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Le Qatar a-t-il triché pour obtenir le Mondial 2022 ?
Publié le 29/01/2013 à 14:47
Sepp Blatter lors de la désignation du Qatar comme pays hôte de la Coupe du monde 2022.
France Football publie mardi une enquête dans laquelle il accuse le Qatar de corruption dans la course à l'attribution de la Coupe du monde 2022.
«
Mondial 2022, Le Qatargate.» C'est sous ce titre, volontairement accrocheur, que
France Football publie ce mardi une vaste enquête sur la désignation du Qatar comme pays hôte de la Coupe du monde 2022. Et le bi-hebdomadaire, s'appuyant sur des enquêtes de confrères étrangers et sur des révélations exclusives, d'accuser le petit Etat du Golfe d'avoir ni plus, ni moins acheté la compétition. Le 2 décembre 2010, le comité exécutif de la FIFA confie au Qatar l'organisation de cette Coupe du monde à l'issue d'un 4e tour de vote au cours duquel il s'impose 14 voix à 8 face aux Etats-Unis. Un événement pour les Qataris et pour le monde du football qui n'avait jamais confié la Coupe du monde à un Etat aussi petit et qui n'était même jamais allé au Moyen-Orient. Après l'ouverture à l'Asie (Japon-Corée du Sud 2002) et à l'Afrique (Afrique du Sud 2010), le choix de la FIFA pouvait s'expliquer, à défaut d'être compris, notamment par les malheureux perdants (Etats-Unis, Australie et Japon qui étaient en lice également).
Sauf que la chronologie des faits qui ont amené à ce résultat laisse apparaître des zones d'ombre et quelques arrangements étranges. Fort d'une surface financière estimée à 540 milliards d'euros, tirés de son immense réserve de gaz (la 3e du monde derrière la Russie et l'Iran), le Qatar a ainsi procédé à un vaste travail de lobbying pour promouvoir sa candidature, allant, selon
France Football, jusqu'à dépenser près de 34 millions d'euros en frais de communication rien qu'en 2010. Rien d'illégal dans tout cela… Sauf que la façon dont une partie de ces sommes a été utilisée pose question. «
Ils ont acheté le Mondial 2022», n'avait pas hésité à écrire Jérôme Valcke, secrétaire générale de la FIFA, dans un mail adressé à Jack Warner, vice-président de la FIFA en mai 2011, avant de se rétracter. En octobre 2010, le
Sunday Times avait recueilli le témoignage d'une employée du service communication internationale pour la candidature du Qatar qui accusait deux membres du comité exécutif, l'Ivoirien Jacques Anouma et le Camerounais Issa Hayatou, président de la CAF, d'avoir touché 1,5 million de dollars pour voter pour le Qatar. Elle s'est rétractée en juillet 2011.
En décembre 2010, c'est cette fois le
Wall Street Journal qui révélait qu'au moins un des conseillers de la fédération qatarie avait proposé à la fédération argentine de lui verser 78,4 millions de dollars pour l'aider à sortir le championnat d'Argentine de la crise financière qui le menaçait. Julio Grondona, président de l'AFA, qui traîne derrière lui de nombreuses et bruyantes casseroles, a démenti ces accusations mais n'a, bizarrement, jamais attaqué le quotidien américain pour diffamation.
France Football, à son tour, fait état ce mardi d'un entretien avec un conseiller de Sepp Blatter qui aurait, quinze jours avant le vote, annoncé aux journalistes du bi-hebdomadaire que la Russie aurait la Coupe du monde 2018 et le Qatar celle de 2022, en précisant même qui voterait pour qui.
Et ce n'est pas fini… FF explique encore que le Qatar a «sponsorisé» à hauteur de 1,25 million d'euros le Congrès de la confédération africaine de football, organisé en janvier 2010 en Angola, afin d'y promouvoir sa candidature, privilège qu'aucun autre pays en lice n'a eu. Un congrès au cours duquel les promoteurs de la candidature qatarie ont pu s'entretenir avec quatre membres du comité exécutif de la FIFA, appelés à se prononcer en décembre de la même année ! Enfin, il y a cette réunion du 23 novembre 2010 à l'Elysée en présence de Nicolas Sarkozy, alors président de la République française, le prince du Qatar, Tamin bin Hamad al-Thani, Sébastien Bazin, représentant de Colony Capital, propriétaire du Paris SG, et de Michel Platini, président de l'UEFA et membre du comité exécutif de la FIFA. Ce soir-là, la discussion aurait tourné autour du rachat du PSG par des investisseurs qataris en échange du vote de Michel Platini. Moins de deux semaines plus tard, l'ancien numéro 10 des Bleus apportera sa voix au Qatar («
J'ai voté en toute indépendance pour une région qui n'avait jamais eu la Coupe du monde, pas parce que Sarkozy me l'avait demandé», s'est-il défendu) tandis que QSI rachètera le PSG à l'été 2011 (avant de lancer BeInsport et de financer grandement la Ligue 1 via les sommes versées pour les droits de retransmission)…
Autant d'éléments troublants qui placent le Qatar, mais aussi la FIFA, souvent au cœur de scandales de corruption ces dernières années, dans l'œil du cyclone. Pour (tenter de) se racheter une virginité, l'instance régissant le football international a mis en place une chambre d'instruction de sa commission d'éthique et en a confié la présidence à l'Américain Michael Garcia, ancien procureur fédéral à New York et ancien vice-président d'Interpol pour la région Amérique de 2003 à 2006. Ce dernier va s'appliquer à déterminer «
jusqu'où le Qatar a poussé le curseur» pour obtenir l'attribution du Mondial 2022. Il a déjà avancé si l'on en croit le communiqué publié la semaine dernière par la FIFA, indiquant que «
certaines allégations concernant des événements survenus dans le cadre de la procédure d'attribution des Coupes du monde 2018 et 2022 ont été référées à la commission.» Quels éléments ? Mystère pour l'instant mais le comité d'organisation de la Coupe du monde 2022 reste serein face à toutes ces accusations. «
Les gens qui ont porté ces accusations ont été discrédités par la nature même de leurs accusations car elles n'avaient aucun fondement», a déclaré à
France Football, un porte-parole officiel de ce comité d'organisation, «
à 100% confiant et optimiste» quant à la tenue de la compétition au Qatar en 2022.