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L'amnistie sociale gêne le PS et indigne la droite
Mis à jour le 01/03/2013 à 16:57 | publié le 28/02/2013 à 19:45
200 à 300 militants du Front de gauche et des syndicalistes se sont rassemblés mercredi devant le Sénat pour soutenir le texte.
Après le vote du Sénat, l'Assemblée se prononcera en mai sur un texte dont le gouvernement minimise la portée.L'embarras des socialistes est à la hauteur du défi que leur ont lancé les communistes et le Front de gauche. Une proposition de loi, préparée par les amis de Jean-Luc Mélenchon et dénoncée par l'UMP comme une démarche «idéologique et clientéliste », enflamme les esprits. Le texte prévoit l'amnistie des condamnations pour des atteintes aux biens - destructions, dégradations - lors de conflits sociaux.
Résolument hostiles à une amnistie générale, les sénateurs socialistes et radicaux de gauche, qui ont finalement voté ce texte, ont contraint leurs alliés communistes à réduire leurs ambitions. La proposition de loi a été adoptée mercredi par 174 voix contre 171. Les différents groupes de gauche l'ont approuvée. La droite et le centre s'y sont opposés.
Le texte prévoit d'annuler les condamnations pénales - et les sanctions disciplinaires - pour les atteintes aux biens commises entre le 1er janvier 2007 et le 1er février 2013 et passibles de cinq ans de prison au maximum. Les faucheurs anti-OGM ne peuvent pas prétendre en bénéficier. Les menaces contre les personnes dépositaires de l'autorité publique en ont été exclues.
Seront finalement amnistiés les faits commis à l'occasion des conflits du travail, d'activités syndicales de salariés et d'agents publics, y compris lors des manifestations, les infractions commises lors de mouvements collectifs revendicatifs, associatifs ou syndicaux, relatifs aux problèmes liés au logement, ou encore le refus de se soumettre à des prélèvements ADN, si les faits à l'origine de ces prélèvements sont eux-mêmes amnistiés.
«Un bon équilibre entre l'état de droit et le besoin de paix sociale »Pendant la discussion, de 200 à 300 militants du Front de gauche et des syndicalistes s'étaient rassemblés devant le Sénat pour soutenir ce texte. «À bas la violence qui continue contre les nôtres! » s'est exclamé Jean-Luc Mélenchon (ancien sénateur), qui a rejoint les tribunes du public lors du vote, accompagné de la coprésidente du Parti de gauche, Martine Billard.
Soulagés de voir que leurs collègues sénateurs ont amoindri le champ d'application du texte, en écartant notamment du champ de l'amnistie les violences physiques, les députés socialistes n'en restent pas moins vigilants. «Il faudra voir si ce travail de recadrage est suffisant ou s'il faudra le compléter », observe Thierry Mandon, porte-parole du groupe PS. «Il y a eu un bon travail des sénateurs socialistes pour rendre le texte “potable”. Il est possible que nous devions le compléter », ajoute Philippe Martin, vice-président du groupe PS. «Il faut trouver un bon équilibre entre l'état de droit et le besoin de paix sociale », estime Annick Lepetit. «Pas question de donner un sentiment d'impunité concernant les dégradations de biens », prévient Pascal Terrasse.
Pour plusieurs députés socialistes, qui veulent normaliser les rapports avec les élus communistes, ce texte est une opportunité qui relève du symbole. «La place des syndicalistes n'est pas dans les prétoires, ni dans les prisons, mais auprès des salariés, plaide Jean-Marc Germain. Ce texte n'est pas un chèque en blanc (donné aux violences syndicales), mais un geste d'apaisement, dans un contexte économique très difficile.» Même tonalité chez Malek Boutih, favorable au texte: «Il ne s'agit pas d'effacer des actes illégaux, mais d'envoyer des signes d'apaisement.» Pour relativiser la portée du texte, Christiane Taubira a estimé que l'amnistie ne concernerait que «quelques dizaines de condamnations ».
Débat à l'Assemblée le 16 maiÀ l'UMP comme dans le patronat, l'indignation est manifeste. «C'est un texte absolument clientéliste, un texte d'injustice et de lutte des classes », dénonce Hervé Mariton, député de la Drôme. Le sénateur Pierre Charon accuse la gauche d'«excuser ce qui ne doit pas l'être pour des raisons idéologiques et clientélistes», tandis que Valérie Pécresse s'indigne par voie de tweet: «La violence devient excusable? Silence assourdissant et irresponsable de François Hollande.» La CGPME a aussi protesté contre cette «clémence pour les syndicalistes » en notant qu'«à l'inverse un patron (…) qui n'a pas exactement respecté la procédure lors des élections de délégués du personnel reste coupable d'un délit d'entrave passible d'un an d'emprisonnement».
Le texte pourrait venir en discussion à l'Assemblée le 16 mai, dans le cadre de la prochaine «niche » du groupe communiste et Front de gauche.