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Publié le 26/04/2012 à 22h06
UE : Hollande accroît son crédit François Hollande en décembre 2011.
Récit : La proposition du candidat PS d’imposer la croissance au cœur du traité d’austérité séduit de plus en plus de dirigeants de l’Union.L’Union vote-t-elle François Hollande ? Depuis quelques jours, plusieurs responsables européens et nationaux, pourtant conservateurs et libéraux, semblent se rallier aux thèses du candidat socialiste en appelant l’UE à donner la priorité à la croissance sur l’austérité. Hollande n’a ainsi pas manqué de se réjouir de la sortie de l’austère président de la Banque centrale européenne (BCE), qui, mercredi à Bruxelles, a plaidé devant le Parlement européen pour un
«pacte de croissance». Mario Draghi a même laissé entendre qu’il n’était pas hostile à une renégociation du traité d’union budgétaire, justement réclamée par Hollande :
«Nous avons un pacte budgétaire […]. Nous devons revenir en arrière et en faire un pacte de croissance.»Jean-Claude Juncker, le président de l’Eurogroupe et Premier ministre (social chrétien) du Luxembourg, a surenchéri :
«Il est évident qu’il faut compléter la politique européenne par une stratégie de croissance. Ce n’est pas nécessairement une affaire de traité, mais c’est une affaire à traiter.» Même la mère du traité d’union budgétaire, la chancelière allemande, Angela Merkel, a semblé s’adoucir en reconnaissant dans la foulée que
«nous avons besoin de croissance, de croissance sous forme d’initiative pérenne». Le chef du gouvernement italien, Mario Monti, a lui aussi appelé, hier, à une politique de soutien à la croissance. Pour Hollande, cela ne fait donc aucun doute : sa probable élection sera
«décisive pour l’Europe», comme il l’a dit mercredi.
Purge. La perspective de l’élection à la tête de l’Etat français d’un socialiste aurait-elle suffi à faire basculer l’équilibre idéologique d’une Union largement de droite (sur 27 pays, seuls 8 gouvernements comptent des socialistes dans leur rang, en incluant l’Italie et la Grèce) ? Le résultat de Marine Le Pen, après les succès récents des populistes dans plusieurs Etats membres, a-t-il joué le rôle d’un électrochoc ? En réalité, les responsables européens n’ont pas attendu le succès de Hollande au premier tour pour s’interroger sur la pertinence d’une stratégie fondée uniquement sur l’austérité budgétaire. Après deux ans de crise au sein de la zone euro, chaque pays a admis, parfois non sans mal, que la purge des comptes publics était une nécessité. Comme le dit le coprésident du groupe Vert au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit,
«on ne peut pas continuer à financer nos économies à crédit en laissant des montagnes de dettes à nos enfants». C’est pour cela que le gouvernement allemand a exigé que l’équilibre des finances publiques soit gravé dans le marbre du traité d’union budgétaire signé par 25 pays le 1
er mars, condition sine qua non pour qu’il accepte d’être solidaire financièrement de ses partenaires au sein de la zone euro.
Mais
«l’austérité seule ne peut pas créer de la croissance, contrairement à ce que croient beaucoup de libéraux», martèle le Belge Guy Verhofstadt, le président du groupe… libéral et démocrate du Parlement européen.
«Il faut une stratégie de croissance pour faire redémarrer la machine économique du Vieux Continent, encalminée dans la récession.» Les marchés eux-mêmes doutent de la pertinence de la voie qu’ils ont pourtant imposée à la zone euro : prenant conscience que l’austérité déprime l’activité et rend plus difficile le retour à l’équilibre des comptes publics, ils ont attaqué les dettes espagnole et italienne. Ce n’est pas un hasard si le président de la Commission, le conservateur José Manuel Durão Barroso, a finalement présenté, le 18 avril, une communication consacrée à la croissance en Europe qui plaide notamment pour l’instauration d’un salaire minimum dans tous les pays européens.
«Formule magique». Cependant, personne n’envisage de remettre en question le traité d’union budgétaire, celui-ci étant d’ailleurs soutenu par l’ensemble des Partis socialistes européens. Un porte-parole de la BCE a précisé qu’il ne fallait pas se tromper sur le sens des propos de Draghi :
«Il a été cohérent avec le message traditionnel de la BCE.» Herman Van Rompuy, le président du Conseil européen, a affirmé hier que ce sont
«les réformes structurelles [qui] feront la différence dans la durée, mais nous devons le dire : il n’y a pas de formule magique, cela prend du temps». Il s’est dit prêt à convoquer un sommet européen extraordinaire au lendemain de la présidentielle française pour en discuter. De fait, il n’y a pas d’argent dans les caisses, ce qui interdit toute relance keynésienne.
«L’Europe doit continuer d’éviter des politiques qui donnent l’impression de relancer la croissance de manière éphémère», a ainsi affirmé Mario Monti, le chef du gouvernement italien, mettant en garde contre des
«résultats illusoires».Au fond, Hollande ne dit guère autre chose :
«Le sérieux budgétaire oui, l’austérité à vie, non», a-t-il déclaré mardi soir. Les propositions qu’il s’apprête à soumettre à ses partenaires, en cas d’élection, visent en réalité à ajouter un volet croissance au traité d’union budgétaire. Elles n’ont guère surpris à Bruxelles, puisqu’elles sont déjà discutées depuis de longs mois et soutenues par la gauche européenne, mais aussi par une partie des libéraux et des conservateurs, que ce soit la création de «project bonds», emprunt européen gagé sur le budget communautaire destiné à financer des projets européens, l’instauration d’une taxe sur les transactions financières, l’accroissement des moyens de la Banque européenne d’investissement ou encore le déblocage des aides régionales non utilisées. Rien qui ne soit
«eurocompatible».