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Hollande confronté à son tour au casse-tête des retraites
Mis à jour le 04/03/2013 à 07:33 | publié le 03/03/2013 à 17:48
François Hollande, dans la cour de l'Élysée, le 1er mars.
Comme Nicolas Sarkozy, l'actuel chef de l'État va devoir se résoudre à augmenter l'âge de départ légal.Retour de bâton. Après avoir critiqué tant et plus la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy et inscrit dans son programme le retour de l'âge légal de départ à 60 ans pour les salariés ayant commencé à travailler tôt, voici donc François Hollande confronté à son tour au casse-tête de l'équilibre du régime général. Casse-tête non pas insoluble, mais fonction de trois paramètres: le montant des pensions, le niveau des cotisations, l'âge légal de départ.
Comme Sarkozy en son temps, Hollande n'a guère le choix, sinon celui d'opter pour le moins mauvais. Baisser le niveau des retraites étant difficilement conce­vable, augmenter les taux de cotisations étant contradictoire avec l'objectif du gouvernement de doper la compétitivité des entreprises, il ne reste plus que le report de l'âge légal de départ. Hollande «est aujourd'hui rattrapé par la réalité. (…) Le diagnostic est connu. La clé de voûte de la réforme, c'est l'allongement de la durée de cotisation et sans doute la fusion des régimes», a résumé dimanche Jean-François Copé dans
Le Parisien, comme pour mettre le chef de l'État au défi de se lancer. De fait, pour l'heure, le gouvernement temporise.
Une des dernières conquêtes sociales de la gaucheAlors que tous les éléments sont déjà sur la table, Marisol Touraine attend des «propositions de scénarios d'évolution» pour engager «une concertation approfondie» avec les partenaires sociaux, tout en se donnant «le temps de la discussion» afin d'aboutir à «une loi présentable avant la fin de l'année». «On déroule le calendrier et les étapes comme on les avait prévues, explique la ministre des Affaires sociales et de la Santé. L'objectif, c'est de dédramatiser autant que faire se peut.» L'enjeu est d'importance, tant, au PS, la question des retraites représente une inépuisable source de conflits.
En dépit des rapports à répétition sur le sujet, l'idée d'augmenter l'âge de départ fait toujours figure de tabou. Après tout, il s'agit quand même de revenir sur l'une des dernières conquêtes sociales de la gauche, qui plus est mise en place par François Mitterrand en 1981. Alors, forcément, maintenant que le sujet revient sur la table, les esprits commencent à s'échauffer. «Si au bout de six mois, après avoir approuvé le plan “Merkozy”, le pacte de compétitivité et l'accord emploi, on passe à l'augmentation de l'âge de départ à la retraite, c'est fini», s'agace Emmanuel Maurel, leader de l'aile gauche du PS.
Étonnamment, les esprits semblent pourtant prêts à évoluer au PS. En témoignent les propos iconoclastes d'Henri Emmanuelli. Figure emblématique de la gauche du parti, le député des Landes a reconnu la semaine dernière dans les couloirs de l'Assemblée que la «biologie» incitait à «se poser la question de la durée de cotisation». «Je vois des gens qui auront passé plus de temps en retraite que dans la vie active. C'est une situation qui ne peut pas perdurer», ajoutait-il en se prononçant, «à titre personnel», pour une augmentation des cotisations.
Le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, a enfoncé le clou, le lendemain, parlant même de «consensus»: «L'allongement de l'espérance de vie doit se partager entre-temps travaillé et temps retraité.» Un député PS influent estime que la réforme des retraites, même si elle est «brutale», pourrait néanmoins être approuvée sans trop de heurts. «Jusqu'aux municipales, rien ne sera dur au sein de la majorité, car le PS ne se déchirera pas avant.»
Ce même député se dit surtout persuadé que les mentalités ont considérablement évolué dans le parti. La preuve en est, selon lui, dans la manière dont a été reçue le 27 février la patronne du Medef, Laurence Parisot, par le groupe PS à l'Assemblée pour parler de la transposition dans la loi de l'accord des partenaires sociaux sur l'emploi. «Parisot devant le groupe? Mais c'est une grande première, du jamais vu! C'est tout juste si, à la fin, elle n'a pas été applaudie… Quoi qu'il en soit, elle n'a pas été écoutée dans un silence poli. Mais dans un silence très intéressé.» Et cet élu socialiste de conclure: «Il faut voir les mouvements incroyables qui sont en train de se produire chez nous.»
Reste à expliquer ces mouvements aux électeurs traditionnels du PS, ce qui ne sera pas forcément le plus simple. Une corvée de plus pour Hollande, qui devra bien se résoudre, à un moment, à expliquer pourquoi, après avoir autant combattu Sarkozy, il se résout à pratiquer la même politique. Car la réforme des retraites aura bien lieu. Comme le reconnaît Marisol Touraine: «C'est une exigence, puisque le régime n'est pas équilibré.»