Le Monde.fr avec AFP | 23.02.2014 à 01h17
Une femme arrêtée pendant la manifestation anti-Mondial de football à Sao Paulo, le 22 février.
La police brésilienne a dispersé, samedi 22 février au soir, une manifestation d'environ un millier de personnes contre la Coupe du monde de football à Sao Paulo. « Police terroriste ! » ont crié les manifestants, quand la police est subitement intervenue avec des tirs de bombes lacrymogènes et des bombes assourdissantes.
« Il n'y a même pas une vitre cassée, mais la police a commencé à attaquer tout le monde », a dénoncé sur place un porte-parole de la manifestation. La police a de son côté indiqué qu'une agence bancaire avait été détruite et que trois manifestants avaient été interpellés.
Les incidents se poursuivaient dans la soirée près du Théâtre municipal de Sao Paulo, où des manifestants ont brûlé des poubelles et où la police poursuivait ses tirs nourris de gaz. Au moins 1 000 personnes avaient auparavant défilé sans incident dans le centre de Sao Paulo aux cris de « La Coupe n'aura pas lieu ».
Un manifestant se protège de la police. Derrière lui, de nombreux photographes couvrent la manifestation anti-Mondial de football, le 22 février à Sao Paulo.
De nombreux militants anarchistes radicaux des Black Blocs, vêtus de noir, le visage recouvert, se trouvaient à la tête du cortège, surveillé de très près par un impressionnant dispositif policier.
DES MILLIARDS DÉPENSÉS DANS DES STADES
La convocation de cette manifestation avait été lancée sur le site Internet « Contre la Coupe du monde 2014 », qui se disputera dans douze villes du Brésil, dont Sao Paulo, du 12 juin au 13 juillet.
Les organisateurs dénoncent le « chaos » auquel sont selon eux confrontés les Brésiliens, par manque d''investissements dans la santé, l'éducation ou les transports – des revendications identiques à celles de la fronde sociale historique qui avait secoué le pays en juin 2013, pendant la Coupe des confédérations de football.
« Je suis venue pour protester contre le Mondial. Des millions ont été dépensés pour des stades et en revanche, on ne se préoccupe ni de la santé ni de l'éducation », dénonçait ainsi une manifestante, Fernanda Moreira, 19 ans. Le Brésil aura investi au total environ 11 milliards de dollars dans l'organisation du Mondial 2014, notamment dans la construction des stades.
DÉBATS SUR LE DURCISSEMENT DE LA LÉGISLATION
Fin janvier, une première journée anti-Mondial avait été convoquée dans tout le pays, mais elle n'avait mobilisé qu'à Sao Paulo, où la manifestation s'était terminée par des actes de vandalisme et des heurts violents entre police et manifestants.
Des manifestants protestent contre la Coupe du Monde au Brésil, le 22 février à Sao Paulo.
Le 6 février, une manifestation à Rio de Janeiro contre la hausse du prix des transports en communs a également dégénéré en violences. Un caméraman de télévision y a été mortellement atteint par une fusée d'artifice lancée par des manifestants radicaux. Le décès de ce journaliste a créé une commotion dans le pays et relancé le débat sur un durcissement de la législation contre les auteurs d'actes violents lors des manifestations, ainsi que sur l'adoption d'une loi antiterroriste.
Ces débats suscitent une controverse politique, certains élus craignant que la future loi anti-terroriste ne puisse englober les débordements commis lors des manifestations, au risque de criminaliser de légitimes mouvements sociaux.
La présidente de gauche Dilma Rousseff a souligné la semaine dernière que toute modification de la loi devrait respecter strictement la lettre de la Constitution, « qui garantit la liberté de manifestation, de penser, enfin toutes les libertés, mais qui interdit l'anonymat ». Cette dernière mention pourrait permettre de légiférer sur l'interdiction de participer à une manifestation le visage masqué, comme le font les militants des Blacks blocs.