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NSA: le téléphone de Merkel aurait été sur écoute dès 2002
Publié le 27 octobre 2013 à 09:13 (Mis à jour : 27 octobre 2013 à 09:18)
Angela Merkel consulte son téléphone portable, le 9 novembre 2012 à Berlin.
Après les révélations de Der Spiegel sur une surveillance depuis plus de dix ans par les Etats-Unis, l'Allemagne se lance dans une contre-offensive diplomatique.
L’Allemagne s’engage dans une offensive diplomatique à la suite des révélations sur la surveillance présumée du téléphone portable d’Angela Merkel par les Etats-Unis, découvrant avec déception le nouveau visage de son «
ami américain».
La délégation gouvernementale chargée d’obtenir des explications, dont l’envoi a été annoncé mercredi, doit partir pour les Etats-Unis dans la semaine et comprendra des membres des services secrets, selon la presse allemande samedi.
«
Des représentants de haut rang du gouvernement vont se rendre rapidement aux Etats-Unis afin d’avancer dans les discussions avec la Maison blanche et la NSA sur les allégations récemment évoquées», avait déclaré vendredi le porte-parole adjoint de la chancelière, Georg Streiter.
Selon le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), le chef des services secrets allemands (BND), Gerhard Schindler, sera du voyage, tout comme, selon d’autres médias, Ronald Pofalla, chef de la chancellerie et donc chargé du renseignement.
Résolution conjointe
Parallèlement, l’Allemagne prépare conjointement avec le Brésil une résolution à l’ONU sur la protection des libertés individuelles, selon des diplomates onusiens. Une ébauche de résolution devrait être soumise vendredi prochain à la Commission des droits de l’Homme de l’Assemblée générale des Nations unies.
«
L’espionnage entre amis, cela ne va pas du tout», avait déclaré Mme Merkel lors du sommet des dirigeants de l’Union européenne en fin de semaine à Bruxelles.
L’affaire a été évoquée au cours d’un entretien bilatéral avec le président français François Hollande, les deux dirigeants affirmant «l’un comme l’autre le caractère inacceptable» des écoutes américaines et souhaitant que «
l’on trouve les moyens d’en sortir».
Les révélations sur l’ampleur des programmes de surveillance de la NSA - visant aussi bien des citoyens américains que des chefs d’Etat étrangers - suscitent aussi des inquiétudes aux Etats-Unis sur la supervision d’une agence que certains croient devenue incontrôlable.
Manifestation à Washington
Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi à Washington pour réclamer une nouvelle loi réformant les programmes de la NSA jugés attentatoires à la vie privée.
«
Stoppez l’espionnage de masse», «
Débranchez Big Brother», «
Arrêtez de nous surveiller» étaient quelques-uns des slogans des quelque 4.500 personnes, selon les organisateurs, qui ont manifesté sous les fenêtres du Capitole, siège du Congrès des Etats-Unis.
Les manifestants ont remis au Congrès une pétition signée sur Internet par plus de 575.000 personnes et exigeant que les parlementaires «révèlent toute l’étendue des programmes de surveillance de la NSA».
«
Unité au plus haut niveau», titrait le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung (SZ), soulignant que le scandale avait permis de rapprocher de nouveau l’Allemagne et la France qui ont lancé une initiative commune, soutenue par les autres Européens, pour trouver avec les Etats-Unis un accord d’ici la fin de l’année sur les questions de renseignement.
Angela Merkel «
souhaite que cette nouvelle unité franco-allemande dure» et elle avait «
besoin de quelque chose d’écrit», souligne la SZ, rappelant que la chancelière avait obligation de rapporter un résultat concret du sommet afin de montrer qu’elle et plus largement l’Europe font «
quelque chose contre l’orgie de surveillance américaine».
Rôle ambigu de la France
Dans un autre article, le quotidien bavarois évoque le rôle ambigu de la France dans le cadre des activités de surveillance, affirmant que sous le nom de code «
Lustre», les services de renseignement français ont signé un accord de collaboration avec ceux des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande.
La colère née des révélations sur un possible espionnage du portable de la chancelière n’est pas retombée en Allemagne, où l’on s’interroge sur la confiance qu’elle a jusqu’ici accordée à Barack Obama.
Le doute sera encore alimenté par de nouvelles informations du Spiegel samedi soir: selon des documents de la NSA dont le magazine dit disposer, la chancelière est sur une liste d’écoutes depuis 2002, et l’était encore quelques semaines avant la visite du président américain à Berlin, en juin dernier.
«
Dans un partenariat, il faut être deux», fait remarquer la FAZ, ajoutant: «
Le froid Obama (...) ne doit pas refuser d’expliquer ce qui s’est passé et doit montrer des signes d’un changement de cap, c’est dans l’intérêt des Américains mais aussi d’une politique commune» avec eux.
L’opposition, et notamment les Verts et le parti de la gauche radicale Die Linke, ont demandé une session extraordinaire du Parlement, et reprochent à Mme Merkel d’avoir minimisé le scandale NSA.
Désormais, le ton gouvernemental se veut offensif: «
L’amitié germano-américaine n’est plus automatique», a affirmé le coordinateur du gouvernement allemand pour les relations transatlantiques, Harald Leibrecht, à Die Welt samedi, ajoutant: «
Notre confiance est ébranlée».
Marge de manoeuvre limitée
Mais si l’Allemagne multiplie les initiatives pour marquer son mécontentement, la marge de manoeuvre de la chancelière reste limitée.
Elle n’a pas emboîté le pas aux membres du Parti social-démocrate (SPD) qui ont évoqué une pause dans les négociations sur l’accord de libre-échange entre l’UE et les Etats-Unis à la suite du scandale, craignant les conséquences d’un échec de ces discussions pour les intérêts économiques de l’Europe et de son pays.
Hors Europe, au Mexique, notamment ciblé par la NSA, une ex-ministre des Affaires étrangères, Rosario Green, a estimé que les présidents et chefs d’Etat victimes de l’espionnage américain devraient exiger de savoir quels appels ou courriers électroniques ont été surveillés. «
Les personnalités concernées ont totalement le droit d’exiger, outre des excuses, des preuves», a déclaré Mme Green à l’AFP.