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Grèce : un retraité se suicide sur l'autel de l'austérité
Publié le 05/04/2012 à 11:58
Des dizaines de Grecs sont venus se recueillir jeudi matin autour de l'arbre où l'homme s'est suicidé.
Le désespéré a voulu faire de son geste un symbole politique. Le pays tout entier est sous le choc.
Au lendemain du premier suicide public dû à la crise économique et aux mesures d'austérité, l'opinion publique grecque est sous le choc. Le dessin d'un homme, le pistolet sur la tempe face au Parlement, fait la une du premier quotidien,
Ta Nea. La légende veut qu'il y ait eu un dialogue entre un journaliste et ce retraité de 77 ans qui a mis fin à ses jours mercredi, sur la place Syntagma, devant les passants :
«Je ne supporte pas!
- Qu'est ce que tu ne supportes pas, pépé?
- De voir ce que vous direz sur ce que je m'apprête faire!»
Dimitris Christoulas est le nouveau visage de la crise grecque. Avant de se tirer une balle dans la tête mercredi matin, sur la place centrale d'Athènes, cet ancien pharmacien aurait crié «Je n'en peux plus, je ne veux pas laisser de dettes à mes enfants!». Dans la poche de son manteau, l'homme aurait laissé une lettre reprise dans toute la presse et sur Internet. Le message est sans ambages «Le gouvernement (..) a réduit littéralement à néant mes possibilités de survie, qui étaient fondées sur une retraite honorable pour laquelle j'ai payé seul (sans contribution de l'État) (toute ma vie). Étant parvenu à un âge qui ne me donne pas la possibilité d'une réaction dynamique (sans pour autant exclure que si un Grec attrapait une kalachnikov je n'aurais pas été le second), je ne trouve pas d'autre solution qu'une fin digne, avant que je ne commence à chercher dans les poubelles pour me nourrir. Je pense qu'un jour les jeunes sans avenir prendront les armes et qu'ils pendront les traîtres sur la place Syntagma, comme les Italiens ont fait avec Mussolini en 1945 (sur la place Peretto de Milan).»
Mercredi soir, un millier de personnes se sont recueillies autour de l'arbre où l'homme s'est suicidé. Jeudi matin encore, des dizaines de Grecs continuent d'y déposer des gerbes de fleurs. Pour Giorgos Delastik, analyste politique, au-delà du symbole, le geste est politique. «Pour la première fois, l'intégralité de la classe politique a réagi. Même le premier ministre a envoyé un communiqué. Car cet homme n'était pas fou. Il a décidé de se tuer devant tout le monde, sur cette place où il y a quelques mois encore il manifestait avec les indignés. Les retraités se retrouvent avec une pension misérable et sont étouffés par l'austérité mais n'ont pas la force de crier leur colère», explique-t-il.
Le taux de suicides en Grèce a augmenté de 45% en un an et le désespoir des Grecs inquiète les autorités. «Les gens se ruent vers les hôpitaux psychiatriques, ils ont peur de l'avenir et savent que le bout du tunnel n'est pas proche. Le taux de surendettés qui ne peuvent s'affranchir de leurs dettes ne cesse de croître et la paupérisation de la société est une réalité», reprend Giorgos Delastik. Pour pallier ce phénomène, les associations caritatives internationales s'organisent.
Le Secours populaire de France a commencé hier une mission en Grèce. Un fonds d'urgence de 10.000 euros a été débloqué pour venir en aide à un millier de familles grecques dans les quartiers les plus défavorisés. En collaboration avec le comité pour la solidarité démocratique internationale, d'autres missions devraient être prochainement mises en place.