WEB - GOOGLE - Actualité > Culture / Loisirs - TV - Actu
Exclusif.
Filippetti : «Radio Sarko et la Télé Elysée, c’est fini»
Aurélie Filippetti présente aujourd’hui son projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel. La ministre de la Culture explique ce qui va changer.
Publié le 24.07.2013, 08h02
Ministère de la Culture (Paris Ier), lundi. Avec sa loi, Aurélie Filippetti souhaite rétablir l’indépendance du CSA et des présidents de l’audiovisuel public.
Une page se tourne dans l’histoire du service public. La ministre de la Culture et de la Communication présente aujourd’hui devant l’Assemblée nationale son projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel. Aurélie Filippetti veut mettre fin à des pratiques qu’elle juge antidémocratiques.
Quelle est l’ambition de ce qu’on va appeler la « loi Filippetti »?
AURÉLIE FILIPPETTI. Il s’agit de rétablir l’indépendance du CSA
(NDLR : Conseil supérieur de l’audiovisuel) et des présidents de l’audiovisuel public, leur impartialité.
Pourquoi garder les patrons actuels de l’audiovisuel nommés par Nicolas Sarkozy? On veut en finir avec Radio Sarko et la Télé Elysée, un système établi à la hussarde et sans concertation. L’indépendance, c’est le respect des gens nommés, même s’ils l’ont été dans de mauvaises conditions. On voit le changement!
Tout pour éviter d’être accusée de mener une chasse aux sorcières? Pour la première fois dans l’audiovisuel, majorité et opposition parlementaire vont être associées dans le choix des membres du CSA. Il faudra une majorité des trois cinquièmes des commissions des Affaires culturelles des deux Assemblées. C’est une avancée majeure. De plus, le président de la République ne choisira plus un patron de chaîne comme par le passé, inacceptable dans une démocratie. Les personnalités nommées devront transcender les clivages droite-gauche.
La pub sur les chaînes publiques reste interdite après 20 heures. Pourquoi êtes-vous opposée à son retour jusqu’à 21 heures sur France 2 et France 3? Ce n’est ni une bonne solution financière ni une garantie d’indépendance. Le gros problème est la baisse des ressources publicitaires avant 20 heures en raison de l’effondrement général du marché publicitaire. La redevance est la seule ressource indépendante du marché. Nous l’avons augmentée l’année dernière, ce n’est pas très populaire mais responsable. Cela a apporté 50 M€.
C’est peu! Les crédits budgétaires de France Télévisions vont diminuer de 2% sur trois ans. Le groupe n’est donc pas mis au régime sec. On nous demande d’être économes avec l’argent public. Il y a des efforts à faire, le président Rémy Pflimlin s’y est engagé, sans qu’aucune des missions de France Télévisions soit remise en cause.
Mais le déficit risque d’atteindre 300 M€ en 2015, comme le craignent certains! On ne peut pas dire ça, et je me demande bien d’où viennent ces chiffres.
Y a-t-il selon vous une chaîne en trop? France 4? France Ô? Non, on a besoin d’un service public fort, diversifié et couvrant un large public. Les chaînes citées ne sont pas très coûteuses. A partir de janvier, France 4 s’adressera en journée aux enfants et à la jeunesse et offrira aux parents la garantie de programmes non violents. En soirée, elle s’ouvrira à de nouveaux publics avec de nouvelles émissions. France Ô devient, elle, la chaîne de l’outre-mer et des ouvertures au monde.
Et France 3? Il faut conforter le rôle essentiel de l’info régionale mais aussi réfléchir à davantage d’émissions régionales sans aggraver les comptes. Une mission sera lancée à la rentrée à ce sujet et devra faire des propositions avant la fin de l’année.
Pas question de renoncer à l’obligation d’investir 20% du chiffre d’affaires en productions françaises? Non. Je tiens beaucoup à ce soutien à la création, malgré le contexte financier difficile. Créer des œuvres audiovisuelles, c’est non seulement une mission, c’est aussi un gage de qualité, une manière de se démarquer.
Comment le CSA va-t-il s’organiser pour lutter contre le piratage des œuvres sur Internet? L’image du CSA va changer, se moderniser à l’heure du numérique. Nous avons mis un terme à la coupure d’accès à Internet d’Hadopi, une sanction disproportionnée. Nous allons mettre fin au système tout répressif d’Hadopi. L’actuel mécanisme de riposte graduée sera transféré au CSA et provisoire. Il faut débloquer le système. C’est, par exemple, l’idée de la discussion lancée avec les professionnels autour du temps qu’il faut attendre entre la sortie d’un film en salles et sa disponibilité en vidéo à la demande via Internet ou en DVD. Je souhaite qu’un accord soit trouvé d’ici à la fin de l’année.
Une information judiciaire a été ouverte pour « favoritisme et prise illégale d’intérêts » pour des contrats de conseil du temps de la présidence de Patrick de Carolis à France Télévisions (nos éditions d’hier). Comment réagissez-vous à cette affaire? Je n’ai pas d’informations sur ce sujet, et une instruction judiciaire est en cours. En revanche, j’ai demandé que soient instaurées des règles déontologiques pour éviter tout conflit d’intérêts en matière de programmes et dans les choix des producteurs pour que la concurrence puisse jouer. Je souhaite aussi la transparence sur les comptes de production. Cela s’impose quand on parle d’argent public.