Le Monde.fr | 14.01.2014 à 16h59 • Mis à jour le 14.01.2014 à 19h14
Lors de la troisième conférence de presse de son mandat, mardi 14 janvier, François Hollande a annoncé l'ouverture de plusieurs chantiers, notamment en matière d'économie. A la première question, qui évoquait sa situation conjugale à l'aune des récentes révélations, le chef de l'Etat a répondu en promettant des clarifications tout en soulignant que « les affaires privées se traitent en privé ».
Fin des cotisations familiales d'ici 2017 pour les entreprises et diminution des taxes
« Je fixe un nouvel objectif : que d'ici 2017, pour les entreprises et les travailleurs indépendants, ce soit la fin des cotisations familiales, ce qui représente 30 milliards d'euros de charges, a annoncé le chef de l'Etat. C'est la condition pour que les entreprises retrouvent de la marge – non pas pour leur faire plaisir, pour leur faire quelque cadeau. »
M. Hollande a également souhaité :
« Donner de la visibilité aux entreprises. Nous fixerons un horizon – 2017 – avec une trajectoire de prélèvements obligatoires pour les entreprises. Mon objectif est aussi une diminution de taxes – qui parfois coûtent plus cher à recouvrer que ce qu'elles rapportent. Un premier axe sera posé pour 2015. »
Le chef de l'Etat a ajouté que le gouvernement engagera sa responsabilité devant l'Assemblée nationale sur un document qui « formalisera les engagements » du pacte de responsabilité proposé aux entreprises. Ces mesures représentent une victoire pour le patronat. En annonçant la fin des cotisations patronales qui financent les allocations familiales - 5,4 % du salaire qui rapportent chaque année 35 milliards d'euros -, M. Hollande a accédé à l'une des principales revendications du Medef.
En ajoutant que cette baisse serait financee par une baisse des dépenses publiques, M. Hollande a même suivi rigoureusement les revendications de Pierre Gattaz, l'actuel président du Medef, même si celui-ci en reclame 100 milliards. Cette baisse des cotisations va se traduire par une diminution importante du coût du travail d'ici 2017. M Hollande espère que ce « pacte de responsabilité » permettra de relancer les embauches.
Les contreparties
Pour M. Hollande, ces mesures doivent être compensées. Les contreparties « doivent être définies au niveau national et déclinées par branche ».
« Elles porteront sur des objectifs chiffrés d'embauche, de travail des jeunes ou des seniors, la formation, les salaires et la modernisation du dialogue social. Un observatoire sera mis en place et le Parlement y sera associé. Un document formalisera les engagements et les modalités de suivi des contreparties. Le gouvernement engagera sa responsabilité devant l'Assemblée sur ce texte, une loi sera votée à l'automne. »
Chômage et emplois d'avenir
« Nous ajouterons 50 000 emplois d'avenir sur 2014 », s'est engagé le chef de l'Etat. Il s'agit d'une mesure phare de la politique de l'emploi du gouvernement. Selon les chiffres du ministère de l'emploi, le cap des 60 000 contrats a été dépassé fin septembre, et l'objectif des 100 000 emplois d'avenir fixé pour 2013 devrait être atteint.
M. Hollande a noté que « depuis six mois le chômage des jeunes a reculé ». « Il y a eu une stabilisation du chômage et une tendance se dessine. Mais nous n'avons pas encore gagné la bataille pour l'emploi », a-t-il reconnu, lui qui a promis tout au long de l'année 2013 une inversion de la courbe du chômage. Il n'a d'ailleurs pas répété cette promesse, mardi.
« Est-ce que j'ai fait des erreurs ? Sans doute. Est-ce que c'était celle d'avoir annoncé ou promis l'inversion de la courbe du chômage ? Mais si je ne l'avais pas fait, beaucoup m'auraient demandé 'mais qu'avez-vous comme objectif' ? »
« Mon seul objectif, c'est l'emploi, a-t-il insisté. Nous n'arriverons à réduire le chômage que s'il y a des créations d'emplois dans les entreprises »
Simplification des normes
François Hollande s'est engagé à « réduire le nombre de normes, les procédures parfois inutiles, trop coûteuses, et de faciliter la prise de décision ».
François Hollande, président de la République, lors de sa troisième grande conférence de presse au Palais de l'Elysée à Paris, mardi 14 janvier.
Organisation territoriale : une réduction du nombre de régions
« Les régions se verront confier dans une nouvelle loi de décentralisation un pouvoir réglementaire local pour [leur] donner encore plus de liberté », a déclaré François Hollande. « Une clarification stricte des compétences sera introduite, a-t-il ajouté. Les collectivités seront également invitées à se rapprocher. Les régions d'abord, dont le nombre peut aussi évoluer. » Les départements « devront redéfinir leur avenir dans les grandes zones métropolitaines ».
