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Hollande peine à mettre fin à la cacophonie gouvernementale
Mis à jour le 30/09/2013 à 23:43 - Publié le 30/09/2013 à 20:28
Francois Hollande en compagnie de plusieurs ministres, lundi, à Cherbourg.
Le président n'a pas tranché la querelle Valls-Duflot, alors que beaucoup lui enjoignent de réaffirmer son autorité.
Ce n'était ni le moment ni le lieu. François Hollande est resté silencieux lundi sur la polémique sur les Roms, qui déchire son gouvernement et sa majorité depuis plusieurs jours. En déplacement à Cherbourg, il a pris grand soin d'esquiver la presse. «Pas ici mais bientôt», a-t-il tout juste concédé, à l'issue d'une table ronde sur les énergies marines. Mais autour de lui, les ministres cachaient mal leur embarras. «Ce n'est pas à moi de dire si le président doit parler mais j'ai mon avis», lançait Bernard Cazeneuve (Budget), tandis que Philippe Martin (Écologie) reconnaissait qu'il fallait «tarir» la polémique.
Le silence est difficilement tenable pour Hollande, alors que la question de son manque supposé d'autorité revient comme un leitmotiv depuis le début du quinquennat. La question d'un recadrage a été évoquée lundi matin à l'Élysée, lors de la réunion stratégique hebdomadaire. Ses conseillers sont divisés sur l'opportunité de parler. «Il n'est pas un surveillant général dans une cour de récré», s'agace l'un d'eux. «Les messages vont passer (au Conseil des ministres, NDLR)», assure un autre. «C'est délicat, résume un dirigeant PS. Il ne doit pas apparaître comme l'otage des querelles gouvernementales.»
Sur le fond, le chef de l'État aurait également à cœur de clarifier la doctrine de la gauche en matière de sécurité et d'immigration, à l'approche des municipales. Avec un double objectif: faire taire les critiques de «laxisme» nées dans le sillage de la réforme pénale ; et clore le débat entre gauche sécuritaire et gauche droit-de-l'hommiste, réactivé par la polémique sur les Roms. Un grand discours sur la République, la sécurité, la laïcité et l'immigration serait «dans les tuyaux», assure depuis plusieurs semaines l'un de ses conseillers ; ce qu'un autre dément. Un déplacement sur le sujet aurait été ajourné deux fois. «L'épisode Roms retarde le moment ou il le fera», veut croire un député PS.
«Une attitude d'enfants gâtés»
Quoi qu'il en soit, cette dernière polémique est la goutte d'eau de trop pour la majorité, déjà excédée par la controverse autour du «ras-le-bol fiscal» qui s'est refermée comme un piège sur la gauche. «Vous sautez de joie, il n'y a que ça qui vous intéresse: un couac, un couac, un couac!», s'agaçait lundi matin un poids lourd du gouvernement, en sautant sur sa chaise, à la manière d'un de Gaulle sur l'Europe. Avant de reconnaître que l'affrontement entre Duflot et Valls «n'aurait pas dû avoir lieu». «Il faut siffler la fin de la récréation, ajoutait-il. Sinon, on pensera qu'il existe deux lignes au sommet de l'État.»
Depuis la semaine dernière, le député Jean-Christophe Cambadélis est pendu au téléphone pour appeler les députés à «se mobiliser contre cet état de délitement». «C'est insupportable !, rugit le député de Paris. Les ministres ont une attitude d'enfants gâtés. On dirait l'équipe de France en Afrique du Sud! On ne se rend pas compte du tsunami qui nous attend.» «On a franchi un pas dans la dégradation de l'ambiance au sein du gouvernement, renchérit un ténor du Parlement. Ce n'est pas possible d'avoir des ministres qui passent leur temps à se critiquer les uns et les autres. Du jamais-vu!» À contre-emploi, le Parti socialiste qui devrait aiguillonner le gouvernement sur le fond, en est réduit à jouer les gardes-chiourmes sur la forme.
Lundi, le porte-parole du parti, David Assouline, a appelé les ministres à être plus solidaires et éviter les polémiques inutiles. Proches de Martine Aubry, les élus de la «Gauche durable» ont dénoncé, eux aussi, cette multiplication de couacs: «Aux parlementaires, on demande la solidarité avec le gouvernement. En retour, ils goûteraient volontiers à davantage de solidarité des ministres à l'égard de la majorité.» Pour d'autres, et c'est plus grave, cette nouvelle polémique serait révélatrice de la «faiblesse idéologique» de la gauche au pouvoir. «Ce n'est pas en tapant du poing sur la table qu'on reconstruit une idéologie commune, soupire un conseiller. Hollande n'a pas le choix, il navigue à vue.»