Bouteflika : 40 jours d’absence et beaucoup de supputations
Par Mourad Arbani | 06/06/2013 | 20:39
L’absence remarquée du président Bouteflika, à l’occasion de la visite du premier ministre turc, Tayyip Recep Erdogan, à Alger mardi et mercredi a, de nouveau, relancé la controverse sur son étant de santé et la « paralysie des institutions » provoquée par cette longue absence.Des médias, comme le quotidien francophone l’Expression ou encore le journal arabophone An Nahar, citant anonymement des « hauts responsables » avaient annoncé quelques jours avant la visite du Premier ministre turc que le président Bouteflika profiterait de cet événement pour apparaitre à la télévision, à l’occasion du diner en l’honneur de la délégation turque.
Finalement, point d’apparition du président Bouteflika ni à la télévision ni au diner, et c’est son Premier ministre Abdelmalek Sellal, projeté sur le devant de la scène politique, qui a été à la manœuvre pour cette visite, programmée de longue date, du haut responsable turc. Et du coup la polémique est donc relancée, alors que nous sommes déjà exactement à 40 jours d’absence du chef de l’Etat.
Si les responsables officiels se sont bien gardés depuis au moins une semaine de communiquer sur l’état de santé du président Bouteflika, après avoir assuré qu’il était « en bonne santé » qu’ « il va rentrer bientôt », c’est à nouveau Louisa Hanoune qui est montée au créneau affirmant « j’ai des informations que je tiens d’un haut responsable de l’Etat qui m’a assuré que l’état de santé du président Bouteflika est en constante amélioration et qu’il va bientôt rentrer en Algérie pour poursuivre sa mission » avait–elle déclarée lundi lors de sa conférence de presse hebdomadaire.
Puis de poursuivre en s’en prenant violemment aux partis et personnalités politiques qui réclament avec instance la mise en application de l’article 88 de la Constitution relatif à l’empêchement. « On n’est pas en situation d’application de cet article et ceux qui le revendiquent n’ont qu’à servir autre chose aux algériens » oppose t-elle en ajoutant que « cette revendication est de nature à fragiliser le pays » à cause du contexte régional.
Chafik Mesbah, officier à la retraite des services de sécurité ne partage pas le point de vue de Louisa Hanoune, et soutien même le contraire dans ses certitudes exprimées lundi lors du forum de Liberté.« « j’ai des informations personnelles que je tiens de hauts responsables français officieux selon lesquelles le président Bouteflika ne pourra plus reprendre l’exercice de ses activités même s’il rentre au pays » avait-il avancé ce jour-là en donnant même l’impression d’en savoir davantage.
En dépit de cette incapacité dont parle Chafik Mesbah, l’avocat et homme politique Mokrane Ait Larbi, qui a publié samedi dans la presse une tribune prévient que cette situation de statut quo risque du durer encore longtemps « Cela fait aujourd’hui 40 jours que le président est absent et tout en lui souhaitant un prompt rétablissement, je dirais que la situation peut durer ainsi encore longtemps. N’oubliez pas que Tayeb Bélaiz, le président du Conseil constitutionnel est un ami personnel du président, je suis convaincu qu’il ne réunira jamais cette institution pour mettre en branle l’article 88 de la constitution » avait-il dit dit en substance dans les colonnes d’El Khabar.
Mohamed Saidj, universitaire à Sciences politiques abonde un peu dans le même sens en affirmant, dans une autre déclaration à
Algérie1 jeudi que « le système peut s’accommoder encore longtemps de cette absence, le temps de permettre aux différents clans de se mettre d’accord sur une autre personnalité qui va prendre la succession de Bouteflika ». Pour cet universitaire, « l’aggravation de la maladie de Bouteflika a bousculé l’agenda politique, la perspective du quatrième mandat est désormais enterrée et je peux même dire que psychologiquement les algériens sont déjà dans l’après Bouteflika ».
Un après Bouteflika qui ouvre de nouvelles perspectives politiques avec des supputations de presse sur de possibles candidatures pour les présidentielles. Ainsi, Chafik Mesbah, propose l’ancien président Liamine Zeroual, comme « homme de consensus, soutenu par les principaux courants politiques pour une période de transition de deux ans pour lui permettre de mettre en place les conditions pour une élection présidentielle ouverte et pluraliste ». D’autres candidats, qui ne se sont pas encore déclarés, ont néanmoins chargé des personnes de leur entourage pour parler en leur non dans la presse, comme l’ancien premier ministre Ali Benflis qui s’est dit partant pour la présidentielle de 2014. Dans le même temps Ahmed Ouyahia et Mouloud Hamrouche, deux anciens chef des gouvernements, cités comme de potentiels candidats, affichent, pour le moment un silence assourdissant. Question de timing ?