LA TUNISIE ENTRE AUJOURD'HUI DANS LE VIF DU SUJET :
L'Assemblée constituante opérationnelle
Mardi 22 Novembre 2011
Mustapha Ben Jaafar, président de l'Assemblée constituante inaugurée aujourd'hui
Un nouveau chapitre du processus démocratique de la Tunisie sera inauguré aujourd'hui avec la consécration de l'Assemblée constituante issue des élections du 23 octobre.
«Cet événement constitue une deuxième indépendance pour la Tunisie», déclare Ahmed Mestiri, figure politique emblématique de l'indépendance de l'ancien protectorat français en 1956. «C'est le symbole de la rupture avec l'ancien régime et l'installation d'un pouvoir légitime», ajoute cet ancien opposant à Ben Ali.
L'Assemblée composée de 217 élus dominée par le parti islamiste Ennahda (89 sièges) et ses deux partenaires de gauche, le Congrès pour la république (CPR, 29 sièges) et Ettakatol (20 sièges), a pour mandat de rédiger une nouvelle Constitution, la deuxième en Tunisie depuis l'indépendance en 1956. Elle légiférera et désignera un Exécutif jusqu'aux prochaines élections générales.
Les trois principaux partis se sont mis d'accord ce week-end sur la répartition des postes-clés, qui devra cependant être confirmée par l'Assemblée souveraine. Selon l'accord de principe, Mustapha Ben Jaafar, chef d'Ettakatol, devrait accéder à la présidence de la Constituante, Moncef Marzouki, dirigeant du CPR, devrait prendre la présidence du pays, et Hamadi Jebali, numéro 2 d'Ennahda, est appelé à diriger le futur gouvernement.
La séance inaugurale de l'Assemblée se tiendra dans le palais beylical qui abritait l'ancien Parlement au Bardo (10 km à l'ouest de Tunis) et donnera lieu à l'élection ou la cooptation de son président et de deux vice-présidents, un homme et une femme selon la tradition.
Les élus de l'Assemblée devront aussi élaborer et adopter un règlement intérieur qui déterminera son fonctionnement. Le texte devrait se baser sur un projet rédigé par un comité d'experts de la Haute commission des réformes politiques mise en place après la révolution et dissoute le 13 octobre dernier.
Face à la majorité Ennahda/ CPR/Ettakatol, les autres partis de gauche PDP (Parti démocrate progressiste, 16 sièges) et PDM (Pôle démocratique moderniste, 5 sièges) se rangeront dans l'opposition. Des pourparlers ont tardivement commencé entre certains pour la composition d'un front. Une inconnue subsiste sur l'attitude qu'adopteront les élus de «La Pétition Populaire», une formation indépendante totalement inconnue avant les élections, qui a raflé 26 sièges et se retrouve la troisième force de l'Assemblée.
Le dirigeant fantasque de la Pétition, Hechmi Haamdi, richissime homme d'affaires basé à Londres, a annoncé dimanche sur sa télévision Al Mustakilla qu'il «gelait immédiatement ses activités politiques en Tunisie» et n'a donné aucune consigne à ses élus, dont certains s'étaient déjà désolidarisés de lui.
Les autres forces représentées à la Constituante sont l'Initiative, de Kamel Morjane, un ex-ministre de Ben Ali (5 sièges), Afek Tounes (libéraux, 4 sièges), le PCOT (communistes, 3 sièges). Les seize derniers sièges sont répartis chacun entre petits partis et indépendants.
L'enjeu principal de la Constituante porte sur la nature du nouveau régime, les prérogatives et pouvoirs des futurs dirigeants, les uns proposant un régime parlementaire unicaméral (Ennahda) et d'autres un régime présidentiel aménagé ou mixte.
Le gouvernement provisoire de Béji Caïd Essebsi, formé un mois un demi après la fuite de Ben Ali le 14 janvier en Arabie Saoudite, restera en fonction jusqu'à la passation de pouvoir à la nouvelle équipe.