Cristiano Ronaldo de nouveau Ballon d'or
Le Monde.fr | 13.01.2014 à 20h06 • Mis à jour le 13.01.2014 à 21h52 | Par Yann Bouchez
Cristiano Ronaldo a remporté le Ballon d'or 2013, le 13 janvier à Zurich.
Enfin. C'est ce qu'a dû se dire Cristiano Ronaldo, venu en famille au palais des congrès de Zurich, en Suisse, lorsque le nom du nouveau récipiendaire du Ballon d'or a été prononcé. Après avoir occupé la deuxième place, derrière l'Argentin Lionel Messi, lors des deux dernières éditions, le Portugais du Real Madrid, 28 ans, remporte pour la deuxième fois de sa carrière, après celui de 2008, le titre individuel suprême pour les footballeurs. Avec 27,99 % des votes, il devance l'Argentin Lionel Messi (24,72 %), quadruple détenteur du trophée, le Français Franck Ribéry (23,36 %).
En pleurs au moment de recevoir son trophée, le joueur a déclaré n'avoir « pas de mot » pour décrire ce qu'il ressentait. « Je suis très heureux, je voudrais remercier tous mes camarades de club et de sélection, toute ma famille dans la salle. Ceux qui me connaissent savent combien j'ai consenti de sacrifices pour gagner cette récompense », a-t-il ajouté.
Cristiano Ronaldo n'a pas vraiment feint la surprise. Non seulement parce qu'il était l'immense favori avant même que ne commence la cérémonie, mais aussi parce qu'il ne cache pas que si la remise de la récompense ne tenait qu'à lui, sa collection de Ballons d'or serait beaucoup plus importante. « Je suis sur le podium depuis six ans, ce n'est pas un hasard [il n'y était toutefois pas en 2010] », a-t-il confié au quotidien portugais A Bola, qui l'a sacré personnalité sportive de l'année. « Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Si je mérite de le gagner ? Je crois que je mérite le Ballon d'or chaque année. J'aimerais le gagner à chaque fois, mais je sais que ça ne dépend pas que de moi. »
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69 BUTS EN 2013
Heureusement pour le Portugais, la remise du trophée ne dépend pas non plus du président de la Fédération internationale de football (FIFA). Le 25 octobre, Joseph Blatter avait affiché sa préférence pour l'Argentin du Barça : « Lionel Messi est un bon garçon que tout père ou mère voudrait avoir à la maison. (…) L'autre [Ronaldo] est comme un commandant sur le terrain. (…) L'un [Ronaldo] dépense en tout cas plus d'argent pour ses cheveux que l'autre. (…) J'aime les deux mais je préfère Messi. » Face à la colère des dirigeants du Real Madrid, M. Blatter a dû publier une lettre d'excuses.
En sacrant l'attaquant du Real Madrid, les journalistes, entraîneurs et capitaines de sélection qui ont participé au vote ont salué une saison marquée par des statistiques individuelles exceptionnelles. Puisque « les chiffres parlent d'eux-mêmes », allons-y : le Portugais a inscrit 69 buts en 59 matchs en 2013. Meilleur buteur de la Ligue des champions 2012-2013 (avec 12 réalisations), il domine à nouveau le classement cette saison après avoir marqué à neuf reprises en seulement cinq matchs européens.
Le triplé de « CR7» face à la Suède lors des barrages du Mondial est l'un des événements marquant de l'année 2013 du joueur.
Enfin, avec sa sélection du Portugal, il a éliminé quasiment à lui tout seul, le 19 novembre 2013, en inscrivant un triplé à Stockholm, la Suède de Zlatan Ibrahimovic, lors du match de barrages retour de la Coupe du monde. Cette performance n'aurait pas dû entrer en compte lors du vote, qui devait initialement être clos le 15 novembre. Mais la FIFA, invoquant un nombre de voix recueillies trop faible, a décidé de reporter la date de clôture des votes du 15 au 29 novembre et a même autorisé ceux qui avaient déjà envoyé leurs choix à les modifier. Ce changement de dernière minute avait suscité une intense polémique.
