Le Monde.fr | 19.03.2014 à 06h35 • Mis à jour le 19.03.2014 à 10h58 | Par Laurent Zecchini (Jérusalem, correspondant)
Evacuation d'un soldat israélien blessé, le 18 mars sur le plateau du Golan.
La tension est brusquement montée d'un cran, mercredi 19 mars, à la frontière syro-israélienne : dans la nuit, l'aviation israélienne a bombardé plusieurs positions syriennes, notamment un centre d'entraînement militaire, un quartier général et des batteries d'artillerie. Cette attaque avait valeur de représailles après l'incident qui s'était déroulé la veille sur le plateau du Golan, capturé par Israël au cours de la guerre de 1967, et annexé par l'Etat juif en décembre 1981.
Mardi après-midi, quatre parachutistes patrouillant en jeep sur la frontière, au sud de la ville de Majdal Chams, avaient été blessés lorsqu'une bombe avait éclaté après qu'ils furent descendus de leur véhicule. L'artillerie israélienne avait immédiatement riposté en prenant pour cible des positions de l'armée syrienne, et le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, avait promis « d'agir avec force pour assurer la sécurité d'Israël ». « La frontière syrienne fourmille d'éléments djihadistes et du Hezbollah, ce qui constitue un nouveau défi pour Israël », avait insisté M. Nétanyahou.
ÉVALUATION STRATÉGIQUE DÉPASSÉE
Restée calme pendant des décennies, la frontière syrienne est devenue beaucoup plus instable depuis le début de la guerre civile en Syrie, il y a trois ans. Les responsables militaires israéliens tablaient cependant sur le fait que les parties en présence – le régime Assad et le Hezbollah libanais d'une part, les groupes armés de l'opposition de l'autre – étaient trop occupées à se combattre pour ouvrir un front avec Israël. Cette évaluation stratégique semble aujourd'hui dépassée.
Explosion sur le Golan : quatre soldats israéliens blessés
Quatre soldats israéliens blessés, dont un grièvement, c’est le bilan d’une explosion qui s’est produite sur le plateau du Golan, un territoire du sud-ouest de la Syrie, occupé par l’Etat hébreu. Les hommes ont été touchés alors qu’ils voulaient vérifier un engin suspect près de la clôture qui longe la ligne de cessez-le-feu avec la Syrie. L’armée israélienne affirme avoir riposté par des tirs d’artillerie. Difficile de savoir qui a posé la bombe, en pleine guerre civile, diverses forces sont présentes en Syrie, l’armée mais aussi les milices du Hezbollah, ainsi que des groupes combattant Bachar Al-Assad. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a promis de réagir “avec force” à cet attentat.
L'incident de mardi est le quatrième depuis le début du mois que les Israéliens mettent sur le compte de l'armée syrienne ou du Hezbollah. Vendredi, une mine avait explosé au passage d'une patrouille israélienne sur la frontière avec le Liban, dans la zone de Har-Dov (les fermes de Chebaa). L'armée israélienne avait répliqué par des tirs d'artillerie, en ciblant des positions du Hezbollah au nord de la ville israélienne de Metula, alors même que cette action avait été revendiquée par les extrémistes sunnites de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), qui combattent l'armée syrienne et le Hezbollah.
Un soldat israélien blessé est évacué, dans le village israélien de Masada, le 18 mars.
La multiplication de ces incidents armés – les plus graves depuis la seconde guerre du Liban, en 2006 – est sans doute une conséquence de l'attaque lancée, le 24 février, par l'aviation israélienne contre un convoi d'armements destiné au mouvement chiite libanais, dans la région de la Bekaa. Contrairement à de précédentes opérations de Tsahal en Syrie, ce bombardement avait eu lieu en territoire libanais. Depuis plus d'un an, Israël a lancé plusieurs attaques similaires pour détruire des armements acheminés de Syrie vers le Liban.
« LE RÉGIME ASSAD PAIERA UN PRIX ÉLEVÉ »
Selon une règle tacite, Israël se gardait d'en prendre la responsabilité, ce qui permettait au régime syrien de ne pas répliquer. Avec le Hezbollah, cette discrétion n'est plus de mise. Si Israël a accusé le Parti de Dieu d'être à l'origine de l'embuscade qui a eu lieu mardi – tout en pilonnant des positions syriennes –, rien n'atteste à ce stade une telle responsabilité : il n'est pas exclu que des groupes sunnites extrémistes opposés à Damas, comme le Front Al-Nostra et l'EIIL, veuillent forcer Israël à s'impliquer dans la guerre civile syrienne, pour affaiblir l'armée du régime.
Le Hezbollah étant devenu un allié militaire de poids de Bachar Al-Assad, Israël considère qu'il a désormais un seul front sur sa frontière nord, qui s'étend du Liban à la Syrie et à la région du Golan, et rend le président syrien responsable de tout incident dans la région : « Si le régime Assad continue à coopérer avec les agents terroristes qui cherchent à nuire à l'Etat d'Israël, il paiera un prix élevé », a souligné, mercredi, Moshé Yaalon, le ministre israélien de la défense.