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Findus : soupçons d'une fraude à plus grande échelle
Mis à jour le 11/02/2013 à 00:04 | publié le 10/02/2013 à 20:48
Les enseignes de la grande distribution ont indiqué avoir fait retirer de leurs rayons
(ici un magasin à Wittelsheim, en Alsace) les produits concernés par l'affaire de la viande de cheval.
INFOGRAPHIE - Retraits de surgelés dans les rayons, réunions de crise et plaintes croisées : les lasagnes à la viande de cheval provoquent un scandale européen.Le «horsegate», arrivé par la Grande-Bretagne, prend de l'ampleur. Le scandale des lasagnes à la viande de cheval censées contenir du bœuf gagne du terrain. Depuis dimanche, la liste des plats surgelés suspects s'est allongée. Tout comme le nombre d'enseignes de la grande distribution qui ont annoncé le retrait de produits de leurs rayons. Dans un climat de psychose naissante, chaque protagoniste se défausse de toute responsabilité. Tromperie ou fraude organisée à grande échelle, l'affaire alerte sur les difficultés de la traçabilité des produits qui atterrissent dans nos assiettes.
• Une longue liste de produitsEn France, des lasagnes, cannellonis, spaghettis bolognaise, moussakas ou hachis parmentier ont été retirés de la vente dans six grandes enseignes. Ce retrait, annoncé dimanche, concernerait des produits Findus et, à environ 90 %, d'autres marques de distributeurs (Auchan, Casino, Carrefour, Système U, Cora, Monoprix, Picard). Les produits ont été enlevés «du fait d'une non-conformité d'étiquetage quant à la nature de la viande», a précisé la Fédération du commerce et de la distribution (FCD).
Les groupes Leclerc et Intermarché ont sorti les produits Findus concernés dès vendredi. L'extension du phénomène était prévisible, car l'entreprise française Comigel, qui préparait les plats cuisinés en cause, commercialise ses produits dans seize pays européens. Les produits Findus réintégreront les rayons en début de semaine après des tests ADN.
• Un circuit propice à la fraudeLes plats surgelés comme ceux de Findus sont préparés par l'entreprise Comigel, qui se fournit en viande auprès de la société française Spanghero. Cette dernière est accusée par Findus de ne pas s'être assurée de la qualité du produit. Spanghero et sa maison mère Pujol sont passés par l'intermédiaire d'un trader chypriote qui avait lui-même sous-traité la commande à un trader situé aux Pays-Bas.
Le ministre délégué à la Consommation, Benoît Hamon, a dénoncé une architecture qui «relève avant tout d'une logique financière qui aurait rapporté plus de 300.000 euros». Une première estimation. Dans son entourage, on évoquait hier soir «un faisceau d'indices permettant de présager une fraude intentionnelle, liée à un système de vente et de revente». Au début de la chaîne, l'abattoir roumain: il est défendu par l'association de patrons roumains de l'alimentaire, Romalimenta, qui rejette la faute sur l'importateur.
• Une tournure judiciaireDes enquêtes ont été ouvertes en Roumanie et en France où la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a été saisie. À elle de déterminer à quel stade de la filière le cheval s'est transformé en bœuf, plus cher sur le marché, et s'il s'agit d'une fraude manifeste ou d'une série de négligences. Dès vendredi, des échantillons de viande ont été prélevés en vue d'analyses. «Nous verrons mercredi les premiers résultats. Et notamment si Spanghero savait qu'elle achetait du cheval ou si elle a été trompée», a indiqué Benoît Hamon.
Parallèlement, la répression des fraudes travaille sur les bases de données de douanes afin de déterminer si les importations déclarées de viande de cheval dans l'Hexagone correspondent aux chiffres de vente. Les investigations du Service national d'enquêtes devront aussi établir si d'autres circuits d'approvisionnement peuvent être suspectés. L'estimation du tonnage de viande trafiquée devrait être quant à elle connue dès mercredi.
En France, le groupe Findus, distributeur des plats impliqués, a annoncé le dépôt d'une plainte contre X ce lundi. Findus Nordic va également porter plainte contre la société française Comigel et ses fournisseurs pour fraude et non-respect des dispositions contractuelles. Cogimel estime avoir été «berné» et va «demander réparation». Depuis Londres enfin, Findus a jugé que cette fraude pourrait remonter à août 2012 et qu'il était peu probable qu'elle soit «accidentelle». La société française Spanghero, qui a fourni la viande, indique qu'elle se retournera contre son propre fournisseur roumain, «s'il s'agit bien de viande de cheval».
• Coups de gueule et gestion de criseDe l'abattoir au rayon des surgelés, ce scandale révèle la fragilité de traçabilité des produits. «C'est un laisser-aller blâmable de la législation communautaire», a déploré Alain Bazot, président d'UFC-Que choisir. L'ex-ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, a estimé que l'amélioration de l'étiquetage des produits alimentaires était «une nécessité». Les résultats de l'enquête permettront de «savoir si aujourd'hui il y a matière ou non à modifier la réglementation européenne», a commenté le ministre de l'Agroalimentaire, Guillaume Garot, défendant la «très grande qualité» du contrôle vétérinaire.
Lundi, Benoît Hamon convoque toute la filière, des producteurs à la grande distribution en passant par les industriels. Objectif: faire le point sur la traçabilité, qui fait l'objet de contrôles renforcés depuis lundi, et s'assurer du retrait de tous les plats suspects. Le ministre recevra aussi des associations de consommateurs en plein émoi. «Il n'y a pas d'alerte sanitaire», martèle-t-on chez Benoît Hamon.