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Cleveland : la police accusée de négligence
Mis à jour le 09/05/2013 à 00:00 - Publié le 08/05/2013 à 23:12 À gauche, Ariel Castro, le propriétaire de la maison où étaient détenues les jeunes femmes, et ses deux frères Oneil et Pédro.
Plusieurs témoins affirment avoir tiré la sonnette d'alarme sur des bizarreries dans la maison du kidnappeur.
Après la libération des trois séquestrées de Cleveland lundi, les questions se multiplient sur le rôle de la police et des services sociaux dans cette affaire, alors que plusieurs voisins affirment avoir signalé des comportements suspects.
Le département de police déclare n'avoir reçu que deux appels concernant Ariel Castro depuis 2000. Le premier venait du suspect lui-même, pour une bagarre dans le quartier. Le second en janvier 2004, cette fois parce qu'un enfant avait été «oublié» dans son bus. La police l'avait interrogé, sans entrer chez lui, puis avait classé l'affaire.
De nombreux voisins et amis de ce chauffeur de bus scolaire licencié en 2012 déclarent n'avoir jamais suspecté Ariel Castro, qu'ils décrivent comme «normal». Mais d'autres affirment avoir alerté la police de bizarreries que celle-ci n'aurait pas prises suffisamment au sérieux.
Ainsi, Elsie Cintron a raconté avoir appelé le commissariat après que sa petite-fille avait vu une femme nue ramper dans le jardin. Elle-même dit avoir vu Castro se balader avec une petite fille (il s'agirait de Jocelyne, la fille d'Amanda Berry), également aperçue à la fenêtre du grenier. L'officier de garde, une femme, lui aurait conseillé de s'adresser à un détective. «J'ai été découragée et j'ai laissé tomber», a-t-elle dit à la BBC.
Une autre voisine de ce quartier plutôt pauvre de Cleveland, Nina Samoylicz, a aussi raconté avoir vu une femme nue un soir dans le jardin. «La police ne nous a pas crues, elle pensait que nous faisions une blague.» Un troisième voisin, Israël Lugo, affirme quant à lui que sa famille a appelé la police en 2011 et 2012. Des officiers se seraient déplacés à chaque fois. En novembre 2011, il a entendu quelqu'un donner des coups contre une porte de la maison, dont les fenêtres étaient partiellement barricadées. «Les policiers ont fait le tour de la maison puis sont repartis.» Sa mère se serait plainte du bus de Castro garé trop près de sa maison. Les Lugo se demandaient pourquoi il achetait autant de nourriture alors qu'il était censé vivre seul. D'autres voisins auraient appelé le commissariat après avoir vu, non pas une mais plusieurs femmes marcher nues à quatre pattes dans le jardin, avec des laisses autour du cou.
La police de Cleveland a démenti tout appel récent du voisinageMercredi matin, la police de Cleveland a publié un communiqué démentant tout appel récent du voisinage. Quelqu'un ment-il? S'agit-il d'appels non répertoriés dans les archives de la police ou de voisins pétris de culpabilité qui s'imaginent avoir réagi?
Le maire de Cleveland a pris la défense de ses forces de l'ordre, qui avaient déjà été vivement critiquées en 2009 par les familles de onze victimes d'un tueur en série découvertes dans un autre quartier pauvre de la ville. Beaucoup se demandent pourquoi les trois disparitions survenues dans un périmètre restreint ne faisaient pas l'objet d'une enquête commune. La grand-mère d'une quatrième fille de 14 ans disparue dans le quartier en 2007 - Chelsea Summers - a déclaré mercredi avoir eu peu de nouvelles du FBI.
Dans l'affaire Castro, une autre question émerge: pourquoi les services sociaux n'ont-ils pas été alarmés par le passé violent d'Ariel?
Un épisode de brutalité conjugale en 1993 n'a pas donné de suite, mais le compte rendu de la plainte de son ex-femme au tribunal est accablant. Il y est fait mention d'une dent, d'un nez et de côtes cassées.
Le fils de Castro, Anthony, aujourd'hui employé dans la finance, raconte au
Daily Newsque son père maltraitait ses proches et verrouillait déjà à l'aide de cadenas les portes de la cave, du garage et du grenier dans les années 1990, quand lui et ses trois sœurs vivaient encore avec lui et sa mère, battue presque à mort, dit-il, par son père. Celle-ci est décédée en 2012. L'une des filles - diagnostiquée maniaco-dépressive à l'âge de 13 ans -, est en prison pour avoir tenté d'égorger son bébé.
La porte-parole de la police a reconnu mardi que l'enquête serait longue. «Nous connaissons juste la partie émergée de l'iceberg.»