LE MONDE | 29.01.2014 à 11h11 • Mis à jour le 29.01.2014 à 11h37 | Par Marie Charrel et Denis Cosnard
Les IDE, ces mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une filiale à l'étranger, ont crû de 11 % sur l'ensemble de la planète en 2013, pour s'établir à 1 461 milliards de dollars.
Les nouveaux investissements directs étrangers (IDE) en France ont chuté de 77 % en 2013, pour tomber à 5,7 milliards de dollars, soit 4,1 milliards d'euros, selon les données publiées mardi 28 janvier par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).
Ces chiffres, qui raviront les tenants de la thèse du déclin français, sont d'autant plus inquiétants qu'en moyenne, les IDE, ces mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une filiale à l'étranger, ont crû de 11 % sur l'ensemble de la planète, pour s'établir à 1 461 milliards de dollars. « Ils ont enfin retrouvé leur niveau d'avant-crise », souligne les experts de la Cnuced.
Sans surprise, les Etats-Unis restent la première destination des IDE (159 milliards de dollars), désormais talonnés de près par la Chine (127 milliards), tandis que la Russie arrive en troisième position (94 milliards).
TABLEAU CONTRASTÉ
Si le rapport souligne que cette tendance est encourageante, il rappelle que le tableau reste néanmoins contrasté, en particuliers dans les pays développés. En moyenne, les IDE ont en effet augmenté de 12 % dans ces derniers, et même de 61 % au Japon (2,8 milliards de dollars). Mais ils ont en revanche diminué de 28 % en Australie (40 milliards) et 75 % en Nouvelle-Zélande (500 millions).
L'Union européenne est à première vue bien placée, avec une hausse de 37,7 % sur l'année, confirmant que le Vieux Continent est enfin sur la voie de la reprise. L'Allemagne, où le produit intérieur brut (PIB) a crû de 0,4 % en 2013, selon les premières estimations, a ainsi vu les investissements directs quasiment quadrupler sur son territoire par rapport à 2012 (32,3 milliards de dollars). En Espagne, ils ont progressé de 37 % (37,1 milliards), tandis que l'Italie, où ils étaient tombés à 100 millions de dollars seulement en 2012, peu se féliciter d'avoir enfin vu les capitaux revenir (9,9 milliards).
Mais les pays qui ont le plus profité du retour des investissements ces derniers mois sont l'Irlande, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. « Des pays à la fiscalité accueillante, et offrant un environnement très favorable aux établissements et organismes financiers tels que les Fonds commun de créances », souligne le rapport. Ces derniers, également connus sous le nom de special purpose vehicle (SPV), sont régulièrement utilisés dans les opérations de déconsolidation via, par exemple, des opérations de titrisation. Après avoir reculé de près de 169 milliards de dollars en 2012, les IDE vers ces quatre pays ont ainsi rebondi à 100 milliards de dollars en 2013.
APPEL DU PIED
Dans ce tableau, la France fait donc figure d'exception, avec un recul de 77 %. Une tendance inquiétante, confirmant les chiffres publiés lundi 27 janvier par la société Trendeo, qui traque les annonces de création et de destruction d'emploi. En 2013, 263 fermetures de sites industriels ont été annoncées. Pire : les créations d'usines se font également trop rares : 124 seulement en 2013 (– 28 %), le plus faible niveau depuis que Trendeo a commencé à collecter ces données, en 2009.
Certes, l'année 2013 a bien été marquée par quelques bonnes nouvelles en la matière. L'américain Massey Ferguson a ainsi inauguré en novembre à Beauvais (Oise) une nouvelle usine de cabines de tracteurs. Le japonais Kubota a aussi annoncé en décembre 2013 son intention d'investir 40 millions d'euros dans le Nord, afin de construire lui aussi une usine de tracteurs.
Mais l'actualité de ces derniers mois a surtout été dominée par le bras de fer entre Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif, et le patron de Titan, Maurice Taylor, à propos du site de production de pneus Goodyear d'Amiens-Nord. M. Taylor a violemment critiqué le piètre accueil réservé aux investisseurs souhaitant s'installer sur le territoire français. Sur l'année, plusieurs usines importantes, comme celle de PSA Peugeot Citroën à Aulnay (Seine-Saint-Denis) ont également mis la clé sous la porte
Le président François Hollande semble conscient du problème. Lors de ses voeux au corps diplomatique, le 17 janvier, il a ainsi déclaré aux ambassadeurs présents : « Les investissements étrangers sont les bienvenus en France. Si vous connaissez des entreprises qui hésitent entre plusieurs pays, je vous fais confiance pour leur dire que c'est en France qu'il faut venir. » Pas sûr qu'un tel appel du pied suffise…