans la foulée à la maison d'arrêt de la Santé. Là, dans sa cellule du quartier VIP, le très médiatique détenu a pris l'habitude de côtoyer des pensionnaires affichant tous, eux aussi, une singulière postérité médiatico-judiciaire.
Discussions avec Samy NaceriSelon un de ses amis avec qui il entretient une correspondance épistolaire, Michel Neyret a notamment «beaucoup discuté» avec l'acteur Samy Naceri, avant que ce dernier ne soit relâché en mars dernier. Il a aussi été d'un commerce courtois avec le vicomte Amaury d'Harcourt, issu d'une des plus illustres familles françaises et condamné pour complicité d'assassinat de Bernadette Bissonnet en 2008. Causant parfois volontiers avec l'ancien dictateur panaméen Manuel Noriega, l'ex-«divisionnaire» s'est refusé à croiser le terroriste international Ilich Ramirez Sanchez, alias Carlos. Par principe, on ne parle pas à un tueur de flics.
Pour tuer le temps, celui que l'on a volontiers décrit comme le «flic à l'ancienne» qui n'a pas hésité à se mouiller pour «faire des belles affaires» lit les dizaines de lettres qu'il reçoit chaque semaine. «Il a reçu plus de 800 courriers depuis qu'il est derrière les barreaux, essentiellement des messages émanant souvent de collègues qui lui permettent de tenir», assure-t-on dans son entourage. Sur Internet, un «comité de soutien» a déjà recueilli 1 436 messages .
En préambule, une affiche réactualisée tous les jours qui mentionnait hier «227e jour de détention» à côté d'une photo de l'ex-commissaire et d'un croquis du tigre de Clemenceau versant une larme. Ensuite quelques lignes sonnant comme une épitaphe: «Empêcher la pègre, les voyous qui nuisent à la tranquillité et à la sécurité des citoyens, telle a toujours été la volonté de Michel Neyret. Il considérait la police comme un sacerdoce et lui a constamment donné le meilleur de lui-même. Cet homme exceptionnel, attaché tout entier à son métier, vient de tomber victime de sa lutte contre le grand banditisme.»
Icône «calcinée»Depuis le début de l'affaire, Michel Neyret ne change pas d'un iota sa ligne de conduite. «Il rappelle qu'il a tout donné à la police, jour et nuit, pour interpeller des dizaines de voyous et permettre la saisie de centaines de kilos de drogue, martèle un de ses amis. Il concède des imprudences en côtoyant de trop près certains malfaiteurs, mais réfute toute idée d'enrichissement personnel.»
Englué dans des soupçons de pots-de-vin et trafics d'influence, l'ex-«superflic» est cependant «accroché de manière accablante lors d'interceptions téléphoniques». En fait, son nom a commencé à fleurir lors d'écoutes ayant permis à la PJ parisienne de découvrir 111 kg de cocaïne fin novembre 2010 dans un appartement de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) appartenant à un membre de la famille royale saoudienne.
Depuis qu'il est dans la nasse, Neyret s'est vu reprocher d'avoir côtoyé le milieu d'un peu trop près, acceptant une montre Cartier de 28.000 euros, le prêt d'une villa sur la Côte d'Azur, une semaine à Marrakech ou des costumes façon milord d'une valeur globale de 40.000 euros. «Ces goûts du luxe ne collent pas avec le train de vie de Neyret, confie au
Figaroun de ses ex-collègues lyonnais. Il n'était jamais aigri ni envieux. Parfois, il donnait juste l'impression d'une certaine lassitude, interpellant les rejetons des voyous qu'il avait mis en prison. Il a peut-être voulu rompre avec la routine.»
Pour sa hiérarchie, l'icône est aujourd'hui «calcinée». Un rapport de l'Inspection générale des services (IGS, «police des polices») dévoilé par
Paris Match laisse apparaître que Neyret aurait piraté plus de cent fois le fichier Stic de la police et à sept reprises celui d'Interpol pour renseigner ceux qu'il appelait volontiers ses «amigos». Des gens à la réputation sulfureuse, dont Gilles Benichou et Stéphane Alzraa, escrocs présumés mis en examen et également placés derrière les barreaux. «Neyret vivait de manière monacale, soutient mordicus Me Gabriel Versini. Nous avons toujours contesté qu'un quelconque service puisse avoir été monnayé contre des espèces sonnantes et trébuchantes. Le commissaire a bénéficié de faveurs (…), mais jamais du moindre centime.»
L'ex-star de la PJ lyonnaise, qui a passé les fêtes de Noël derrière les barreaux, espère bien recouvrer sa liberté avant l'été. Restera à définir les contours de son contrôle judiciaire, qui pourraient s'annoncer assez resserrés. D'ores et déjà, biographes et journalistes sont sur les rangs pour écrire la bio d'un flic déchu, autrefois flamboyant et qui a mordu la ligne jaune.