WEB - GOOGLE - ACTUALITE > International Les «artisans terroristes» de Londres
Mis à jour le 24/05/2013 à 07:33 - Publié le 23/05/2013 à 19:55
Jeudi, des policiers déposent des fleurs sur le lieu du meurtre du soldat britannique Lee Rigby, 25 ans, à Woolwich, au sud-est de Londres.
Les deux hommes étaient connus des services de sécurité qui n'ont pourtant pas pu empêcher leur passage à l'acte. Un homme et une femme ont par ailleurs été arrêtés pour complicité de meurtre, jeudi.
Des «artisans terroristes» britanniques convertis à l'islam sur le tard. Le profil des assaillants qui ont sauvagement tué un jeune soldat à l'arme blanche, mercredi, en pleine rue devant de nombreux témoins dans le sud-est de Londres, commence à se dessiner.
Jeudi, plusieurs perquisitions ont eu lieu, notamment dans cinq adresses de la capitale. La police a également procédé à l'arrestation d'un homme et d'une femme, tous deux âgés de 29 ans, soupçonnés de complicité dans l'affaire. Ils n'auraient pas de lien de parenté avec les deux auteurs présumés du meurtre. Ces derniers, blessés par les forces de l'ordre et hospitalisés sous haute surveillance, étaient connus des services de sécurité britanniques mais considérés comme du menu fretin, avant leur passage à l'acte dans une mise en scène spectaculaire abondamment relayée sur les réseaux sociaux et à la télévision. Une enquête a été déclenchée pour évaluer les failles du MI5 (renseignements intérieurs), du MI6 (contre-espionnage) et de la police dans cette affaire.
Le suspect le plus volubile, qui a déversé sa propagande dans une vidéo où on le voit les mains en sang tenant un couteau et un hachoir, avant l'arrivée de la police, a été identifié comme Michael Adebolajo, âgé de 28 ans. Le nom de son complice n'avait pas été divulgué en milieu d'après-midi, jeudi.
Né dans l'arrondissement de Lambeth, quartier sud de Londres, Adebolajo est l'un des trois enfants d'une famille d'origine nigériane très chrétienne. Le père est infirmier, la mère travaille dans les services sociaux et se rend à la messe tous les dimanches, selon des voisins. À l'école de Marshalls Park à Romford (Essex), Michael, surnommé «Naan», a laissé le souvenir d'un élève brillant, sociable, drôle, qui jouait au foot. Mais dans les dernières années de sa scolarité secondaire, il se met à fréquenter les membres d'un gang local, armés de couteaux, pratiquant des vols de téléphones. Cela ne l'empêche pas d'entrer à l'université de Greenwich, non loin de là, où il vit dans une résidence étudiante. En 2004, les parents divorcent et déménagent dans le Lincolnshire.
Il diffusait des prospectus de propagandeC'est dans ces années-là qu'Adebolajo se serait converti à l'islam. Il prend le nom de Mujaahid, «le combattant du djihad». Il aurait alors fréquenté l'organisation islamiste extrémiste al-Muhajiroun, interdite après les attentats de 2005 à Londres. En être membre devient passible de dix ans de prison. «Il était sur notre longueur d'ondes idéologique», raconte l'ancien leader de l'organisation, Anjem Choudary, qui fréquentait la même mosquée que lui. Selon ce dernier, Adebolajo aurait arrêté de participer aux réunions depuis deux ans. Il aurait été interpellé en route pour la Somalie où il voulait rejoindre les militants Shabaab. Il diffusait des prospectus de propagande islamiste dans les rues de Woolwich. «Vous ne serez jamais en sécurité. Ce soldat britannique, c'est œil pour œil, dent pour dent», invoquait-il, avec un accent londonien prononcé, dans la vidéo filmée juste après le meurtre. Jeudi, la police a ainsi mené plusieurs opérations simultanées, au domicile du père d'Adebolajo dans le village de Saxilly (Lincolnshire) mais aussi chez sa sœur, Blessing, à Harold Wood, près de Ramford.
Les deux suspects devaient être interrogés dès que leur état de santé le permettrait à l'hôpital. Leurs liens éventuels avec des organisations terroristes seront scrutés, même si leur modus operandi fait apparaître a priori le scénario d'individus illuminés isolés, hantise du MI5. «Il y a un risque que de nouvelles attaques de loups solitaires se produisent», met en garde Anjem Choudary, incriminant la politique du gouvernement britannique, tout en condamnant l'usage de la violence.
Par crainte des débordements, 1.200 policiers supplémentaires ont été déployés jeudi soir dans la capitale britannique, «dans des emplacements clés parmi lesquels les sites religieux, les transports en commun et les zones d'affluence», afin de «rassurer les gens», a fait savoir Scotland Yard. La veille, la sécurité avait déjà été renforcée devant les casernes militaires de la capitale et des échauffourées avaient opposé la police et quelque 250 manifestants anti islamistes.
Les autorités ont par ailleurs dévoilé l'identité de la victime: Lee Rigby, 25 ans, avait servi en Afghanistan en 2009. Il était père d'un garçon de deux ans.