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VIDEO. Le général connaît la musique
La prestigieuse maison de disque Deutsche Grammophon a commandé à la légion étrangère un album de chansons militaires.
Entretien avec le boss des képis blancs.
Publié le 21.04.2013, 10h27 Aubagne (Bouches-du-Rhône), jeudi. Christophe de Saint-Chamas a vécu l’association avec Deutsche Grammophon comme un énorme défi, fédérateur pour sa troupe.
On ne croise pas tous les jours un général trois étoiles, qui plus est patron du corps le plus mythique de l’armée française. Et ce n’est pas tous les jours que l’on discute grande musique dans une caserne. Alors quand le général de Saint-Chamas, 54 ans, patron des 7000 hommes de la légion étrangère, nous ouvre ses portes, à la faveur de la sortie d’un disque pour le prestigieux label allemand Deutsche Grammophon (lire ci-dessous), on y va au pas de charge. Pour rencontrer le troisième plus haut gradé de l’armée de terre, il faut prendre date, car il a un emploi du temps de ministre. Puis l’avion pour Aubagne, pays de Marcel Pagnol et des santons de Provence. Le commandement de la légion étrangère, perché sur une colline, est un havre de paix où l’on entend les oiseaux et du piano quand les fameux « képis blancs » ne défilent pas autour du monument aux morts, marqué de leur devise, « Honneur et Fidélité ».
On sourit en lisant, sur la porte d’entrée, comme dans une école, « Le général ». Dans son bureau, grand mais modeste, on s’attend à se faire broyer la main, face à un mur de raideur, et c’est un homme doux et chaleureux qui s’assoit à vos côtés. « Je n’aime pas recevoir derrière mon bureau, avoue-t-il. C’est trop distant. » « C’est un cavalier, souligne Grégory, un ancien de la légion. Un homme très bien élevé, fin, éduqué, mais aussi très humain. »
Pour le général, le disque « Héros », enregistré par les 62 musiciens de l’orchestre d’harmonie (sans cordes) de la légion, est une façon parmi d’autres — il édite un dictionnaire, un livre de photos et va bientôt inaugurer le musée de la légion — de rendre hommage à ses troupes, à l’occasion du 150e anniversaire de la bataille de Camerone (Mexique), fait d’armes de la légion étrangère.
« Je ne suis pas mélomane, estime Christophe de Saint-Chamas. Mais j’aime le classique, Piaf, Offenbach et j’aime chanter. Le chant est d’ailleurs constitutif de la légion, il apprend à parler le français, à jouer collectif et met tout le monde à égalité. Quand il chante, le petit fluet peut battre le gros costaud qui chante faux. Mais ce qui m’a surtout plu dans ce projet, c’est la rencontre entre deux mythes internationaux. C’était un énorme défi de travailler avec les meilleurs. On s’est dit : allez, même pas peur! »
Entré à Saint-Cyr à 18 ans, Christophe de Saint-Chamas a fait toute sa carrière dans l’armée. Il a participé à de nombreux conflits, de la guerre du Golfe à l’Afghanistan, a été affecté trois fois à la légion étrangère avant d’en prendre les rênes en septembre 2011. « Tout petit, j’aimais déjà ça, raconte-t-il. Je suis le seul militaire de ma famille, mon père et mon grand-père étaient avocat et scientifique. Ce doit être l’amour du pays, l’envie d’être utile. Ce n’est pas une question d’argent en tout cas. »
Ce littéraire passionné d’histoire et de géographie a trouvé de quoi combler sa soif de voyages et de culture dans les Balkans, en Afrique, en Asie… « Quand on dirige des opérations, c’est passionnant d’essayer de comprendre les origines du conflit, les rapports de force, de coordonner l’implication militaire avec l’implication politique, pas toujours sur le même tempo… C’est parfois exaltant, quand on évacue 4 000 personnes du Congo-Brazzaville, mais c’est aussi une épreuve quand on est plus d’un an éloigné de sa famille
(NDLR : il a sept enfants) ou quand vos hommes tombent, en Afghanistan, au Mali… »
Il semble viscéralement attaché à ses légionnaires. « Des hommes extraordinaires, lance-t-il. Ils viennent de 150 pays pour combattre, et peut-être mourir, pour un pays qui n’est pas le leur. C’est unique au monde. » Comme leur réputation de tatoués, de durs à cuire… « Leur image de mauvais garçons ne me fait pas peur, sourit-il. Je n’ai pas besoin de premiers de la classe, avec petites lunettes et protège-cahier. Quand il faut monter à l’assaut, il faut de l’acier trempé. »
« Il sait se mettre au niveau de ses soldats, admire Vladimir Chtecherbyna, sergent ukrainien dans l’orchestre de la légion depuis dix ans. Et il tient toujours parole. » « Il a deux qualités rares chez un soldat, renchérit un de ses officiers, c’est un super communiquant et un manageur toujours à l’écoute. »
La devise du général est d’ailleurs à l’avenant : « Un chef n’a jamais l’intelligence de tous ses subordonnés ». Un tel chef, il n’y en a pas légion.
VIDEO. La Légion étrangère sort un disque