Eric Woerth aurait accordé une ristourne fiscale à Bernard Tapie

WEB - GOOGLE - ACTUALITE > Société

Éric Woerth aurait accordé une ristourne fiscale à Bernard Tapie

Publié le 25/10/2013 à 09:28


Eric Woerth.

Selon Libération, l'homme d'affaires a bénéficié de plusieurs dizaines de millions d'euros de réduction d'impôts sur l'arbitrage Adidas grâce à une intervention de l'ancien ministre du Budget.

Bernard Tapie a-t-il bénéficié d'un abattement fiscal exceptionnel sur les 405 millions d'euros obtenus suite à l'arbitrage rendu en sa faveur dans l'affaire Adidas-Crédit Lyonnais ? C'est ce qu'assure vendredi Libération, qui met directement en cause Eric Woerth: l'ancien ministre du Budget de Nicolas Sarkozy aurait accordé à Bernard Tapie une ristourne plusieurs dizaines de millions d'euros en avril 2009. Et ce contre l'avis de l'administration fiscale.

Selon Libération, qui a eu accès au dossier fiscal de Bernard Tapie, le fisc avait proposé au ministre d'arbitrer entre deux scénarios d'imposition pour l'homme d'affaires. Le premier, à 94 millions d'euros, se basait sur une taxation à 33,33% - soit le taux de l'impôt sur les sociétés, l'indemnité reçue suite à l'arbitrage ayant été versée sur les comptes du Groupe Bernard Tapie. Le plus «solide» juridiquement, selon les services de Bercy. Dans le second scénario, élaboré sur une «approche transactionnelle» suite à des négociations avec Bernard Tapie, le taux était réduit à 18,7%.

Pour Libération, Eric Woerth aurait tranché en faveur du scénario le moins contraignant pour Bernard Tapie en y apportant ses propres modifications. Selon le directeur juridique de la direction générale des finances publiques, cité par le quotidien, le ministre «a choisi de gommer le mot ‘net' dans la référence au passif bancaire», faisant passer la déduction fiscale de 83 à 163 millions. Au final, Bernard Tapie n'aurait payé que 11,2 millions d'impôts sur son arbitrage. Soit, selon les calculs Libération, une économie d'environ 89 millions d'euros par rapport au scénario à 33,33%, et de 54 millions d'euros par rapport au projet à taux réduit.

Tapie nie tout cadeau fiscal

Libération livre également le récit de longues tractations entre le camp Tapie et la «cellule fiscale» du ministère du Budget, chargée des personnalités. Le quotidien affirme qu'une des réunions a été organisée à l'initiative de Stéphane Richard, à l'époque directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy et aujourd'hui mis en examen, comme Bernard Tapie, pour «escroquerie en bande organisée» dans l'enquête pénale sur l'arbitrage. L'homme d'affaire et les avocats du Groupe Bernard Tapie y auraient plaidé pour une taxation à 1,67 %, prévue pour les plus-values.

Interrogé, l'homme d'affaires assure qu'«un arrêt récent du Conseil d'Etat reprend mot pour mot l'analyse du cabinet fiscaliste» intervenu pour le compte du liquidateur de sa société GBT (Groupe Bernard Tapie) valide cette thèse. Il estime même que le fisc lui a fait payer «7 millions de trop». «La fiscalité totale sera appliquée le jour où la distribution de ce qu'a reçu GBT me sera faite», explique-t-il. Il dément logiquement tout «cadeau» de la part du ministre du Budget. «Les discussions n'ont pas eu lieu avec Eric Woerth mais avec l'administration fiscale. Et je n'avais de toute façon pas la parole, puisque j'étais en liquidation». Eric Woerth n'a quant à lui pas encore réagi.

En juin, Mediapart avait déjà mis en cause l'ex ministre du Budget en exhumant une lettre adressée aux avocats de Bernard Tapie, dans laquelle il confirmait une imposition de l'ordre de 12 millions d'euros. Sur le plateau de Mots Croisés, le journaliste du site internet, Laurent Mauduit, avait interpellé Henri Guaino sur cette éventuelle ristourne fiscale. Réponse de l'ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy: «Toutes les fortunes de France négocient leurs impôts, vous le savez très bien…»