Style avec M Le magazine du Monde
18 février 2014
On parle toujours de mariage mets-vins comme d'une sorte de graal, comme l'alpha et l'omega du bon goût vinique. C'est parfois important. Un bordeaux avec des poireaux-vinaigrette ne rendra personne heureux. On oublie trop, en revanche, l'importance de boire le vin au bon moment. Selon son âge, selon l'heure de la soirée et son ambiance. J'ai vécu hier un dîner mitigé en la matière.
Apéritif :
Madmoiselle T / ONEIMAN
J'avais complètement craqué sur cette bouteille quand je m'étais rendue sur place. Et j'y avais repensé en voyant une version plus jeune sur le blog vin de Guillaume Deschamps. Des agrumes toniques, des fleurs, quelque chose de frais qui revigore, le même effet qu'un jus d'orange au petit déj' en version apéro. Voilà ce que, naïvement, j'imaginais pour ouvrir la soirée. Hélas les années ont passé et comme en tout, le temps à fait son œuvre. Adieu la fraicheur des agrumes, bye-bye la délicatesse des fleurs. Bonjour la demoiselle fatiguée, bienvenue à la résidence pour seniors Les Acacias. Ce vin pouvait encore tenir debout, on sentait un pamplemousse un peu confit, un peu d'humus aussi.
Il n'était pas mauvais. Il aurait juste été tellement meilleur il y a deux ans. Dans sa prime fraicheur. De l'importance de savoir ouvrir une bouteille à temps.
Apéritif, bis :
Riesling Belzbrunner Dirler / ONEIMAN
Ne voulant pas rester sur un échec, je retourne voir ma cave et, allez savoir pourquoi, j'ai envie d'alsace. C'est cette bouteille qui sort la première, presque par hasard (si vous avez lu mon blog récemment, vous savez que j'ai beaucoup parlé de cette maison, Dirler-Cadé. Parce que je l'aime bien et que je ne me souviens pas avoir été déçue). Je me dis qu'elle va nous donner un coup de fouet. Pas faux. Bonne, elle l'est. Si j'avais relu mes notes de blog sur ma visite chez eux, je n'aurais pas oublié que c'est mon riesling étalon pour la note "pétroleuse". Paf, dès l'ouverture, c'est le riesling classieux et typé qui fait son entrée. Andouille que je suis, c'est au grand cru Kitterlé que je songeais, plus moelleux. Celui-ci était droit comme un I. Mister Impeccable. Mais un choix plus que discutable pour poursuivre l'apéritif. De l'importance de savoir choisir le vin qui correspond à ses envies.
(NB : heureusement, mon frère est venu déjeuner, j'avais de la sole et il restait du vin. On l'a fait couler, il s'est exprimé, on l'a écouté, c'était super.)
Le repas :
Pouilly Fuissé Valette / ONEIMAN
Une super amie qui adore les pouilly-fuissés avait cuisiné un risotto aux champignons, ricotta et poulet. J'ai donc sorti cette jolie bouteille. Je me souviens, ma maman me l'avait acheté quand je débutais ce blog. On l'avait goûté lors d'un dej chez le caviste Lavinia et je m'étais pâmée. Elle coûtait 24€. Le domaine Valette est très réputé dans le Mâconnais, culture bio, vinification la plus naturelle possible, élevages longs, le top. Une merveille dans mon souvenir. Dans le verre hier soir, sa robe était d'un doré très prononcé. À l'œil on lui aurait donné 5 ans de plus. Au goût aussi. Au début il était tout aussi fabuleux que je l'attendais. En plus évolué. Une bouche ample, puissante, crémeuse. Puis, petit à petit, une note oxydative s'est imposée, un accent qui s'apparente au cidre. Pour finir je ne sentais plus que cela. Oxydation prématurée inhérente au vin ou au bouchon, mauvaise conservation ? Je ne sais pas. Mais je l'ai trouvé meilleur au début qu'à la fin. De l'importance de... euh... boire vite ? Non. De ne pas préjuger d'un vin avant de l'avoir bu.
Le dessert :
Vin de paille L'Etoile / / ONEIMAN
Ananas rôtis. Oh, ça me revient, j'ai une moitié de demi-bouteille de vin de paille dans mon frigo ! Château L'Étoile. Mais est-ce que ça conviendra ? Ce sera sucré, oui, mais un vin du Jura n'a pas d'arôme d'ananas, contrairement à un jurançon, par exemple. Puis tant pis, elle est ouverte, autant la finir. Et ben... c'était formidable, mon accord préféré de la soirée ! De l'importance de laisser faire le hasard.