Dépenses publiques : mise en place d'un conseil stratégique de la dépense publique
Le chef de l'Etat a annoncé qu'il n'y aurait pas de « transfert de charges des entreprises vers les ménages ». Les économies doivent être « un préalable à toute baisse d'impôts », a déclaré M. Hollande, ajoutant que celles-ci ne doivent pas « se traduire par un transfert de charges de l'entreprise vers les ménages, qui ne le supporteraient pas ». Il a également annoncé la « création d'un conseil stratégique de la dépense publique » qui se réunira chaque mois pour évaluer les politiques publiques.
Sécurité sociale
Concernant la Sécurité sociale, « au cœur de notre pacte républicain et que j'entends préserver parce que c'est le bien commun de ceux qui n'ont pas d'autres bien (...), nous devons lutter contre les fraudes et les abus. Il y en a toujours », a déclaré le président. Mais, a-t-il souligné, ces abus « représentent 600 millions d'euros, moitié du côté des entreprises, moitié de celui de ceux qui utilisent des fonds qui ne sont pas les leurs », et ne sont ainsi pas les principaux responsables du déficit de la Sécurité sociale.
« Ce qu'il faut c'est réduire la multiplication des prescriptions, des actes médicaux redondants, des médicaments qui en France nous font connaître des records de consommation », a souligné M. Hollande, qui avait évoqué le sujet des abus à la Sécurité sociale lors de ses vœux aux Français. « C'est au prix de cet effort que nous pourrons garantir le modèle social de notre service public », a-t-il ajouté.
Le gouvernement assiste à la troisième grande conférence de presse de François Hollande, président de la République, dans la salle des fêtes de l'Elysée. À Paris, mardi 14 janvier 2014 - 2014©Jean-Claude Coutausse / french-politics pour Le Monde
Education
François Hollande a promis des « mesures d'une ampleur inédite » pour rendre « plus attractifs les postes d'enseignants » en éducation prioritaire. Le chef de l'Etat a précisé qu'un plan en faveur des zones d'éducation prioritaire (ZEP) devrait être annoncé mercredi 15 janvier en conseil des ministres. Vincent Peillon, le ministre de l'éducation nationale, devrait divulguer de mesures permettant de mieux accompagner et former les enseignants en ZEP. Il leur accorderait une « décharge horaire » – dont on ignore encore la durée exacte – pour avoir moins de cours à assurer qu'actuellement (dix-huit heures par semaine pour un certifié, vingt-quatre heures face à une classe au primaire) et donc plus de temps pour se concerter, travailler en équipe, etc.
Les jeunes enseignants sont plus nombreux en ZEP qu'ailleurs, et nombreux à tenter de quitter ces territoires dès qu'ils en ont l'opportunité. Trente ans après la création des ZEP, en 1981, aucun gouvernement n'est parvenu à rendre ces postes plus attractifs et à fidéliser les équipes pédagogiques. L'éducation prioritaire concerne 20 % des collégiens, 18 % des écoliers et 2 % des lycéens.
Fin de vie
« Le comité consultatif d'éthique remettra ses conclusions dans les prochaines semaines, la ministre de la santé fera ses consultations dans les prochaines semaines pour qu'un accord le plus large possible puisse être trouvé, sans polémique, sans divisions », a dit le chef de l'Etat. Pour lui, « il s'agit de permettre à toute personne majeure atteinte d'une maladie incurable, provoquant une souffrance psychologique ou physique insupportable, de pouvoir demander dans des conditions strictes une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité ».
François Hollande et Angela Merkel lors d'un sommet à Bruxelles, le 19 décembre.
Propositions franco-allemandes
Saluant le « premier pas » que représente l'instauration d'un salaire minimum en Allemagne, François Hollande a souligné lors de sa conférence de presse que la France devait aussi « harmoniser les règles fiscales, notamment pour les entreprises, entre la France et l'Allemagne ». Mais la France et l'Allemagne doivent également se « coordonner pour la transition énergétique. C'est un grand enjeu pour l'Europe mais nous devons, France et Allemagne, montrer l'exemple », a-t-il ajouté. Enfin, la France et l'Allemagne doivent œuvrer à un « couple franco-allemand qui puisse agir pour l'Europe de la défense », a indiqué le chef de l'Etat.
Intervention en Afrique
« Tout n'est pas réglé, a assuré François Hollande. Je le réaffirme ici : nous allons continuer le travail, dans un contexte forcément différent. D'abord parce que l'Europe va venir. Le 20 janvier il y aura des opérations qui pourront être décidées sur les plans sécuritaires ou humanitaires. Enfin, des initiatives politiques ont été prises. Nous n'avons pas vocation à choisir les dirigeants de la Centrafrique. La France aide mais ne se substitue pas, ce temps-là est révolu. »