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Boston : les frères Tsarnaev venus au jihad par internet ?
Publié le 20.04.2013, 08h41 | Mise à jour : 09h49
BOSTON (MASSACHUSETTS, ETATS-UNIS), LUNDI. Les frères Tsarnaev, Dzhokhar (à gauche) et Tamerlan, avaient des activités sur Internet en lien avec l'islamisme et le terrorisme.
Les deux suspects de l'attentat de Boston, des Tchétchènes ayant grandi aux Etats-Unis, pourraient correspondre au profil d'une nouvelle génération venue au jihad par internet et qui choisit de frapper sur place, selon des experts.
Les motivations de Tamerlan Tsarnaev, 26 ans, mort dans la nuit de jeudi à vendredi, et de son cadet Dzhokhar, 19 ans, blessé et arrêté près de 24 heures plus tard au terme d'une gigantesque chasse à l'homme, restent floues. «Pourquoi de jeunes hommes qui ont grandi et étudié ici parmi nous, dans notre pays, ont recours à une telle violence ? Comment ont-ils planifié et mené ces attentats ? Et ont-ils reçu de l'aide ?», s'est interrogé le président américain Barack Obama.
«Il semble que le problème soit moins qu'ils aient pu ou non s'entraîner dans des camps en Tchétchénie, que leur radicalisation sur les réseaux sociaux», argue Seth Jones, spécialiste du terrorisme islamiste à la Rand Corporation, centre américain de recherche et d'analyse.
Youtube, Twitter et version russe de FacebookTamerlan avait une page Youtube à son nom, créée en août 2012, où il avait marqué plusieurs vidéos islamistes comme favorites, notamment dans la catégorie «terrorisme». Dzhokhar, qui semble détenir le compte Twitter @J_tsar, fréquentait le réseau social VKontakte, équivalent en Russie de Facebook. Sur sa page Youtube, l'aîné citait Feiz Mohammad, un prêcheur radical islamiste, et Abdel al-Hamid al-Juhani, un idéologue d'al-Qaïda en Tchéchénie.
Selon Mary Habeck, spécialiste de l'islamisme radical à l'Université John Hopkins, les premiers éléments semblent montrer qu'un des frères «Tsarnaev s'intéressait à une forme très radicale du salafisme, habituellement associé à Al-Qaida et ses filiales». Le conflit en Tchétchénie est utilisé comme un «outil de recrutement par Al-Qaida», qui met en ligne de nombreuses vidéos pour attirer de nouvelles recrues, note Fiona Hill, spécialiste du Caucase à la Brookings Institution.
Al-Qaida a son magazine en ligneMusulmans et Tchétchènes, les frères Tsarnaev sont arrivés avec leur famille comme réfugiés vers 2003 à Cambridge, près de Boston, selon le récit de leur oncle. Dzhokhar n'avait pas 10 ans. «Le déracinement rend les jeunes plus facilement tentés par le discours radical», commente Bayram Balci, spécialiste du Caucase à la Carnegie, un groupe de réflexion de Washington.
L'attentat de Boston peut aussi être un acte de terrorisme «purement intérieur» qu'une action «d'envergure internationale», selon que les frères Tsarnaev ont eu ou non des contacts avec des responsables jihadistes, explique Ben Wittes, du think-tank (laboratoire d'idées) Brookings Institution.
«Il y a beaucoup d'exemples de gens souhaitant combattre à l'étranger qu'Al-Qaida a encouragé à agir dans leur propre pays», rappelle Frank Cilluffo, directeur de l'institut sur la sécurité intérieure de l'Université George Washington. Il souligne que c'est précisément ce que prône «Inspire», le magazine en ligne de la branche yéménite d'Al-Qaida. Les engins explosifs camouflés dans des cocottes-minute et utilisés sur le marathon de Boston, rappellent en outre ceux dont «Inspire» enseigne la fabrication.
Pour Brian Jenkins, auteur d'une étude de la Rand corporation sur le profil des jihadistes aux Etats-Unis, a recensé 104 attentats et projets depuis le 11 septembre 2001, où le World Trade Center a été pris pour cible à New York. Les trois-quarts des personnes impliquées sont citoyens américains, la moitié étant nées sur le territoire, 29% ayant été naturalisés, comme le plus jeune des frères Tsaraev. Le schéma est semblable dans de nombreux cas, affirme-t-il: «Nombre de jihadistes identifiés dans ces affaires ont commencé sur Internet leur parcours vers la radicalisation. Pour eux, le jihad est moins l'expression d'une croyance religieuse qu'un prétexte à l'expression d'un malaise personnel».