UN BALLON D'OR SANS PALMARÈS
Si Cristiano Ronaldo a affiché des statistiques impressionnantes, son palmarès ne s'est pourtant pas étoffé en 2013. Défaite en demi-finales de Ligue des champions face au Borussia Dortmund, son équipe a perdu la finale de la Coupe du roi face à l'Atlético Madrid et s'est fait distancer par le Barça, vainqueur du championnat au printemps 2013, au terme d'une saison perturbée par les rapports tendus d'une partie du vestiaire madrilène avec l'entraîneur de l'époque, José Mourinho. Sans avoir gagné de titre majeur cette année, Cristiano Ronaldo a devancé Franck Ribéry, auteur avec le Bayern Munich de la meilleure année de sa carrière, ponctuée de nombreux trophées collectifs (Bundesliga, Ligue des champions, Coupe d'Allemagne, Coupe du monde des clubs…).
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Une tendance – déjà criante lorsqu'en janvier 2011 Lionel Messi reçut le Ballon d'or devant les champions du monde espagnols Andrés Iniesta et Xavi – se confirme : le palmarès du Ballon d'or privilégie plus que par le passé les qualités individuelles. Difficile en effet d'imaginer aujourd'hui la récompense d'un défenseur auteur d'une grande compétition au sein d'une équipe performante, comme ce fut le cas de Fabio Cannavaro, Ballon d'or en 2006 après une Coupe du monde remportée en tant que capitaine de l'Italie.
Avec ce deuxième Ballon d'or, Cristiano Ronaldo dépasse ses compatriotes Luis Figo (sacré en 2000) et Eusebio (1965), mort le 5 janvier. Meilleur buteur de la Seleçao, à égalité avec l'ex-attaquant Pedro Miguel Pauleta, le natif de l'île de Madère consolide encore un peu plus sa place dans le football portugais. Il est cependant peu probable que cette énième récompense mette définitivement en sourdine les critiques dont il fait régulièrement l'objet.
UN MAL-AIMÉ AVEC 70 MILLIONS D'« AMIS » SUR FACEBOOK
Car Cristiano Ronaldo ressemble finalement à ses coupes gominées : pour ou contre le gel dans les cheveux, tout le monde a un avis sur la question. Le Portugais a du mal à susciter l'empathie. « Ronaldo, l'homme qui ne savait pas être aimé », titrait le magazine So Foot dans son numéro de décembre-janvier. Dans une chronique du 6 juillet 2013 parue dans Le Monde et intitulée « Génie pas divin », l'écrivain François Bégaudeau estimait que le Portugais entrait, à l'instar du tennisman Rafael Nadal, dans la catégorie « des champions que la foule ne s'interdirait plus de détester s'ils cessaient d'être brillantissimes ». « Nadal n'est pas un bourrin mais il produit le spectacle d'un gars qui passe en force – comme Cristiano Ronaldo. » Le désamour doit cependant être relativisé : avec 70 millions de fans sur Facebook, le Portugais devance largement Lionel Messi (52 millions) en termes de popularité sur les réseaux sociaux.
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Régulièrement décrit comme arrogant et narcissique, le joueur prête parfois lui-même le flanc à la critique, comme lorsqu'il déclara, en 2011 : « C'est parce que je suis riche, beau et que je suis un grand joueur qu'on me siffle. Les gens sont jaloux de moi. Je ne vois aucune autre explication. » L'inauguration d'un musée dédié à sa gloire sur son île de Madère, en novembre 2013, a renforcé cette vision d'un joueur autocentré. Mais ce que l'on sait moins, c'est qu'il a placé à sa tête son frère Hugo, dont il a financé la cure de désintoxication par le passé.
Lire : Cristiano Ronaldo va construire un musée à sa gloire
http://www.lemonde.fr/sport/article/2013/11/19/cristiano-ronaldo-va-construire-un-musee-a-sa-gloire_3516428_3242.html
Meilleur footballeur en 2013, Cristiano Ronaldo prouve avec cette récompense qu'il est un travailleur et un footballeur hors pair. Et que l'on n'aille pas lui souffler qu'il doit en grande partie son Ballon d'or aux nombreuses blessures de Lionel Messi. La condition physique et la rigueur ne sont pas les moindres des qualités de Ronaldo, qui, comme le prétendait le journal espagnol As en 2009, ferait pas moins de trois mille abdominaux par jour. Des chiffres qui « parlent d'eux-mêmes ».
Yann Bouchez
Journaliste au Monde