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Le gouvernement tente de minimiser la dégradation
Mis à jour le 20/11/2012 à 08:24 | publié le 20/11/2012 à 07:55
Le ministre des Finances, Pierre Moscovici, dénonce «les errements du passé».
RÉACTIONS - L'exécutif rejette sur la droite la responsabilité de la perte du AAA français chez Moody's. Jean-François Copé y voit au contraire une sanction du manque de réformes de l'équipe Hollande. Les analystes financiers sont nuancés sur les conséquences à envisager.Dé-dra-ma-ti-ser. C'est la ligne adoptée par l'exécutif, ces dernières heures, après que la France a perdu le triple A que lui accordait encore l'agence de notation Moody's. Signe de cette volonté de minimiser l'affaire, seul Bercy a commenté la nouvelle par communiqué, Matignon et l'Élysée s'abstenant de tout commentaire officiel.
Un proche de François Hollande s'est toutefois exprimé, sous couvert de l'anonymat, auprès de l'agence Reuters. L'information n'a rien de surprenant, argumente-t-il: «Cette dégradation sanctionne les errements du passé. Ce n'est pas une surprise puisque le diagnostic rejoint celui du gouvernement et celui du rapport Gallois», a-t-il affirmé. «Cela valide notre stratégie économique de restaurer notre compétitivité et de mettre en œuvre des réformes structurelles, a-t-il ajouté sous couvert d'anonymat. Jamais un gouvernement n'aura engagé en si peu de temps autant de réformes structurelles en France».
«Les erreurs du passé» sont également pointées du doigt par le ministre des Finances, Pierre Moscovici. Pour ce dernier, «cette décision concerne la situation laissée par nos prédécesseurs: perte de compétitivité, faible croissance, déficit croissant», a-t-il accusé dans son communiqué, publié dans la soirée, instantanément l'annonce de Moody's. Pour échapper à une dégradation, «il aurait fallu une inversion de la courbe» de la dette publique de la France, «ce qui était impossible».
Pierre Moscovici «prend acte de la décision de Moody's» tout en réaffirmant «la qualité de la signature de l'Etat français». Il «rappelle les réformes engagées résolument par le gouvernement qui visent précisément à redresser notre économie: maîtrise des comptes publics, pacte national pour la compétitivité, la croissance et l'emploi ainsi que la négociation en cours sur le marché du travail». «L'économie française est large et diversifiée» et «la dette française demeure parmi les plus liquides et les plus sûres de la zone euro», insiste-t-il.
Une décision «lourde d'inquiétudes»Fraîchement élu président de l'UMP, Jean-François Copé, n'a pas voulu laisser passer cette ligne de défense: «Le gouvernement ne manquera pas de tenter de se défausser sur Nicolas Sarkozy (...). La vérité, c'est que la gauche porte clairement une part importante de responsabilité dans cette dégradation», a-t-il asséné. «Moody's avait placé la France sous surveillance négative suite au projet de loi de finances rectificative pour 2012 défendu par François Hollande en juillet dernier. L'agence de notation, par cette décision, constate que le gouvernement n'a pas engagé les réformes nécessaires pour maintenir la notation de la France», affirme le député-maire de Meaux, tout en précisant que la décision de Moody's «est une mauvaise nouvelle pour notre pays. Personne ne peut se réjouir d'une telle annonce, lourde d'inquiétudes pour la France».
Pas de bouleversement attendu sur les marchésLes analystes économiques se veulent plus rassurants. D'après eux, les marchés ne devraient pas surréagir à l'annonce: «C'est largement intégré. Ce n'est pas en soi très important, mais psychologiquement, ça peut l'être, d'où un possible mouvement d'humeur», explique René Defossez, stratégiste chez Natixis. Pour Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel BGC, «cette décision peut générer une tension sur les taux d'emprunt, mais la France ne devrait pas être pour autant attaquée sur les marchés». Certains investisseurs internationaux pourraient être tentés à court terme de vendre un peu de dette française, mais le double A reste une très bonne note, rappellent-ils.
La banque Citigroup a également publié une note dans laquelle elle affirme que les raisons qui motivent la décision de Moody's - perte de compétitivité entre autre - sont déjà connues. Selon la banque américaine, «peu des arguments par Moody's sont nouveaux et la dégradation reflète une réalité qui s'applique depuis longtemps à la France et à un grand de nombre de pays encore notés AAA».
«La France est loin d'être dans une situation où son accès au marché est menacé», insiste Jean-Louis Mourier. Pour Xavier Timbeau, directeur du département analyse et prévision de l'OFCE, ce qui sauve la France pour l'instant, c'est que le pays «est plus un havre de sécurité pour les placements que d'autres pays». C'est d'ailleurs ce qui «s'est passé pour la première dégradation de la France par Standard & Poor's ou pour les États-Unis», ajoute-t-il. La France a encore un peu de marge de manœuvre sur les marchés puisque le gouvernement a prévu dans le budget 2013 un taux d'emprunt à 10 ans à 2,9% pour l'an prochain, soit très au-dessus de celui auquel il emprunte à l'heure actuelle (les taux à 10 ans s'affichaient à 2,06% lundi soir).
L'euro en baisse baisseSur le marché des devises, les investisseurs digèrent un peu plus mal la nouvelle. A la suite de la décision de l'agence de notation, l'euro s'est retourné à la baisse face au dollar. Ce matin, la devise européenne vaut 1,2789 dollar, en recul de 0,20%.