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La réforme des retraites débarque à l'Assemblée
Mis à jour le 07/10/2013 à 10:04 - Publié le 06/10/2013 à 19:21
La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine. Crédits photo : François BOUCHON/Le Figaro
Le projet de loi, qui débarque ce lundi à l'Assemblée, augmente la durée de cotisation et multiplie les dérogations. Le pays reste à la traîne en matière d'âge de départ à la retraite.
Baptême du feu pour la réforme des retraites. Le projet de loi du gouvernement est examiné à partir de ce lundi par l'Assemblée nationale. D'ores et déjà, il est acquis que les députés ne seront pas autorisés à toucher aux mesures phares du texte: hausse dès 2014 des cotisations retraite salarié et employeur - cette dernière étant compensée par une baisse de la cotisation famille -, gel des pensions pendant six mois, allongement de la durée de cotisation après 2020 et prise en compte de la pénibilité…
La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a prévenu qu'elle veillera à ce que l'équilibre du texte, qui doit engranger 7 milliards de ressources nouvelles par an en 2020, sur un besoin de financement de plus de 20 milliards, soit respecté. Tout juste acceptera-t-elle des modifications à la marge, qui n'alourdiront pas la facture à court terme.
Malgré cette première réforme réalisée par un exécutif socialiste, la France restera une exception européenne en matière de retraites. Un particularisme hexagonal symbolisé par un âge légal de départ fixé à 62 ans, quand nombre de nos voisins ont déjà repoussé cette borne en prévision du vieillissement de la population. «Dans l'ensemble, les pays développés s'avancent vers un âge de la retraite de 67 ans», observe Monika Queissler, experte des retraites à l'OCDE. Dernières en date, la Grèce et l'Espagne, poussées par la crise économique historique qu'elles traversent, se sont alignées sur ce nouveau standard.
Six ans de plus à la retraite
La France, elle, a fait le choix inverse en refusant de reculer - comme en 2010 sous Nicolas Sarkozy - tant la borne des 62 ans pour prétendre à une retraite à taux plein que celle de 67 ans pour pouvoir bénéficier d'une retraite sans décote. «La borne de 62 ans définit la norme auprès du grand public et détermine la façon dont les gens se projettent, analyse Monika Queissler. Rien que le passage de 60 à 62 ans en France, lors de la réforme Woerth de 2010, a contribué à changer les mentalités.»
Conséquence, les Français partent en moyenne plus tôt à la retraite que dans les autres pays développés: à 58,7 ans pour les hommes et à 59,5 ans pour les femmes, contre respectivement 63,5 et 62,3 ans dans les pays de l'OCDE. Ils passent aussi six ans de plus à la retraite (28 ans pour les femmes et 24 pour les hommes).
Toutefois, discrètement et à un rythme bien plus lent que la plupart des autres États, la France repousse bien l'âge réel (effectif) de départ à la retraite. Le gouvernement ne le dit pas à Paris, pour ne pas braquer l'opinion de gauche et donner l'illusion de respecter les engagements de campagne du candidat Hollande, mais l'affiche à Bruxelles. Si la nouvelle réforme ne touche pas à la borne des 62 ans, «l'âge effectif de départ à la retraite (…) devrait mécaniquement augmenter avec l'allongement de la durée de cotisation» de 41,5 à 43 ans d'ici à 2035, argumente l'exécutif dans la «Stratégie économique de la France», document envoyé à la Commission européenne en début de semaine dernière. Résultat, «à terme, un assuré qui débute sa carrière à 23 ans (c'est la moyenne en France) ne pourra partir à la retraite à taux plein qu'à partir de 66 ans», chiffre même le rapport.
«Nous faisons de la durée de cotisation la variable principale de notre système de retraite, conceptualise pour sa part Marisol Touraine. Elle sera modulée en fonction des parcours professionnels ou de la formation initiale.» En d'autres mots, le gouvernement Ayrault allonge d'une main la durée de cotisation pour le salarié lambda, mais il crée de l'autre de nouvelles exceptions pour permettre à certains de partir plus tôt. Les salariés qui ont connu des conditions de travail pénibles pourront ainsi partir à la retraite dès 59 ans. À terme, près de la moitié des salariés pourront ainsi prétendre, en fonction des différents dispositifs dérogatoires existants, partir avant l'âge légal affiché. Là encore, une vraie différence avec les pays étrangers…